Chapitre 46 : La goutte d'eau

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De révélation en révélation, mes espoirs s’amenuisaient.

Adam ne serait jamais le premier.

Voilà la conclusion à laquelle j’étais arrivée à la fin de notre discussion à cœur ouvert. Cela brisait le mien et me broyait littéralement les tripes. Une tristesse infinie s’abattit sur moi comme une chape de plomb. La déception était horrible, amère, sans concessions. Je savais désormais que mon vœu le plus cher ne se réaliserait jamais, qu’Adam ne voudrait jamais de moi, ni pour être le premier, ni pour être l’homme de ma vie, ni pour être quoi que ce soit d’autre qu’un sauveur tombé du ciel. Il était pétri d’interdits, bourré de croyances limitantes, entouré de barrières de protection insurmontables. J’avais l’impression qu’il était dans un champ de mines, seul, au milieu d’explosifs, et qu’à tout moment il pouvait péter avec, s’il faisait quoi que ce soit de non-conforme à sa vision étriquée.

Après ces confessions, le silence se fit et je m’aperçus qu’il s’était rendormi. J’en fis autant, assommée de fatigue par mes larmes versées en secret.

Ce fût la sonnerie de la porte d’entrée qui nous réveillât en sursaut. Adam grogna, se leva et alla voir qui venait nous déranger.

J’entendis une voix féminine et allai me poster discrètement sur le seuil de la chambre. Par l’entrebâillement de la porte, je vis la silhouette sylphide d’une jeune femme blonde. À vue de nez, elle avait plus que son âge.

Elle l’embrassa en attrapant sa nuque et mon cœur éclata au sol sans un bruit. Ma douleur était atroce.

Je filai sous la douche pour pleurer tout mon soûl. Mes sanglots étaient violents et intarissables, ils sortaient de moi par à-coups réguliers, me donnant l’impression que mon cœur allait me quitter. Lorsque toute ma peine fût évacuée, si tant est que cela fût possible, je ressortis et me rhabilla avec les fringues qu’il m’avait prêtées.

Je restai dans la chambre, sur le lit. Il revint m’y trouver, me demandant ce que je faisais. Ce que je faisais ? Eh bien, j’attendais que sa pouffe dégage de là que je puisse enfin rentrer chez moi. Malgré mes blessures encore bien visibles, je savais que je n’avais plus d’autre choix que de rentrer à la maison. Je devais affronter le regard de ma mère, dans lequel je lirai sûrement une inquiétude infinie.

— Est-elle partie ? demandai-je, la voix brisée.

— Qui ?

— Ta copine.

— Laurena ? La meuf qui est passée tout à l’heure ?

— Je ne sais pas comment elle s’appelle, ni ce qu’elle est pour toi.

— Rien de particulier. Juste une meuf comme ça.

Une meuf comme ça ?

Il me faisait rire avec ses beaux discours sur la loyauté entre potes et la naïveté des jeunes filles qui se donnaient aux mecs trop facilement. Lui n’était qu’un queutard fini sautant d’une femme à l’autre sans prendre le temps de respirer. Il n’avait aucune morale mais se permettait d’en avoir pour les autres. Tu parles d’un homme de valeur ! Qu’il la baise sa nana, pensai-je, furieuse. Au moins, je m’étais épargnée une grosse déception avec lui. Je méritais mieux que cet animal en rut mal dégrossi.

Même si mon discours sonnait encore faux, je savais qu’il allait me falloir persister dans cette voie pour annihiler mes ambitions avec lui. Je devais m’auto-convaincre de la réalité, cette réalité fumeuse que je découvrais à ses côtés. Il me fallait ouvrir les yeux sur ce grossier personnage et fermer mon cœur aux sentiments que j’avais nourris à son encontre.

Je devais l’oublier.

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