Chapitre 55 : Différente
Tel était son projet. Un lever de soleil sur la mer, allongés dans une grotte. Il avait tout prévu. Et quand je dis tout, ce n’était pas exagéré. Après avoir étalé une bâche sur le sable encore mouillé, il la recouvrit de trois plaids. Il avait aussi apporté deux gros coussins qu’il m’avait demandé de transporter tant il était chargé par les couvertures et son énorme sac de sport. Puis, il sortit de ce dernier plusieurs bougies parfumées, présentées dans des réceptacles en fer. Avec un briquet, il alluma une à une les mèches, et parsema notre petit espace intime de ces loupiottes colorées.
Je le regardais faire, subjuguée par son initiative. C’était féérique et digne des plus jolis dessins animés de mon enfance. Il mettait vraiment les petits plats dans les grands. Je ne l’avais jamais imaginé aussi créatif et romantique. Il m’épatait.
Adam ne se décontenança pas devant mon air médusé. Il agissait comme si son idée n’était pas si originale que ça. Pour lui, nous improviser une couche nuptiale, de nuit, et en pleine nature, semblait une chose tout à fait normale à me proposer en cet instant précis. Aucune hésitation ne transparaissait dans son attitude assurée, juste la sereine confiance de celui qui a pris une décision et qui s’y tient quoi qu’il arrive.
J’étais déroutée.
Une fois ses préparatifs terminés, il m’invita à m’asseoir pour profiter de la vue. Devant moi, à la sortie de la grotte, le disque sélène se reflétait sur la mer calme, seulement chahutée par de très faibles courants. Il n’y avait presque pas de vent à l’extérieur et à l’intérieur, nous étions bien à l’abri. Il faisait d’ailleurs beaucoup plus chaud ici, malgré l’humidité de la mer, qui descendait peu à peu.
Je ne comprenais pas ses intentions. Qu’attendait-il de moi maintenant ?
Je m’assis, le dos un peu raide, n’osant guère me laisser aller. Pourtant, l’espace aménagé en boudoir était douillet, et la vue sur la lune éclairant la mer était magnifique... mais...
— Anna ?
— Oui ?
— Café chaud ?
Il avait vraiment tout prévu. Boissons et gâteaux sortirent de son sac de sport comme de la sacoche de Mary Poppins.
J’acceptai l’offre et il me tendit une tasse brûlante, qui me réchauffa instantanément les mains. Plus les minutes passaient, plus j’étais... sciée.
— Adam ?
— Ouep.
— Pourquoi ?
— Pourquoi quoi ?
— Pourquoi tout ça ? dis-je en englobant d’un geste du bras ce qui nous entourait.
Il s’assit à mes côtés avec son mug en plastique fumant.
— Je ne comprends pas, insistai-je.
— Tu as besoin de rêver Anna, soupira-t-il. Tu as vécu des choses trop difficiles pour une personne de ton âge, et tu as besoin de t’évader. Tes parents s’inquiètent pour toi. Ils en ont parlé aux miens et tu sais comment ça se passe entre les mères, un vrai téléphone arabe. Tu es une excellente élève et ils sont très fiers de toi. Malheureusement, ils sont aussi super inquiets de te voir travailler autant. Trop, selon leurs dires. Tu es toujours le nez plongé dans tes bouquins et même si cela te permet d’avoir de bonnes notes, ils ont l’impression que tu passes à côté de ton adolescence. Les autres n’agissent pas comme ça et tu le sais très bien.
— Comment agissent-ils alors ?
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