Chapitre 56 : La playlist

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Ma question était sincère. Je n’avais pas remarqué que j’étais différente des autres. Je savais que j’avais tendance à m’isoler dans mon monde mais pas au point de perturber ma famille. Je ne connaissais pas d’autres façons de faire et, d’une certaine façon, je n’en voulais pas d’autres non plus.

— Comment agissent les jeunes normaux dont tu penses que je ne fais pas partie ? insistai-je.

— Ils font des conneries, ils testent les limites. Toi, tu es sage.

— C’est mal ?

— En soi, non, évidemment. Je pense même que beaucoup de parents voudraient une fille comme toi, qui passe plus de temps à assurer son avenir qu’à s’éclater avec ses copines. Mais...

— Mais je ne suis pas normale.

— Bien sûr que tu l’es. Être différente ne fait de toi une espèce à part ou quelqu’un de moindre qualité. Bien au contraire. C’est juste que la vie n’est pas censée être aussi sérieuse. Tu sais ce que l’on dit : « Ne prenez pas la vie trop au sérieux, de toute façon, vous n’en sortirez pas vivant ». Tu as juste besoin de te lâcher, de profiter.

— Et je fais ça comment ?

— En regardant le lever du soleil dans une grotte avec moi.

Il me fit un clin d’œil et alla rincer ses mains pleines de sable dans l’eau. Puis revint vers notre spot douillet en les tapotant sur son pull. Il retira ses baskets et s’allongea sur les plaids, adossé aux coussins, puis ouvrit un de ses bras sur le côté, pour m’inciter à le rejoindre. J’étais perplexe. Après avoir refusé de partager son lit lors de mon sauvetage quelques mois auparavant, il voulait me prendre... dans ses bras ?

Pour une surprise d’anniversaire, il ne pouvait pas mieux tomber. J’étais sûre que ma mâchoire allait finir par se décrocher de stupeur. J’hésitai un instant puis me débarrassai de mes chaussures. Je m’allongeai à ses côtés, posai la tête dans le creux de son épaule et attendit la suite, crispée. Il m’enveloppa de son bras et commença à me parler des étoiles que l’on voyait briller dans le ciel assombrit. Comme ce dernier était dégagé, la voie lactée était visible et resplendissait sous nos yeux scrutateurs.

Puis, de sa main libre, il sortit de sa poche des écouteurs Bluetooth. Il m’en donna un. Hésitante, je le regardai mettre le sien et attendis, la tête toujours posée sur lui, le visage tourné vers le sien. Voyant que je ne bougeais plus, il prit les devants et inséra l’écouteur qu’il me dédiait à l’entrée du conduit. Il glissa une mèche de cheveux gênante derrière mon oreille. Faisant cela, il me regardait avec une telle intensité que je crus qu’il allait m’embrasser. Il était en partie sur moi. J’étais allongée, immobile. Son regard noir soutenait le mien.

Ses doigts caressaient à présent le pavillon de mon oreille, refusant de le quitter. Il joua un instant avec l’anneau qui y pendait, sans rien dire. Mon cœur s’emballa dans ma poitrine, menaçant à tout moment de se rompre. Son visage été si proche du mien, plus proche qu’il ne l’avait jamais été. J’aurais juré qu’il se posât la question. Son regard était troublé. Il avait l’air moins sûr de lui qu’à l’ordinaire.

Puis, après avoir vérifié que l’écouteur était bien en place, il se rallongea à côté de moi. Heureusement que nous étions allongés car j’avais les jambes en coton. Sous mes yeux curieux, il chercha dans son téléphone une playlist dans celles qu’il avait pré-enregistrées. Je tombai des nues quand s’afficha celle qu’il avait rebaptisée « Anna ».

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