En sortant, il prenait la rue principale. Les vitrines éclairées, le monde qui se pressait mettaient une animation rassurante. Il avançait de son petit train, attentif à cette vie.

Arrivé à la mairie, il bifurquait, quittant cette effervescence. La large avenue déployait ses courbes, les lampadaires inondant les trottoirs au travers des branches dénudées.

L'artère s'arrêtait sur une rue déserte, aux accotements étroits. Les rares voitures roulaient vite, le serrant contre le mur après l'avoir ébloui.

Il arrivait à l'endroit redouté. Sur la droite, sa rue s’enfilait. Une lumière à ce coin, l'autre une centaine de mètres plus loin, juste devant sa maison. Entre, cet immense trou noir, bordé de maisons fermées et de terrains vagues. Personne, l'obscurité totale peuplée de monstres prêts à le dévorer. Chaque brin d'herbe murmurait sa menace.

Il n'avait pas le choix. Le froid, l’heure l'obligeaient à mettre sa vie en jeu. Il plongeait dans la gueule de l'angoisse, abandonnant tout espoir. Chaque pas résonnait, amplifiant sa mort. Le premier pas dans la faible clarté le ressuscitait. Surtout ne pas se retourner !

Demain, il rentrerait de l'école, tout seul, petit bonhomme de neuf ans, courageux par obligation.