Il fallut vingt-trois siècles pour que l’humanité quitte enfin le système solaire. Le premier voyage inter-système reposa sur les technologies conventionnelles auxquelles nous étions habituées : un grand phallus métallique empli de combustible, et une poignée de malheureux astronautes allongés dessus, le croupion serré. Les colonies primordiales s’installèrent laborieusement dans les systèmes voisins, à coup de voyages interminables et ponctués d’échecs retentissants comme l’explosion du Polloch IV (dont les propergols en fusion allumèrent malgré tout un inoubliable spectacle coloré dans l’obscurité spatiale).

Les rivalités entre pays de la Terre dépassées, un gouvernement supra-planétaire fut instauré : la Coalition Galactique Démocratique. Les yeux rivés vers l’infini, l’humanité apprécia une forme d’équilibre pendant quelques décennies. Une période de paix relative prit place, à laquelle il est fait référence aujourd’hui comme l’« Âge d’Or ». Tout allait pour le mieux dans le meilleur des espaces, jusqu’à ce qu’un scientifique du système Scribos découvre un élément aux propriétés insoupçonnées : l’universiol. Son potentiel était virtuellement illimité. L’inventeur avait imaginé simultanément la matière première universelle, et l'imprimante qui permettait de transformer le substrat miraculeux en n’importe quel objet ou composé. Mais le scientifique vivait pour la beauté du geste, et tout aurait pu en rester là.

La nouvelle parvint aux oreilles de Jeffrey Bizous, un homme d’affaire au nez creux qui officiait dans le système. Ce dernier se précipita sur le brevet et s’assura pour les décennies suivantes la loyauté du génial géniteur de l’universiol à grand renfort de biftons et de promesses grandiloquentes. Ou peut être de menaces de finir dans un congélateur quelque part vers Chalon-sur-Encelade, personne ne le saura jamais. Ainsi naquit dans la ceinture d’astéroïdes de Scribos l’entreprise Megaziol. Elle s’assura une place monopolistique de fait sur la production de la prodigieuse substance.

Megaziol démarra une exploitation massive de la matière première endémique de l’universiol : le gerardium. Des centrales à fusion poussèrent comme des champignons sur les arides rochers en lévitation de la ceinture d’astéroïde locale. Malgré tout, la firme peinait à suivre les besoins en énergie nécessaire à la création du composé, tandis que les exportations d’universiol inondaient le système Scribos. Galvanisé par les capitaux et les installations de haute volée de Megaziol, le scientifique réédita son eurêka, et mit au point un moyen de transformer l’universiol en ce qui deviendrait le carburant incontournable du voyage spatial : le protohédron. Grâce à lui, Megaziol devint l’une des entreprises les plus puissantes du système, puis de la galaxie, à mesure que le protohédron facilitait l’installation de colonies de plus en plus éloignées.

La galaxie d’Andromède vit débarquer ses premiers petits hommes roses, qui prirent possession de ses multiples mondes paradisiaques. La xénobiologie entra en plein essor lorsque les pionniers découvrirent des mondes vivants, peuplés de créatures étranges (point de trace d’intelligence toutefois). Séparé de la Coalition Galactique Démocratique par des années lumières de vide, un gouvernement autonome se mit en place dans la galaxie fraîchement investie : l’Union des Colonies Primordiales d’Andromède, ou UCPA.

Si indispensable, le convoité carburant ne se produisait pourtant toujours qu’à un seul endroit : sur les astéroïdes de gerardium de Scribos.

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Des années plus tard...

Jared Lutop travaille pour Megaziol sur l’astéroïde 47-B. Il est pilote de mecha-foreuse, un véhicule bipède monoplace de minage de gerardium. Comme ses collègues, Jared touche à peine le salaire minimum : Megaziol n’est pas connue pour être tendre avec ses employés. Dans les laboratoires de raffinement, les salariés disposent de cabines d’un mètre carré pour faire des pauses et leurs besoins. Lui n’a même pas le droit de sortir de son robot-outil et pisse dans une sonde. Comme les astéroïdes sont en mouvement constant, les mineurs dorment sur place. Deux semaines sans jour de repos, puis une semaine de liberté. Avec ses collègues célibataires, ils la passent souvent dans les bars de la planète voisine : Carcalis.

Depuis bientôt cinq ans que son existence tourne en rond, Jared a envisagé toutes les options pour sortir de ce cercle infernal d’exploitation. Chez Megaziol, seuls les distilleurs ont un métier hautement qualifié, et bénéficient d’un traitement spécial. Voire même inégalitaire, puisque des primes spéciales sont attribuées aux laborantins doués qui produisent plus d’universiol que leurs homologues. Ou éventuellement lèchent mieux les bottes du directoire. Quoi qu'il en soit, le moins bon d'entre eux gagne bien plus qu’un mecha-foreur. Lutop a bien tenté plusieurs fois de contacter les ressources humaines pour manifester son intérêt à devenir distilleur. Mais sans formation d’électro-chimiste, il a essuyé refus sur refus.

Le mecha-foreur a postulé toutes sortes d’emplois sur Carcalis, sans succès. Son absence d’éducation académique lui a fermé toutes les portes. Et sans piston familial, pas de passe-droit. Son salaire misérable ne lui permettrait même pas un voyage interplanétaire pour tenter sa chance ailleurs. Les jours se suivent, et se ressemblent. Les soirées arrosées entre potes aussi. Puis petit à petit, une idée naît. L’idée que ce sont eux la richesse de leur entreprise, et que Megaziol devrait leur revenir de droit. Ils ravivent et ressassent des théories économiques du XIXème siècle qui fusionnent avec leur mécontentement, jusqu’à se transformer en un véritable projet de révolte. Certains se laissent même pousser la barbe.

Le groupe de révolutionnaires en herbe de Lutop s’est cotisé pour acheter une imprimante universelle. À eux tous, ils ont sacrifié le prix d’une maison de luxe à l’espoir d’une meilleure vie. Arrivée en pièces détachées, la matrice miraculeuse tourne maintenant à plein régime dans la cave de Jared. Certains manutentionnaires ont accepté contre pots-de-vin de dérober des palettes d’universiol. L’innocent produit y est transformé en pièces d’open-blasters, une arme libertaire dont les plans circulent sur le dark-net. Sur place dorment déjà de véritables armes de guerre à courte portée : les mecha-foreuses sont des monstres de puissance, équipées de marteaux soniques et de fraises laser. Ils ont maintenant les outils, et la volonté. Ne manque plus que l’occasion.

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La nouvelle vient de tomber : dans un mois, Jeffrey Bizous viendra lui-même en visite sur l’astéroïde 47-B. Une aubaine inespérée. Le plan d’attaque est diffusé comme une trainée de poudre dans les rangs des mecha-foreurs. Tout est en place pour le grand soulèvement.

La capsule Green-Origin de Bizous se pose sur 47-B dans un nuage de poussière. Le directeur est reçu en fanfare par les responsables d’exploitation. Le tapis rouge prend la forme d’un cocktail de petits-fours, de serrages de mains, et d'échanges de mondanités intéressées pour obtenir les bonnes grâces du big boss. Une conférence se tient ensuite dans une grande salle de réunion, où la clique dirigeante se gargarise des résultats mirifiques du dernier semestre. Aucun gestionnaire ne prête attention à l’armada de mecha-foreuses qui se poste à la queue leu leu devant le portail principal du garage. Lorsque Lutop descend de son outil, un contremaître se précipite à sa rencontre en mitraillant toutes sortes de menaces de licenciement s’il ne retourne pas immédiatement travailler. D'autres mecha-foreurs s’agglutinent peu à peu autour de Jared qui encaisse, impassible, les admonestations de son responsable. Un transpalette dépose une caisse à côté d’eux, accompagnée d'un signe de raliement. Les pilotes déballent les open-blasters qu’ils ont méticuleusement assemblés depuis des mois. Le contremaître sent le vent tourner et tente la poudre d’escampette, mais se heurte à un mur d’employés musclés et patibulaires.

Un coup de crosse sur le menton terrasse le fuyard récalcitrant, puis Lutop brandit son arme. Un cri de guerre retentit. Les mutins investissent le bâtiment, bientôt rejoints par les raffineurs exaspérés. Seul le laboratoire des distilleurs et la salle de conférence restent cloîtrés. Dépassée, la sécurité verrouille automatiquement les portes sensibles. Un blindage à toute épreuve. Ou presque : une mecha-foreuse remonte le couloir, arrachant à chaque pas un peu plus de faux-plafond. L’énorme porte d’acier cède rapidement sous les assauts de la fraise laser. Les ouvriers envahissent la salle de conférence, et mettent en joue les cols blancs de Megaziol.

Quarante-huit heures plus tard, Bizous a cédé. Contre la garantie de sa liberté, il donne le contrôle et la propriété de Megaziol à Jared Lutop et ses troupes. Un hurlement de joie parcourt les couloirs, à mesure que la nouvelle se répand. Le milliardaire est contraint de faire une annonce publique. Megaziol devient une coopérative de salariés.

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La réaction de la Coalition Galactique Démocratique ne se fait pas attendre. Quelques semaines plus tard, une flotte d’intervention des Compagnies de Régiments Spatiaux se présente dans le système Scribos, à la lisière du champ d’astéroïdes. Les roches aux trajectoires imprévisibles empêchent les croiseurs les plus imposants d’approcher. Quelques chasseurs parviennent à se faufiler. Mais Lutop n’a rien laissé au hasard. Les imprimantes universelles ont travaillé sans relâche à la constitution d’un véritable arsenal anti-aérien. L’attaque des CRS se solde par un échec cuisant. Les morts se comptent par centaines. La CGD est forcée de reconnaître le nouveau statut de Megaziol.

Galvanisé par cette première victoire, Lutop lance une consultation des employés. La principale revendication entraîne l’uniformisation des salaires. Tous les employés de Megaziol, du mecha-foreur au distilleur toucheront la même gratification : le salaire du mieux payé des distilleurs. La décision met aussi fin aux primes de rendement. La convention de la coopérative est amendée : Un employé ne saurait être privilégié ou sacqué pour sa productivité. Des investissements sont faits, des toilettes dignes de ce nom installées, les postes rénovés. Ravis de leurs nouvelles conditions de travail, ce sont maintenant les rires des employés qui résonnent dans la salle de pause sous le belvédère spatial.

Puis Lutop est convoqué par l’équipe comptable, qui lui fait part de son inquiétude. Les caisses de Megaziol se vident. L’augmentation générale des salaires et les investissements massifs ont impacté la trésorerie de manière conséquente. Si rien n'est fait, ce sera la faillite dans douze mois.

En réponse, une augmentation du prix de vente de l’universiol est actée par la coopérative. Les comptes reviennent à l’équilibre. Conséquence mécanique de cette décision, les tarifs galactiques du protohédron flambent à leur tour. Chaque travailleur interplanétaire voit ses charges augmenter. Les transports touristiques et alimentaires en prennent également un coup. Un mouvement de protestation naît dans le système Tundras : les combinaisons jaunes, qui pestent contre le coût des déplacements et de la vie. La coopérative Lutop reçoit de multiples injonctions de la CGD et de l’UCPA demandant de baisser le prix de l’universiol. Son niveau actuel handicape le pouvoir d’achat des commerçants spatiaux et des croisières galactiques, dont les déplacements dépendent du tarif des carburants spatiaux.

Peu sensible aux problématiques de tourisme spatial, en ayant été lui-même privé toute sa vie, Lutop refuse. Dans un communiqué public, il déclare que le bon prix de l'universiol est celui qui permet une rémunération juste et égale de tous les travailleurs de Megaziol, et exclut que les conditions de travail soient dictées par une industrie de loisir. En désespoir de cause, l’UCPA annonce une prime de cent crédits pour les personnes justifiant de moindres revenus, et le mécontentement généralisé s’installe.

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Identifiant une opportunité dans ce climat d’agitation, un jeune milliardaire, Nolan Kusk, offre un chèque d’une somme indécente au père oublié de l’universiol contre la formule de l'élément prodigieux. La manoeuvre, bien qu'illégale, n'engendre pas de poursuites : la CGD y voit un moyen pratique de mettre fin au monopole de Megaziol. L'audacieux concurrent s’installe dans la ceinture voisine et se met à produire à son tour de l’universiol. Mais les compétences manquent. La jeune pousse Spéciol promet d’importantes primes aux travailleurs qualifiés qui la rejoindraient. L’alternative séduit les distilleurs les plus doués de Megaziol, déçus par la politique égalitariste de leur employeur. De plus en plus de transfuges désertent. Spéciol remplit le reste de ses lignes de production des laissés pour compte de Carcalis. Peu à peu les commandes affluent chez Spéciol. L’impact sur les résultats du producteur historique est immédiat. La stabilité du modèle de Megaziol est sérieusement menacée.

La coopérative dispose toutefois d'atouts importants. Des agents doubles grassement rémunérés sont dépéchés sur les lignes de production de Spéciol. Grâce à eux, Lutop comprend que Spéciol présente les mêmes faiblesses que ce que fut Megaziol sous Bizous. Les restes de trésorerie sont mis à contribution pour alimenter une révolte dans la ceinture voisine. Une radio pirate vante les conditions de travail de la coopérative, les agents doubles sèment les graines de la discorde dans les esprits de leurs collègues exploités. Des portes ouvertes sont même organisées chez Megaziol.

Avec le soutien des armes de la coopérative, Spéciol tombe rapidement aux mains de ses salariés. Kusk est chassé. Les installations de production d’universiol sont unifiées sous la bannière de Lutop, que ses membres baptisent Union Lutopiste du Système Scribos.

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Mais l’ambition de Jared Lutop ne s’arrête pas là. Une annonce de rupture généralisée d'approvisionnement d'universiol est broadcastée sur les réseaux galactiques. L’embargo sur le produit sera total tant que la Nation des Travailleurs Lutopistes ne sera pas reconnue. La menace de sécession résonne dans la galaxie. Les pompes à protohédron se tarissent. Les combinaisons jaunes agitent les grands centres planétaires. Les vaisseaux de la CGD et de l’UCPA se massent à nouveau autour des ceintures d’astéroïdes. Mais l’assaut ne vient pas. L’échec de la première intervention et ses pertes innombrables sont encore dans tous les esprits.

Provoquant un quasi-siège, les planètes avoisinantes du système Scribos tentent d'isoler les Lutopistes de l'extranet. Elles espèrent affaiblir les sécessionnistes en les privant des modèles pour alimententer les imprimantes à universiol. Mais les révolutionnaires se sont bien préparés et les plans militaires ont été téléchargés depuis belle lurette. Une armada de chasseurs spatiaux fraîchement imprimés patrouille sans relâche entre les rochers vagabonds, protégeant les installations des incursions de l'armée.

Des ravitaillements illégaux parviennent malgré tout à franchir l’embargo, acheminés par des planétaires excédés, en échange de palettes d’universiol. Avec la raréfaction des réserves de protohédron, l’univers tout entier est prêt à s’arrêter.

L’impensable survient alors. L’ambassadeur de la CGD se présente lui-même, avec pour mission la reconnaissance de la Nation des Travailleurs, sous condition de reprise d’approvisionnement des galaxies en universiol. Lutop est acclamé en héros lorsque le traité est signé. Les travailleurs de l’universiol peuvent enfin imposer leurs conditions : le prix de l’universiol sera dorénavant planifié par la nouvelle nation. L’ULSS devient la Coalition Concertée des Coopératives Productrices d’Universiol, ou CCCPU.

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L’armée lutopiste s’étoffe pour protéger ce qu’elle a durement acquis. Exploitant leurs réserves importantes de gerardium, les Lutopistes auto-répliquent de nouvelles imprimantes, ce qui accroît exponentiellement leur capacité à produire des armes et des chasseurs. La nouvelle du traité gagne vite tous les systèmes voisins, dont les ouvriers sous-payés se pressent pour travailler pour la NTL. Quelques années plus tard, Lutop fonde un parti politique et se fait élire président de Carcalis. Après un référendum qui fait beaucoup de bruit, la planète vote son rattachement à la jeune Nation des Travailleurs Lutopistes avec près de 90% de « oui ».

Pour marquer son détachement des républiques galactiques, une nouvelle cryptomonnaie est créée : le lu. L’industrie est planétarisée, tous les travailleurs se voient octroyer la Juste Gratification de la NTL. Des monuments à la gloire de Lutop sont spontanément érigés dans les grandes villes. Les lésés de la sécession, ceux dont le salaire a été amputé, quittent le système. 

Evidemment, le cartel de la CCCPU inquiète la CGD et l’UCPA. Des bourses mirobolantes sont attribuées aux jeunes génies de tous les horizons pour trouver une alternative à l’universiol et endiguer la dépendance grandissante du voyage galactique à la NTL. Un jeune thésard du système Zotropis découvre une nouvelle manière de fabriquer de l’universiol, à partir de michelium, une ressource bien moins rare mais malheureusement aussi endémique au secteur galactique du système Scribos. Le brevet devient le secret le mieux gardé de l’univers, tandis que les sites de production d’universiol 2 bourgeonnent dans les systèmes voisins. Les conditions mêmes de production de l’universiol 2 sont moins dures, et beaucoup de distilleurs ambitieux fuient l’équité de la NTL pour cette nouvelle manne.

Dans un recoin de la Voie Lactée appelé Tundras, un universitaire boursier crée le consumiol, un nouvel élément compatible avec les imprimantes à universiol. Ce dernier ne permet pas la production de protohédron, mais il est raffiné à partir de palladium, un minerai présent partout dans les galaxies. Cerise sur le gâteau, le consumiol promet l’impression de nouvelles technologies encore insoupçonnées.

Les dirigeants de la NTL se retrouvent sous le feu des projecteurs. Depuis la naissance de la jeune nation, les scientifiques et chercheurs du système Scribos ont été massivement rétrogradés, pour s’aligner sur la Juste Gratification de la NTL. Les plus doués ont déjà fui. Résultat : les recherches locales stagnent. Les produits de la CCCPU deviennent moins attractifs, et les commandes baissent. Des arrêts de production surviennent. Les stocks d’universiol 1 s’accumulent et les caisses se vident. Pour soutenir son industrie, le gouvernement lutopiste achète l'universiol en quantités astronomiques et produit toujours plus de vaisseaux de guerre. La valeur du lu chute face au crédit galactique.

Le Grand Conseil Lutopiste parvient à la conclusion que la seule façon d’empêcher l’hémorragie est que les conditions de production d’universiol soient les mêmes partout dans le secteur. Lutop lance le Projet d’Unification Libératoire Lutopiste (PULL), et rassemble l’imposante armée qu’il a constituée autour des mines de michelium. Effrayées par la puissance de feu du PULL, la CGD et l’UCPA n’opposent aucune résistance. Lutop conquiert petit à petit de nombreux systèmes environnants, et centralise la production d’universiol 2. Le processus est universalisé, les salaires alignés sur la Juste Gratification. La NTL met en place un embargo sur les exportations de michelium, avec un contrôle strict des sorties du secteur. Tout paraît être en place pour une stabilité durable.

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Mais la nature est facétieuse. Inexplicablement, la production d’universiol décline. Au cours des années qui suivent, le marché du protohédron se tend. Lutop peine même à alimenter toute sa flotte militaire. Une évaluation de l’approvisionnement est faite : chaque maillon de la chaîne semble connaître le même destin. Le prix du carburant spatial connaît une inflation jamais atteinte.

L’innovation va bon train de l'autre côté de l’univers, et la compagnie Peach présente l’année suivante deux produits révolutionnaires issus du consumiol : l’Iphos, un communicateur longue distance instantané, et l’Astérocar, un véhicule personnel qui permet des bonds planétaires sans protohédron. L’engouement est sans précédent, et après avoir inondé le secteur Tundras, les produits issus du consumiol commencent à arriver sur les marchés du système Scribos. Libres de leurs dépenses, les citoyens de la NTL s’équipent en masse. Les capitaux fuient peu à peu vers les entreprises des secteurs voisins. La puissance commerciale de la NTL s’affaiblit.

Le Grand Conseil Lutopiste taxe massivement les produits Peach pour en diminuer l’attrait. Une inflation spectaculaire s’en suit. La population s’agite, frustrée par l’incompatibilité entre la Juste Gratification lutopiste et les prix des produits du consumiol. En réaction, une campagne de communication est organisée pour décrédibiliser l'impact écologique des produits tundrasiens, et prôner le mode de vie des NTL. Des émeutes éclatent. Les braquages de possesseurs de produits Peach sont fréquents. Une répression violente s’en suit, couplée à la confiscation des produits fauteurs de troubles. Sur Carcalis, les statues de Lutop sont déboulonnées. La NTL est au bord de la guerre civile.

Aux frontières de la Nation Lutopiste se massent les armées unifiées de la CGD et de l’UCPA. Depuis des décennies, elles ont accumulé en secret les ressources nécessaires pour faire tomber le régime lutopiste et ouvrir le marché galactique à sa population.

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A ce moment, la moitié des vaisseaux de guerre de la NTL n'a plus de carburant. Lutop lance alors ce dont la galaxie se rappellera comme l'appel du 18 Juin 2244. Dans un communiqué broadcasté à tous les systèmes lutopistes. Le président presse les usines d'universiol à produire plus pour défendre le modèle lutopiste et la Juste Gratification.

Impuissant, Lutop constate sur son écran géant que les réserves stagnent désespérément. La population lutopiste lui adresse une fin de non recevoir inconsciente.

Tel un chant du cygne, Lutop retourne sur l’astéroïde 47-B, dans l’usine où tout a commencé. Il n'y trouve que des lignes de production vides.