La capitale était en effervescence. Après les récents événements qui avaient secoué l’île et le régime, l’annonce du mariage entre Julius, le bras droit de Magnus, et Lydia, la fille de ce dernier, prenait des airs de réconciliation nationale forcée. Sous l’apparence d’une fête fastueuse, destinée à calmer les esprits, se dissimulait une tentative désespérée de consolider l’emprise du pouvoir.

Lydia se tenait seule dans sa chambre, fixant son reflet dans le grand miroir doré. Sa robe, somptueuse et écrasante à la fois, semblait la retenir prisonnière. Elle ne pouvait pas fuir, pas aujourd’hui. Ce mariage n’était pas un choix, mais une obligation. Elle n’avait pas voulu de cette union avec Julius, cet homme sans âme qui servait aveuglément son père. Pourtant, elle se retrouvait là, à quelques minutes de prononcer des vœux qu’elle ne croyait pas.

— Tout cela n’est qu’un jeu politique, murmura-t-elle, ses yeux cernés par des nuits sans sommeil.

En contrebas, la ville se préparait également. Les rues étaient ornées de banderoles, et la population, sous la surveillance accrue des forces de sécurité, assistait à l’événement retransmis sur des écrans géants installés partout dans la capitale. Mais sous cette apparente fête nationale, le mécontentement grondait. Les récents bouleversements n’étaient pas oubliés : les dissensions entre le peuple et les forces de l’État ne faisaient que s’aggraver.

Elara et le Réseau Libre étaient aussi sur le qui-vive. Après l’échec de leur dernière tentative pour renverser le régime, ils savaient que ce mariage serait une opportunité, mais aussi un risque immense. Un plan était en cours : infiltrer la cérémonie, pirater les écrans et exposer les mensonges du régime aux yeux de tous. Ils espéraient ainsi ouvrir les yeux du peuple et créer une onde de choc.

Cependant, Julius et la Garde Silencieuse, après l'incident avec La Flamme, étaient sur leurs gardes. Ils savaient que les résistants chercheraient à frapper un grand coup. Magnus, malgré son sourire apparent, se tenait prêt à étouffer toute tentative d’insurrection.

Lydia descendit les escaliers qui la menaient à la cathédrale où se tenait la cérémonie. Chaque pas la rapprochait d’un avenir qu’elle détestait, mais auquel elle n’échapperait pas. En s’avançant vers Julius, qui l’attendait à l’autel, elle tenta de chasser la nausée qui la saisissait. Lui, vêtu d’un uniforme impeccable, la dévisageait avec un mélange de satisfaction et d’indifférence.

Les invités, un parterre d’élites du régime, observaient la scène avec une fausse révérence. En vérité, beaucoup savaient que ce mariage n’était qu’une farce. Même la famille de Lydia voyait dans cette union une stratégie politique pour cimenter le pouvoir de Magnus et éviter toute contestation.

Dans la foule, Elara et ses compagnons, déguisés en invités, attendaient leur moment pour agir. Ils savaient que les gardes étaient partout, que la moindre erreur pourrait leur coûter la vie. Mais ils n’avaient pas le choix. Le message qu’ils comptaient diffuser était prêt, et il n’y aurait pas de retour en arrière.

La cérémonie commença sous les chants d’un chœur parfaitement orchestré. Les mots d’amour échangés entre Julius et Lydia résonnaient faux, chaque syllabe marquant davantage la prison dans laquelle Lydia se sentait enfermée. Pourtant, elle se plia au jeu, prononçant ses vœux avec une froideur calculée, tandis que Julius, imperturbable, lui passait l’anneau au doigt.

C’était le signal. À l’extérieur, l’équipe technique du Réseau Libre pirata les écrans géants qui retransmettaient la cérémonie dans toute la ville. Le visage souriant de Magnus laissa soudain place à un message inattendu.

Sur les écrans, des images d’archives apparurent, montrant des actes de répression violente, des prisons secrètes, et surtout, les exilés, ces êtres que le régime avait effacés de l’histoire officielle. Une voix résonna dans la ville, dévoilant les mensonges, dénonçant les manipulations du pouvoir.

— Voici la vérité que l’État vous cache depuis des années !

La foule dans les rues se figea, le silence se fit pesant, avant que des murmures d'incompréhension puis d'indignation ne commencent à se propager. Les agents du régime, pris de court, tentèrent de reprendre le contrôle des écrans, mais l'impact était déjà là. Un voile s'était levé sur les illusions de stabilité et de sécurité que le régime tentait de maintenir.

Dans la cathédrale, le chaos éclata. Julius comprit immédiatement ce qui se passait et se tourna vers Lydia avec un regard noir. Ce mariage, censé être un symbole de stabilité, devenait un fiasco. Elara, qui observait la scène, sentit la panique monter. Il fallait fuir, et vite. Le plan avait fonctionné, mais maintenant ils étaient des cibles.

Elle fit signe à ses alliés de se disperser, mais à peine avait-elle bougé qu’un garde la repéra. Les tirs commencèrent à fuser, transformant la cathédrale en champ de bataille. Lydia, au milieu de la confusion, fut bousculée, son voile déchiré, révélant son visage blême et terrifié.

Elara parvint à se glisser hors de l’édifice, mais l’opération avait échoué. Certes, le message était passé, mais la résistance payait le prix de sa témérité. Alors que la Garde Silencieuse reprenait le contrôle de la situation, les membres du Réseau Libre se dispersaient dans les ruelles sombres de la ville, traqués comme des bêtes.

Magnus, impassible, reprit la parole devant la foule.

— Ceux qui pensent semer le chaos dans notre nation subiront le poids de la justice, déclara-t-il d’une voix grave. Nous ne tolérerons pas l’insubordination. Ceux qui ont orchestré cette attaque seront traqués et punis.

Mais au fond de lui, il savait que les choses ne seraient plus jamais les mêmes. L’image du régime avait été ébranlée, et malgré son discours, la peur grandissait. Les masques tombaient, et avec eux, la certitude de la victoire.