Chapitre 79

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Alexis

- Alors, la petite demoiselle du volcan ! Comment ça va aujourd'hui ?

- Bien ! Bonjour, Julien !

Nous venons de récupérer Aglaé et Pauline au gîte et sommes montés tous les quatre au village pour les courses. Julien s'est installé comme tous les samedis matins sur la place d'Antraigues et nous en profitons pour faire quelques achats et prévoir notamment pour demain soir, puisque Layla a invité Emilie et Hugo, Véronique et Sébastien, un autre couple d'amis qui vit à Juvinas, et Julien.

Aglaé et Pauline ont eu l'occasion de faire la connaissance de ce dernier dans la semaine, quand j'ai indiqué à Pauline qu'il y avait désormais un boucher itinérant sur le secteur et qu'il venait deux fois par semaine à Antraigues. Comme il n'y avait pas grand-monde quand elles sont passées faire leurs achats, Aglaé en a profité pour discuter avec lui, lui parlant du volcan, des vacances, de la rivière... et de moi. Il a donc tout de suite fait le rapprochement. Et l'a gentiment surnommée "La demoiselle du volcan", un nom qui, ma foi, lui va très bien.

- As-tu terminé le saucisson de mercredi ?

- Oui ! Il va nous en falloir d'autre... Et maintenant que Layla est avec nous, je crois même qu'il faut en prendre deux !

- Aglaé... soupire Pauline. Tu exagères un peu là.

Layla de son côté éclate de rire.

- Tu as raison, Aglaé ! Je suis une gourmande ! Mais je crois que sur le saucisson, tu me bats à plate couture ! Va pour deux, Julien. Et on prend de la viande aussi, ajoute-t-elle. Es-tu libre demain soir pour un barbecue à la maison ?

- Demain ? Oui, pas de soucis. Et ça m'arrange même mieux que ce soir, car je suis à Saint-Joseph cet après-midi et après, je dois nettoyer le camion pour la semaine à venir. Je le fais le dimanche en général. Donc oui, ça me va. J'ai du filet mignon mariné en réserve, si tu veux. En barbecue, ça peut être bon.

- D'accord, va pour ça. Et puis un échantillon de grillades, godiveaux et brochettes.

- Et pour aujourd'hui ? demandé-je. Qu'est-ce qui vous tente ?

- Les godiveaux, c'est trop bon ! fait Aglaé.

- Tu en as mangé déjà trois fois cette semaine, ma puce ! dit Pauline. Si on en prévoit pour demain, on peut changer un peu, non ?

- De toute façon, pour ce midi, c'est jambon et pâté pour le pique-nique, dis-je. Mais pour demain midi ?

- Des caillettes, suggère Layla. Je n'en ai pas mangé depuis une éternité.

Aglaé fronce un peu du nez. Elle aime bien les caillettes, mais face aux godiveaux...

- On va donc prendre trois caillettes en plus, Julien, et un godiveau pour la demoiselle du volcan.

Aglaé affiche un grand sourire, Pauline lève les yeux au ciel avant que son regard ne croise celui de Julien, amusé.

- Allez, on fait comme ça, dit-il en commençant à préparer les morceaux de viande.

Nous lui disons ensuite à demain, puis nous passons à la boulangerie avant de redescendre au gîte. Là, nous préparons le panier et les affaires de plage et nous nous rendons au coin baignade. A cette heure, il n'y a encore personne, mais les premières familles ne vont pas tarder pour profiter des tables de pique-nique. Au cours de la semaine, Aglaé a eu l'occasion de se faire quelques copines, et a même revu une ou deux petites de son âge qu'elle avait déjà côtoyées l'an passé.

C'est un bon moment de détente et nous en profitons tous bien, alternant baignade, observation de la nature avec Aglaé, lecture, farniente. Je suis loin d'être venu à bout de la bibliothèque de Monsieur Duras et Layla y a trouvé un livre à lui plaire. J'ai aussi apporté un jeu de tarot et nous apprenons à Aglaé à y jouer. Elle est très assidue et cela lui plaît beaucoup. J'ai souvenir que quand elle était plus petite, elle aimait beaucoup les jeux de société et je la revois encore jouer avec mon père à des jeux de son âge, comme les petits chevaux ou les dames. Ce sont de jolis souvenirs.

Layla

Aglaé est une sacrée gamine. Plus j'apprends à la connaître et plus je me dis qu'elle s'entendrait bien avec mes neveux, que ce soit Jacob qui est le plus proche en âge ou Maxime et sa grande curiosité qui rappelle bien celle d'Aglaé.

Je suis contente de les revoir, de passer ces premiers jours de vacances en leur compagnie, même si nous ne serons pas tout le temps ensemble. Le dimanche après-midi, pour changer un peu, nous sommes allés à Bise. Là aussi, un petit coin baignade est aménagé, mais il est plus petit que celui d'Antraigues et offre surtout une belle "pataugeoire" pour les enfants. Nous y retrouvons Emilie et Hugo. Nous ne nous attardons cependant pas trop, pour préparer les grillades et les salades du soir. Emilie apporte le dessert, Véronique, l'autre amie que j'ai invitée, amène un cake pour l'apéritif et un saucisson, puisqu'elle aussi a entendu parler de la gourmandise d'Aglaé...

Ce matin, nous avons laissé Alexis faire le rangement au cabinet médical, pendant que nous descendions faire le marché de Vals. L'été, il est très animé, il y a des commerçants venus d'un peu partout, y compris d'Auvergne pour vendre des fromages, ou de la vallée du Rhône pour vendre des fruits et des légumes. Nous y avons trouvé largement de quoi refaire nos provisions.

A peine sommes-nous arrivés aux Auches qu'Aglaé commence à dresser la table sur la terrasse. Alexis prépare le barbecue, pendant que Pauline et moi entamons l'épluchage de légumes pour une salade bien colorée. Nous sortons aussi la viande pour qu'elle ne soit pas trop froide et vérifions la marinade. Tout est rapidement prêt pour accueillir nos invités. Véronique et Sébastien sont les premiers. Ils ont avec eux leurs deux petites filles, Sidonie et Clémentine. Très vite, les trois petites commencent à jouer ensemble, en cavalant tout autour de la maison. Nous gardons un œil sur elles, surtout sur Clémentine qui n'a que quatre ans.

Puis Julien arrive, suivi de peu par Hugo et Emilie. Nous nous installons en terrasse, prenons l'apéritif et commençons à discuter tous ensemble, alors que les filles continuent à s'amuser dans le jardin et les murettes, passant de temps à autre pour chiper une rondelle de saucisson, un radis ou un petit morceau de cake.

Puis nous lançons la cuisson des grillades, Julien s'en occupant très bien. Après tout, il sait cuire la viande à la perfection, c'est aussi son métier.

Les petites semblent inépuisables, pourtant, avec le dessert, nous parvenons à les calmer. Elles mangent deux myrtilles chacune, puis Sidonie sort un livre de son sac et elles s'installent toutes les trois sur le banc, la plus grande faisant la lecture aux deux petites. Elles sont attendrissantes. Clémentine, le pouce dans la bouche et le doudou bien accroché à ses bras, abandonne cependant vite le banc pour se lover sur les genoux de son père et s'y endormir. Il la garde un moment ainsi, avant que nous ne la couchions sur le canapé. Je la couvre avec une petite couverture brodée par Tantine.

Le livre étant terminé, Sidonie prend la place de sa sœur ; quant à Aglaé, elle revient à table avec nous, grignotte encore quelques myrtilles, puis demande :

- Est-ce qu'on ira voir les étoiles filantes ?

C'est vrai que c'est la période.

- Il faut aller sur le plateau, suggère Julien. C'est là que c'est le mieux pour les observer. De l'espace et peu de pollution lumineuse.

- On ira, maman ?

- Et bien... fait Pauline, hésitante et se tournant vers Alexis.

- On peut, Aglaé. Un soir dans la semaine. Pas mardi si on va dans la vallée de l'Ibie, parce que cela fera de la route, mais pourquoi pas mercredi ? On pourrait passer la journée à Antraigues, au coin baignade, et y monter le soir. Qu'en dis-tu ?

Alexis s'est tourné vers moi et j'opine :

- Très bonne idée. Il faut beau, mercredi ? Il ne faudrait pas avoir de nuages...

Alexis consulte rapidement la météo sur son téléphone et confirme :

- Oui, beau temps annoncé toute la semaine.

- Chouette ! fait Aglaé avant d'ajouter : tu viendrais avec nous, Julien ?

Et c'est le moment où je me dis qu'Aglaé est vraiment, vraiment une sacrée gamine.

**

Oui, Aglaé est une sacrée gamine. Parce que si sa mère ne sait pas encore où elle en est, qu'elle hésite sur un nouveau chemin à prendre, il y en a un qui s'y est déjà engagé. La demande d'Aglaé est passée inaperçue ou presque pour tout le monde, sauf peut-être Pauline et moi. Et Julien, bien entendu. Il lui répond avec un grand sourire, accepte. Et je ne suis pas étonnée qu'il propose, à la fin de la soirée, à Pauline de les ramener à Antraigues. Sous prétexte d'éviter un trajet à Alexis qui bâille à qui mieux mieux.

Heureusement qu'on a prévu de faire la petite randonnée de Saint-Andéol-de-Vals demain, avec glaces sur le retour à Vals et baignade pour finir la journée à Antraigues ou le long de la Besorgues. Il y a là aussi quelques endroits agréables, même s'ils ne sont pas aménagés. Il faut les connaître et ne pas hésiter à s'aventurer un peu dans les rochers.

Le mardi, comme promis, nous descendons dans la vallée de l'Ibie. Il fait chaud, bien plus que sur la montagne. J'ai toujours été frappée par le contraste, à cette période de l'année, entre Vallon-Pont-d'Arc qui déborde de touristes et la vallée de l'Ibie. Bien sûr, elle est moins creusée, bien sûr, il n'y pas l'arche, la cathédrale ou le cirque. Mais c'est une jolie vallée, et c'est tant mieux si elle reste méconnue. Nous qui apprécions la nature y trouvons notre compte. Laissons l'autoroute à ceux qui ne conçoivent pas les vacances sans la foule.

Je passe un bon moment à arpenter la rivière avec Aglaé, pour l'aider à trouver des fossiles. Ce sont des petits, rien à voir avec celui que je lui ai offert. Mais elle est ravie.

Le mercredi soir, nous passons récupérer Julien après le repas, puis nous montons jusqu'à Mézilhac. J'ai déjà dans l'idée l'endroit où nous pourrons nous installer, avant d'arriver à Lachamp-Raphaël. Et si jamais l'endroit ne convient pas, nous irons jusqu'au Mont Gerbier. Nous avons prévu de vieilles couvertures, pour pouvoir nous asseoir ou nous allonger dans l'herbe et regarder le ciel. En arrivant au col, il fait déjà bien nuit. Nous trouvons vite l'endroit adéquat, un peu en retrait de la route. A cette heure, de toute façon, la circulation est rare et nous ne devrions pas être trop gênés par les phares des voitures.

Le ciel d'été est magnifique. On voit très bien la Voie lactée et Alexis commence à désigner les constellations à Aglaé. Cela me rappelle quelques souvenirs, Tantine m'en avait montré quelques-unes. Mais c'est surtout avec le père de Jérémie que j'ai appris à en reconnaître la majorité. Il arrivait, quand j'étais petite que nous nous retrouvions avec lui et quelques autres gamins, au col d'Aizac, et il nous les montrait alors.

J'ai pris la main gauche d'Alexis, alors que de la droite, il montre le ciel. Aglaé est allongée entre lui et sa mère, Julien a pris place tout au bout, à la droite de Pauline. Je me doutais bien qu'il s'installerait près d'elle.

Aglaé est la première à voir une étoile filante, puis le ballet commence. Toutes les deux à trois minutes, nous en voyons. C'est féérique. Simple. Beau. Un cadeau de la nature et du ciel. Alexis a maintenant passé son bras par-dessus mon épaule et me tient plus contre lui. Nous avons bien fait de prévoir les couvertures et de nous vêtir assez chaudement. Car si dans la journée, les températures sont tout à fait agréables sur le plateau, elles chutent bien durant la nuit. Blousons et pantalons, et même des chaussettes dans nos baskets, sont bien nécessaires.

Nous restons jusque vers minuit, à observer le ciel, puis nous retournons à la voiture. Aglaé a les yeux qui brillent autant que la voûte étoilée. Je me sens heureuse de lui avoir offert ce petit cadeau, de lui avoir permis d'apprécier un moment qui la fera sans doute rêver longtemps, qui lui fera un beau souvenir.

A peine avons-nous passé Mézilhac et alors que je m'engage sur la route en lacets qui va nous ramener à Antraigues, qu'Aglaé s'endort, la tête appuyée contre le bras de Julien. Il le dégage doucement et le passe par-dessus son épaule. Elle l'a adopté. Et je crois bien que lui aussi. Reste à faire la conquête de Pauline, maintenant...

Nous déposons Julien en premier, en bas d'Antraigues, puis Pauline et Aglaé au gîte. Elle dort toujours, Alexis essaye de la sortir de la voiture sans la réveiller, mais c'est impossible. Elle est grande maintenant, trop pour qu'il parvienne à la porter et à la déposer dans son lit. Titubante, elle monte jusqu'à l'étage et se couche presque toute habillée. Nous ne nous attardons pas et remontons bien vite aux Auches.

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