7. Une brûlure profonde

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Ken ouvrit les yeux au son d’un fort ronronnement. La première chose qu’il vit, était le gros plan du museau et des moustaches de son chat qui lui chatouillaient le visage. Se réveillant tranquillement d’un profond sommeil, il se redressa en sursaut et réalisa qu’il s’était endormi sur le sol. Il se leva en s’appuyant sur le bord de son lit et tourna la tête vers son réveil matin. Paniqué, il remarqua qu’il était déjà en retard pour se rendre à l’école. Son premier cours commençait dans à peine 15 minutes. Il enfila son uniforme à la hâte sous le regard passif de Miko, toujours assis sur le sol à côté de la pile de couvertures. Aussitôt que Ken quitta sa chambre, le félin sauta sur son lit. Il fut attiré par une plume blanche déposée sur la table de chevet, au-dessus du dessin. Il laissa échapper un léger miaulement affectif, puis la plume se désintégra sous ses yeux.

Ken descendit en trombe les escaliers et croisa sa tante en bas des marches en train de mettre ses souliers, se préparant elle aussi à partir à la maison de naissance, où elle travaillait en tant que sage-femme.

– Oh ! Ken tu es enfin debout, j’ai entendu un bruit dans la nuit comme-ci quelque chose était tombé ? lui demanda-t-elle.

– C’était moi. Je suis juste tombé en bas de mon lit.

– Sérieusement ! es-tu correcte ?

– Oui ça va, mais pas le temps de t’expliquer, je suis déjà en retard ! lui répondit-il pressé en franchissant la porte à toute vitesse. Elena garda un air incrédule, remarquant bien un énorme changement dans l’attitude du jeune homme. Heureusement, elle perçut son nouveau comportement comme positif. Elle se sentit enfin soulagée de réaliser qu’il ne montrait plus une humeur méprisante et dépressive.

Ken fit irruption dans la classe et se dirigea rapidement à sa place sous le regard de tous. Le cours, à peine commencé, l’enseignant lui dit ayant remarqué son retard inhabituel :

– Merci de nous rejoindre Ken, tu peux sortir ton manuel à la page 50.

– Oui, désolé Monsieur, répondit sincèrement Ken en sortant rapidement son livre de mathématique.

Durant le cours, pendant que le professeur tournait le dos à la classe, Zoé passa un mot écrit sur une feuille pliée en quatre à un élève devant elle. Brendan reçu un coup de pied sur la patte de sa chaise. Il se tourna vers l’arrière et un étudiant lui tint discrètement le papier. Brendan le prit intrigué et le déplia entre ses jambes. Il était inscrit qu'elle avait réussi à obtenir des réponses venant de Blair. C’est plus grave qu’elle l’imaginait et qu’ils devaient investiguer davantage de leurs côtés. Troublé et incertain, Brendan releva les yeux et se tourna lentement vers Zoé . Celle-ci lui échangea un regard préoccupé.

Aussitôt que la cloche retentit, Brendan se dirigea vers Ken.

– Hey Ken ! Ça va ce matin ? Ce n’est pas dans tes habitudes d’arriver en retard, lui demanda-t-il.

– Oui ça va, j’ai juste passé une longue nuit et je n’ai jamais entendu mon alarme. Mais ne t’inquiète pas, ça ne devrait pas se reproduire.

– Pas de soucis, tant qu’il n’y a rien de grave et d’étrange qui s’est produit, je ne m’inquiète pas.

Ken rehaussa un sourcil perplexe par cette réponse.

– Effectivement non. Rien de grave ou d’étrange…

– D’accord alors tant mieux ! répliqua rapidement Brendan, réalisant qu’il devenait indiscret dans ses questions.

À cet instant même, Brendan réalisa que Zoé les observait assise à son bureau d’un air soucieux. Ken rangea son livre dans son sac et dit à Brendan qu’il le verrait plus tard dans le prochain cours, car il avait besoin d’aller prendre un peu d’air. Brendan se précipita au bureau de Zoé et d’une voix basse, il l'interpella affolé.

– Mais qu’est-ce qui se passe ? Tu veux bien m’éclairer sur ce que tu sais, car j’ai failli tout gâcher !

– Du calme, je ne sais pas tout. Je pouvais ressentir dans sa voix au téléphone que Blair se résignait à vraiment tout me détailler, à moins qu’elle n’en savait pas plus pour de vrai…

– Alors dis moi ?

– Pas ici, il y a trop d’oreilles qui peuvent entendre.

En sortant de la classe, Zoé attira Brendan dans un coin en le prenant par la main. Brendan jeta un coup d’œil à sa main, appréciant le geste insouciant de cette dernière. Elle ne se rendit pas compte qu’elle lui tenait encore la main étant trop préoccupée par ce qu’elle s’apprêtait à lui raconter. C’est avec une voix pleine de suspense qu’elle lui dit :

– Ken a vécu un gros traumatisme. Il a perdu son jeune frère dans une grave tragédie.

– Oh mon dieu... Mais c’est triste… Cela fait du sens maintenant.

– Mais ce n’est pas tout, il éprouve une grande difficulté à faire son deuil.

– C’est un peu normal, je me sentirais pareil si j’avais perdu moi aussi un proche.

– Brendan, la raison pour laquelle il n’y arrive pas, c'est qu'il ne connait même pas la cause du décès. Cependant, Ken lui aurait dit que son frère avait été assassiné, mais par qui ? Personne ne le sait encore ...

– C’est vraiment horrible ! Mais s’il avait eu une histoire de meurtre, comment se fait-il que cela n’ait pas fait la une dans les journaux ou qu’on n’en ait pas entendu parler ?

– Je n’en sais rien… C’est justement cela qui me trouble le plus et Blair n’a pas voulu m'en dire davantage, elle se sentait déjà mal à l'aise de tout me dévoiler.

Soudainement, ils se firent interrompre par Blair.

– Salut les tourtereaux ! Qu'est-ce que vous complotez dans votre coin ? dit-elle amusée.

Zoé réalisa alors qu’elle tenait toujours la main de Brendan. Embarrassée, elle la relâcha d’un geste rapide.

– Ah rien du tout ! En fait, rien d’important ! s’exclama-t-elle timidement.

Kevin arriva à l’improviste en posant sa main sur l’épaule de Brendan .

–  Hey fait longtemps qu’on ne te voit plus avec nous ? s'exclama son ami.

Zoé s’agrippa au bras de Blair.

–  On se voit plus tard ! s’écria-t-elle en s’éloignant toutes les deux de Brendan.

Brendan et Kevin reprirent eux aussi le pas en direction de la classe.

– Mais dis – moi, cela fait un moment que tu es avec Zoé Wilson. Il y a certainement quelque chose entre vous.

– Probablement. C’est à suivre…

– Je ne te reconnais plus ? Et tu ne restes même plus avec nous après les parties de basket ?

– Je sais. Je suis désolé, mais j’ai réussi à me créer de nouvelles amitiés qui me ressemblent plus.

– Wow, d’accord… Je vois.

– Kev, ce n’est rien de personnel.

– Ok, d'accord, on se revoit à la prochaine partie, connaissance.

Offusqué, Kevin prit congé de Brendan. Consterné, Brendan le regarda s’éloigner, n’ayant évidemment pas su comment mieux dire les choses.

À la fin des classes, Ken ne marcha pas immédiatement en direction de chez lui. Une forte envie le dirigea à l’endroit où Angie l’avait amené la première fois. Le ciel commençait à se couvrir de nuages gris. Mais Ken ne s’en soucia pas et marcha à une intersection devant un arrêt de bus pour Signal Hill.

L’autobus s’arrêta au terminus en haut de la colline de Signal Hill. Normalement, c'était un endroit toujours bondé de touristes, mais étonnamment, Ken remarqua qu’il était seul cette fois. Il se persuada que c’était probablement à cause du mauvais temps qui s’annonçait. L’autobus parti et Ken observa le site complètement désert. Sur le point de continuer son chemin vers l’autre côté de la falaise afin d’admirer la vue de l’océan sous un tout autre angle, il ressentit une présence loin derrière lui. Le ciel grondait, laissant présager l'arrivée de l'orage. Il se retourna et son regard tomba sur un jeune garçon d’environ douze ans perché sur le toit de la tour de Cabot. C'était une structure historique du style néogothique, d’une hauteur de 15 mètres et située au sommet de colline Signal Hill. Toute son attention fut immédiatement attirée vers ce garçon. Ken s'interrogea : pour quelle raison il se tenait tout en haut de la tour, surtout en ce temps orageux ? Ken s’approcha du monument sans le quitter des yeux, lorsqu'il remarqua que l'enfant semblait marcher vers le bord. Il jeta un dernier coup d’œil aux nuages noirs, puis des vents se firent sauvagement ressentir. Frappé par ces rafales soudaines, il remarqua bien que le garçon éprouvait de la difficulté à garder son équilibre. Ken, consterné par ce comportement téméraire, se disait qu’il devait absolument agir ou quelque chose de grave allait se produire.

Il courut rapidement jusqu’à l’entrée de la tourelle, quand un coup de tonnerre éclata et frappa l’antenne de la tour. Ken sursauta par cette détonation assourdissante. Angoissant devant la porte déjà ouverte, il remettait en question sa motivation d’aller retrouver ce garçon sur le toit. Il était très conscient du risque dans lequel il allait s’embarquer. Il hésitait, quand tout à coup, un cri strident se fit entendre au-dessus de lui. Alarmé par ce cri de détresse, Ken prit immédiatement les escaliers à l’intérieur, imaginant le pire, il se dirigea précipitamment vers la porte menant directement à l’extérieur. Envahi d’une grande inquiétude, il vit aussitôt ce garçon se relever en titubant, voulant de toutes ses forces agripper le rebord.

– Est-ce que ça va ? C’est dangereux de rester ici par un temps pareil ! s’exclama Ken, préoccupé.

Malheureusement, il n’obtint aucune réponse. Croyant avoir au moins attiré son attention, mais le garçon l'ignora. Au lieu de cela, il se pencha dangereusement au-dessus du rebord de pierre et tenta avec maladresse d'y monter. Troublé et déterminé, Ken se précipita vers celui-ci en le tirant par le bras. Le jeune garçon tomba malencontreusement dans ses bras, puis tous deux s'affalèrent sur le sol. Ken ressentit le corps agité de ce dernier. Il se releva, un peu déstabilisé, mais remarqua qu’il restait agenouillé, la tête baissée. Il tremblait légèrement des bras. Ken se pencha sur lui afin de l’observer un moment. Il découvrit sous ses mèches de cheveux noirs, un visage au teint blême, fatigué, des yeux marron cernés et envahis d’une profonde tristesse.

– Quel est ton nom ? s'enquit-il calmement en réalisant qu’il était devant un jeune fragile et tourmenté.

– Kyle… répondit-il enfin d’un ton monotone et mélancolique

– Moi, c’est Ken. Je suis là pour t’emmener dans un endroit plus sûr. La foudre peut nous frapper à n’importe quel moment. Il faut partir immédiatement.

– Pourquoi, tu as fait ça... ?

– Fais quoi ?

– M’empêcher de passer à l’acte…

Ken exprima une grande préoccupation face à cet aveu.

– Au plus profond de moi, il brûle comme une flamme… Je ne peux plus le supporter, sanglota Kyle en se prenant la tête affectée par une souffrance qui le rongeait réellement de l’intérieur.

Il se leva ensuite tranquillement, puis lui demanda avec une frayeur dans ses yeux .

– Tu as bien dit que ton nom était Ken ? 

Perplexe, Ken acquiesça.

– Va-t’en ! Tu dois partir ! Éloigne-toi de moi! cria-t-il horrifié en le repoussant faiblement. Cependant, Ken resta figé sur place, sidéré et confus face à ce rejet soudain. Pour quelle raison le forcerait-il à s'éclipser, alors qu’il voyait clairement qu’il avait besoin d’aide ?

– Kyle... Qu’est-ce qui ne va pas... ? Que veux-tu dire ?

– S’il te plait Ken... Va-t’en… supplia Kyle, les yeux en larmes.

Il recula de quelques pas, des sueurs froides coulèrent le long de son visage et il se crispa de douleur. Il tentait visiblement de résister contre une force interne. Celle-ci vint à se manifester contre son gré. Kyle tomba lourdement sur ses genoux. Ken s’avança rapidement en l’agrippant par les épaules. Les premières gouttes de pluie commencèrent à tomber, accompagnées de grondements dans le ciel. Kyle releva tranquillement la tête vers Ken. Ses pupilles se dilatèrent pour devenir complètement noires, puis un sourire machiavélique se dessina sur son visage trempé. Une énergie démoniaque émana de lui. Sous le regard pétrifié de Ken, il lui dit d’une voix caverneuse et glaciale : « Comme on se revoit. » Puis d’une force inhumaine, il frappa violemment Ken au visage en lui infligeant une griffure profonde le long de sa joue gauche jusqu’à sa lèvre. Ken tomba brutalement au sol et resta saisi un moment. Une sensation de brûlure envahit sa joue. D’une main, il chercha à apaiser cette douleur, puis de l’autre, il essaya avec peine de se relever. Pendant que Ken tentait désespérément de se remettre sur pieds, Kyle marcha vers lui et d’un geste impitoyable, il lui asséna un coup de pied contre son épaule pour le faire retomber sur le sol mouillé. Tandis que Ken gémissait de douleur, Kyle lâcha un rire macabre, éprouvant un certain plaisir de voir ce dernier souffrir. Toutefois, lorsque Ken réussit à croiser le regard de Kyle malgré l’effroi, il aperçut une larme couler sur son visage. C’est alors que Ken prit conscience du véritable responsable de son pire cauchemar, le démon. Il comprit très vite que Kyle était prisonnier et n’avait plus aucun contrôle de ses actes.

Cela mis Ken hors de lui. Pourquoi ce diable hantait l’âme d'un jeune garçon innocent ? Ken ne put s’empêcher de crier, scandalisé :

– Pourquoi lui ? Qu’est- ce que tu veux ?

– Ènn lo chèmèts chèl sikui ! répondit Kyle, révolté dans une langue étrangère qui laissait sous-entendre de l’hébreu.

Ken jeta un regard interrogatif, ne comprenant pas les paroles qu’il venait de prononcer. Mais il ressentit avec certitude qu’il lui transmettait une vengeance et sans aucun doute ces mots ne présageaient rien de bien. La respiration de Kyle cessa soudainement et il s’effondra de tout son poids à côté de Ken. Paniqué, il s’approcha en s’agenouillant et observa le corps inanimé de Kyle. Il tendit son oreille au-dessus de la bouche de celui-ci afin de s’assurer qu’il respirait toujours. Son souffle n’y était plus, mais après un bref instant, Kyle reprit un grand coup d’air et sous son regard rassuré, les yeux du jeune garçon retrouvèrent leur couleur normale. Affligé et épuisé, Kyle reprit le contrôle de son corps et redevint lui-même. Amnésique, il demanda alors :

– Ken… ? Qu’est-ce qui s’est passé ?

– Tu ne te rappelles rien ?

– Non…

– Donc, tu ne te rappelles pas d’avoir parlé une langue étrangère qui ressemblait à de l’hébreu ?

– Quoi ? Non pas du tout, je ne connais pas cette langue.

La griffure profonde sur la joue de Ken attira l’attention de Kyle

– Oh non, je t’ai fait ça ? s’exclama-t-il d’un ton abattu.

– Kyle, tu n’étais pas toi-même, il avait pris possession de toi. Tu n’y pouvais rien.

– Je n’aurais jamais dû aller là-bas !

– Que veux-tu dire ? Allez où ?

– C’est là que tout a commencé… J’adorais aller me promener dans un chantier boisé avec mes amis. Puis, cette journée-là, j’ai entendu un chat miauler qui semblait provenir d’une maison isolée dans la forêt. Elle paraissait abandonnée, donc je voulais m’assurer que le chat allait bien. Je me suis approché seul de cette maison…

– Un chat ? interrompit Ken, intrigué.

– Oui … je pouvais l’entendre juste derrière la porte d’entrée, mais je n’osais pas l’ouvrir. J’avais cet étrange désir qui m’incitait à entrer et depuis ce jour, je n’ai jamais été moi-même…

– Qu’est-ce que tu as vu en entrant ?

– La noirceur..., une ombre noire imposante…

– Pas de chat ?

– Non juste cette ombre…

Ken resta sous le choc après cette révélation. Il eut un grand doute de la maison, dont il faisait mention. S’agissait-il de son ancien domicile où que tous ces horribles évènements eurent lieu ?

– Tu étais dans quelle région exactement ? demanda Ken consterné.

– À Torbay, je vis là-bas. Mais j’ai cette voix intérieure qui m’obsède dans mon sommeil, me demandant de te retrouver. Je ressens au plus profond de moi que c’est un sentiment de rancœur et de haine. Mais depuis, j'ai des idées noires, que je ne supporte plus… Crois-tu pouvoir m’aider… ?

Ken le regarda soucieux, mais toujours avec compassion. Il comprenait bien qu’il était désemparé, il avait ce profond sentiment, qu’il ne devait pas le laisser tomber. Il était toutefois convaincu que s’il se résignait à donner son aide, qu’il allait probablement réveiller la source de son cauchemar et il était persuadé qu'il n'avait pas la force de faire face à ce mal. Il commençait à mettre un sens à ce que son frère et ses parents lui avaient transmis les nuits passées. Il se dit intérieurement : « Ils ont raison, je ne peux pas l’affronter seul…je ne sais pas quoi faire… Je ne peux pas croire qu’après tout ce temps, il est toujours présent … » Malgré ces paroles pessimistes dont Ken se nourrissait, une forte vibration intérieure remplie de chaleur s’empara de lui.

– Je crois pouvoir t’aider… Je trouverai une solution, compte sur moi, fit–il avec assurance.

Face à cette promesse, Kyle montra enfin un air rassuré et lui sourit. Il fut toutefois épaté par cette grande confiance et par cette compassion qui se dégageait de Ken. Celui-ci aida le jeune garçon à se relever et l’encouragea à retourner chez lui. Il lui restait encore à éclaircir la situation pour sortir Kyle de cet enfer. Ken, lui-même n’en revenait pas de cette détermination soudaine.

Ken arriva finalement chez lui complètement trempé par la pluie. Inquiète, Elena se précipita à l’entrée et l'interrogea par son retour tardif.

–  Ken, enfin tu es là ! Mais où étais-tu ? 

Ken l’ignora en se cachant la joue avec sa main et monta lentement les escaliers. Il voulait à tout prix éviter toute conversation sur cet évènement. Il se sentait épuisé et abattu. Il avait une forte impression qu'il allait craquer à tout moment, surtout avec cette griffure qui recommençait à lui provoquer une vive douleur. Lora et Sonia étaient assises sur le canapé du salon regardant la télévision, quand soudain elles tournèrent leur attention vers Ken. Elena s'avança rapidement jusqu'au pied des escaliers.

– Ken arrête de m’ignorer ! Dis-moi qu’est-ce qui se passe ? lui dit-elle obstinée.

Il s’arrêta au milieu des marches, envahit par cette douleur infligée par sa blessure. Il s’affaissa lentement dans les escaliers en se prenant la joue. Angoissée, Elena monta rapidement le rejoindre.

– Ken qu’est ce qui passe ? s’écria-t-elle en le soutenant par ses épaules.

– Ma joue… Elle me brûle, lui répondit-il , souffrant, les yeux submergés par les larmes.

Elena l’observa consternée, elle réussit à convaincre Ken d’éloigner un peu sa main, pour la laisser examiner sa blessure. Alarmée, en voyant cette profonde griffure d'un rouge vif, elle cria à Lora, d’aller immédiatement chercher de la glace dans le congélateur. Elle obéit et revint en courant avec un sac rempli de glace qu’elle remit dans les mains de sa mère en bas des escaliers. Cette dernière l’empêcha de la laisser monter. Elle tenait absolument à ce que sa fille ne soit pas témoin de cette scène. Elle lui ordonna donc de retourner auprès de sa sœur dans le salon. Lora regarda sa mère rejoindre Ken, attristée par l’état de celui-ci. Entêtée de vouloir rester pour savoir ce qui lui était arrivé, elle se cacha discrètement sur le côté des escaliers, puis écouta attentivement la conversation. Elena déposa doucement la glace sur la joue de Ken.

– S’il te plait, Ken parle-moi… J’ai besoin de savoir qui t’a fait ça, implora-t-elle.

– Il est toujours là … Il est revenu pour moi… répondit- il d’un ton terrifié.

– Qui ça ?

– Je n’ai pas osé te parler de quoi que ce soit… je ne voulais pas t’inquiéter.

– Ken ne pense pas comme ça, je suis là pour toi. J’ai juste besoin d’explication, peu importe ce qui t’arrives.

– Le diable… Je l’ai vu posséder le corps d’un jeune garçon innocent. Et je ne sais pas ce qu'il m’a pris… Mais je lui ai fait cette promesse…

Anéanti, Ken s’interrompit, puis laissa échapper de chaudes larmes. Complètement tourmentée par ces paroles, elle l’étreignit contre elle et lui dit d’une voix basse déstabilisée :

– Oh mon dieu, cela me désole tellement tout ça … je suis là. Mais dis-moi, que lui as-tu promis ?

– Que j’allais le libérer du diable…mais je ne comprends pas ce qui a pu me laisser promettre ça. Je n’y arriverai pas, déplora Ken complètement dévasté.

Elena l’enlaça avec beaucoup d’affection et d’appréhension.

–  Ken écoute moi, si le mal est proche, dis-toi que tous ceux que tu aimes et qui sont là-haut, seront présents pour toi et ils te protégeront quoi qu’il arrive, lui confia-t-elle.

Lora, toujours attentive à la conversation, resta choquée par ce qu’elle entendit. Considérant qu’elle en savait assez, elle décida de retourner auprès de sa sœur, qui lui lançait un regard inquisiteur. Malgré l’impatience de Sonia qui voulait tout savoir, Lora exprima une mélancolie et insista pour qu'elles terminent de regarder leur film comme si de rien n’était.

Elena ressentit enfin la respiration de Ken se calmer. Elle put voir que sa douleur se dissipait peu à peu, elle en profita alors pour ajouter :

– Je ne m’inquiète plus. Je peux voir quelque chose en toi. Ta mère avait raison. Tu es plus proche de ces êtres que tu l’imagines. Je crois fortement qu’avant sa mort, elle a réussi à créer un champ de lumière autour de toi.

Ken se détacha de sa tante lentement et ses traits s’adoucirent. On pouvait clairement voir qu’il était interpelé par les paroles rassurantes de sa tante.

– J’ai vu une plume blanche tomber du ciel devant moi une fois, mais la chose plus étrange, c'est qu'elle s'est évaporée sous mes yeux. Tu crois que c’était ma mère… ?

– Probablement, mais je sais sans l’ombre d’un doute que c’était un signe. Tu vois ? Tu n’as jamais été seul depuis tout ce temps, répondit sa tante avec son plus doux sourire

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