Chapitre 3
Connard ! Mais quel connard ! Venir chez moi, dans ma maison, sous mon toit, sur mon canapé et épandre son amour comme un meurtrier épand ses pesticides afin de tuer toute cette biodiversité qui nous fait vivre. Comment peut-il croire que leur histoire va fonctionner ? Comment peut-il passer d’un ignare stupide à un homme comblé ? Je ne peux pas laisser faire cela, c’est moi qui ai tout construit entre eux. Je peux aussi tout détruire.
* * *
Quelle charmante soirée ! Un mois après le drame, Gégé se dresse en hôte disponible et agréable. Il contente tous les désirs de ses prétendus amis. Tout le monde s’amuse, tout le monde rit, même Géraud semble profiter de ce moment malgré son envie irrépressible de tuer leur amour. Amateur du climax explosif, Gégé attend la venue de son invitée mystère. Celle qui déclenchera le dénouement et la fin précoce d’une histoire bancale. La sonnette retentit, Félicia entre d’un pas confiant et s’arrête aussitôt. Les démons du passé finissent toujours pas ressurgir et ce soir, c’est Mickael qui en fait les frais. Gégé était persuadé que la lâcheté de son ami à l’égard de cette jeune femme ne la laisserait pas tranquille tant qu’elle n’aurait pas vengé son honneur. Son vrai visage est enfin révélé au grand jour. Faire miroiter à une demoiselle un mariage d’amour et de paix dans le seul but de coucher avec n’est pas très gentil. Mais organiser un faux mariage et une fausse lune de miel puis s’éclipser et ne plus jamais donner de nouvelles, c’est insupportable. Julie est surprise, dans le mauvais sens cette fois, et s’enfuit à toutes jambes, les larmes aux yeux.
Quelques minutes après ce chahut, Mickael s’assoit près de moi. Épouvanté, il tremble. Il veut retrouver sa promise, mais ne sait pas où localiser Julie pour plaider en sa faveur. De toute évidence, il a oublié l’endroit où elle aime se réfugier. Erreur que je ne commettrais pas. Une fois débarrassé du lourdaud, je file la rejoindre sans douter une seule seconde qu’elle soit ailleurs. « Je suis désolé pour toi, j’aurais préféré te parler de lui avant, mais j’étais tiraillé entre lui faire de la peine. » Elle lève la tête, les yeux rouges. « Tiraillé entre lui faire de la peine et quoi ? » C’est évident qu’elle allait poser la question, je la connais comme si je l’avais toujours connue. « Entre le rendre triste et te briser le cœur, mais je ne voulais surtout pas te briser le cœur. » Inutile d’en dire plus, je la connais, elle a compris. Compris que tout ce stratagème était piloté par mes petites mains, les rendez-vous surprenant, les soirées envoûtantes, ce bonheur insatiable auquel elle a goûté les plus charmants délices. À cause de mon absence auprès de Mickael durant ce mois, elle comprit pourquoi l’intensité de leur rencontre s’annihila. Elle vit clair dans mon regard, et mon cœur se pinçait de voir ses larmes, mais sans un mot, sans un geste je lui apportais tout le réconfort dont elle avait besoin. Et c’est quelques instants plus tard qu’elle me déclarait son amour en se glissant confortablement entre mes bras.
Merci.
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