Chapitre 15 - partie 1
Elle rouvrit les yeux brusquement, attendant son contact elle s'endormait à moitié. Elle se les frottait espérant les maintenir ouverts plus longtemps.
Assise sur un banc dans une place. Elle voyait les passants pressés s'activer autour d’elle en l’ignorant.
Elle détestait passer une nuit presque blanche. Le sommeil c’était la vie. Elle eut un élan de nostalgie en se souvenant de son lit moelleux, à sa couette tendre qui l’attendait. Elle commençait à rêver de grasse mat’. Ce n’était vraiment pas bon signe. Des vacances, voilà ce dont elle avait besoin. Allez, ça suffit. Fini les excuses. Cette fois-ci, tu te prends de vraies vacances loin de tout moyen de communication. Le conseil, les meurtres, les chiens perdus tout ça loin derrière elle durant au moins une semaine. Allez soyons fous, deux semaines. Elle avait dû appeler la moitié de ces contacts espérant que certains connaissent un peu ce groupe extrémiste pro-créature. Mais il semblerait que personne ne les fréquentait. Des gars tarés, trop paranos… comme on lui avait dit. Ce n’était pas un portrait rassurant qu’on lui en avait fait.
Son esprit était si lourd qu’elle arrivait à peine à ressasser les faits pour émettre des hypothèses.
Elle avait reçu presque toute la nuit des appels de connaissance voulant démêler le vrai du faux du communiqué du journal d’info.
Il faut dire que depuis lors tout le monde n’avait fait que d’en parler. Et tout et rien s’étaient dit.
Malgré ses efforts, elle se rendormit. Une main vient se poser sur son épaule, d’un réflexe que de longues années d'entraînement avaient forgé, elle riposta d’un vif coup de poing pendant que l’autre tordait la main qui venait de la toucher. Son poing fut stoppé net du plat d’une main. Alors qu’elle ouvrait les yeux et commençait à revoir clair. Elle aperçut de ses yeux noirs un visage qu’elle connaissait bien.
— Sérieusement, c’est comme ça qu’on se dit bonjour maintenant, s’amusa Tobias. Fallait me prévenir, je serais venu avec une batte.
— Tobias, je ne t’ai pas entendu arriver.
— Faut dire que tu dormais.
— Non, je réfléchissais.
— Toujours aussi petite que têtue, ricana-t-il en s’asseyant à côté d’elle sur le banc.
Elle lui donna un coup de coude bien placé dans les côtes qui ne le fit même pas réagir.
— Un gang de crétins ont commencé à faire des vagues dans le coin, Morretti m’a demandé d’aider à les calmer. L’un à commencer à dire que son groupe les vengerait. Enfin bref. Bonne nouvelle, j’ai trouvé un gars qui sait où crèche ton groupe d’illuminés. J’ai dû un peu le secouer jusqu’à qu’il me dise où les trouver. Mais bon, c’est le résultat qui compte. Tadaddaaa, finit-il joyeusement en levant les bras théâtralement.
— Et bien alors c’est parti.
Le quartier où ils se trouvaient était l’un des endroits les moins bien fréquentés. Installé près du fleuve, il était souvent inondé. Si bien que la plupart des bâtiments étaient sur pilotis avec des ponts improvisés les reliant. Cela pouvait donner au lieu une apparence de Venise version ghetto. Pourtant ce n'était pas une ambiance de peur et de danger qui y régnait. C’était juste différent. On n’y trouvait des petites boutiques improbables vendant des marchandises qui n’étaient plus en vente depuis des années, des moyens de transport faits de bric-à-brac les plus surprenants. Il y a avait même un système de bus amphibie. Une vraie petite ville dans une grande ville. Il y a quelques années, on n’y aurait vu une prison sans geôlier, où l’on avait parqué les rebus comme des troupeaux. Mais la beauté du monde était arrivée jusqu'ici lors de quelques mesures et un gang qui avait réussi à rendre vivant cet endroit.
Faith avait exécuté plusieurs contrats pour ce gang. Et ce n’était pas la seule, Tobias travaillait actuellement pour eux. Enfin, c’était elle qui l’avait mis sur le contrat. Mors proles, ils avaient fait du bon boulot, même si c’était pour servir leur propre intérêt. Bien sûr, ils n’étaient pas tout blanc, mais elle leur accordait du crédit d’avoir pu faire ce que la police et la mairie n’avaient pas pu : rendre cet endroit agréable à vivre pour les oubliés qui l’habitait.
D’une certaine manière, elle n’était pas surprise que ce groupe se soit installé ici. Personne ne se mêle de la vie de personne et la police n’ose pas y fourrer son nez. Un coin idéal. Maintenant le gang c’était bien plus étendu à de nombreuses autres zones, mais il ne semblait pas négliger leur lieu d’origine.
Tobias la conduit-y à travers un labyrinthe de rue et de ruelles jusqu’à une ancienne petite usine de boîte de conserve. Elle repéra un garde, et un vigile en hauteur sur le toit. Elle attendit que le vigile recommence son tour en se dirigeant à l’opposé pour s’approcher de l’entrée et du garde.
C’était un adlet, une créature reconnaissable par son corps d’apparence humaine, mais aux jambes de chien, ainsi que ces traits souvent inuit. Celui-ci, particulièrement vigilant et irrité, fronça des sourcils en les voyant arriver.
— Dégage de là, la naine.
Un sourire glacial apparu sur le visage de Faith. Une seconde plus tard, sa jambe écrasait d’un coup de pied bien placé les parties génitales de l’animal. Un cri aigu de renard sortit de sa bouche. Elle suivit d’un uppercut dans la mâchoire, alors que la pauvre bête s’accroupissait pour se les tenir de douleur. Un coup derrière le genou le fit tomber plus bas que sol alors qu’il continuait de glapir de douleur.
Après son massacre, elle l’enjamba l’air de rien pour s’approcher de la porte. Tobias, un sourire carnassier aux lèvres et les mains dans les poches, se baissa pour murmurer à l’oreille du garde.
— Se moquer d’elle, mon grand, ça c’est mon privilège.
Car s’il y avait bien une chose qu’elle détestait en plus qu’on lui manque de respect, c’était bien qu’on se moque de sa taille.
Le vigile, attiré par le cri, accourut dans leur direction.
Faith le vit les menacer de son arme. Tobias, réactif, se contracta pour réagir et le gérer. La jeune femme d’une main lui fit signe de ne pas bouger. Elle eut un sourire terrible, et jubilait en disant sa phrase favorite.
— Je me disais bien que je te connaissais, je n’oublie jamais ceux qui me doivent une faveur. Il faut que je parle à un des responsables.
— Vouuuss, dit-il en la pointant du doigt.
Elle lui fit signe de descendre. D’une souplesse remarquable, il sauta sur une gouttière et se laissa glisser. Le regard sombre, il observa le corps hurlant, et les fit entrer amèrement.
— Avoue, t’espérais ne jamais la revoir, annonça Tobias au vigile en passant.
Quand ils entrèrent, les créatures sursautèrent, avant que leur ami temporaire ne calme la situation. Il les laissait là et partit dans une pièce à côté. De cette pièce, on entendit des voix s’élevant et des excuses. Quand ce fut fini, un immense Minotaure, mi-taureau mi-homme, les fit entrer l’œil torve dans la pièce.
— Seulement elle. Toi tu restes ici, grogna-t-il en pointant du doigt Tobias.
— Pas question, répliqua-t-il. Il se mit entre Faith et l’être cornu, en montrant presque les dents.
Faith soupira, les instincts protecteurs de Tobias pouvaient être si lourds. Elle lui passa devant.
— Elle, elle fait ce qu’elle veut, expliqua la jeune femme. Et elle choisit. Tobias reste ici, j’accompagne le monsieur.
— Mais…
— T’inquiètes, je suis une grande fille. Si je décide de me défendre, vous serez tous morts avant d’appeler votre prince charmant à la rescousse.
Il se contenta d’un grognement réprobateur, avant de lâcher un sourire malgré lui face à la réplique de son amie.
De son côté, l’échange avec le responsable ne fut pas si drôle. Il n’aimait pas la manière dont elle les avait rencontrés. Selon lui, la seule raison d’être encore en vie était sa réputation, et le « plaidoyer » en sa faveur de son ami temporaire.
Elle mentit avec aisance en disant qu’on lui avait demandé de vérifier la revendication. Si ce n’était pas une divagation de journaliste cherchant à faire du bruit. Et que si c’était le cas, de voir des exigences avec eux. Et au fond, elle ne mentait pas tant que ça.
— Vous travaillez pour le gouvernement ?
— Je travaille pour beaucoup de monde, ce n’est qu’un de mes clients. Ils sont souvent très différents.
— Vous courrez après l’argent comme si c’était votre dieu, vous n’avez aucune conviction. Les gens comme vous sont sans âme. La cause créatura est notre bataille, j’y laisserais ma vie pour elle, et aussi celle des autres. Votre compagnon est un des nôtres, difficile d’ignorer son odeur de bête. Et vous, qu’êtes-vous ? Ami ou ennemi ? Faerie ou Humain ?
— Quelle importance. Je suis la troisième option.
— Ça n’existe pas.
— C’est comme les licornes ce n’est pas parce qu’on n’en a jamais vu que ça n’existe pas. La troisième option n’est ni humain ni faerie c’est une sorte de milieu équilibré qui n’est dans le camp de personne. Ça vous convient ?
— Non, la troisième option n’existe pas. Il n’y a qu’allié ou ennemi dans ce monde.
— Si seulement tout était si simple. Bon, si on entrait dans le vif du sujet. Êtes-vous à l’origine des 4 meurtres déguisés en suicide?
— Non, 6 meurtres. Ça n’a pas été déguisé. Ils se sont jetés de leur plein gré ou plutôt forcés par nous.
Faith fronça des sourcils, elle leur avait donné une fausse information, en espérant qu’il fonce dessus. Mais on dirait qu’il savait de quoi il parlait. Ou du moins, il s’était bien renseigné.
— Vous acceptez donc de prendre les responsabilités de ces meurtres ?
— Ce n’était que des moyens pour montrer aux conseils à quel point nous sommes sérieux et prêts à tout pour défendre notre cause.
— Ces gens étaient innocents, pas suprématistes de la cause humaine, des civils, des habitants, critiqua Faith en feintant la tristesse.
— Et tous les nôtres qui sont morts durant la grande scission, n’étaient-ils pas innocents ? Ne méritait-il pas de vivre ?
— La guerre a fait des morts des deux côtés, répondit-il d’une voix légèrement insolente.
— Peut-être pas assez dans le leur. Nous avons subi le plus grand génocide de toute l’histoire de ce monde. Et pour cela, aucune punition n’a été donnée, grogna le minotaure en soufflant des naseaux.
— Ce gouvernement n’y est pour rien, il n’a pas pris part à la guerre, haussa-t-elle le ton.
— Il a protégé des criminels après celle-ci, leur donnant une immunité et les laissant vivre ici sans répondre de leurs actes. Il est tant que ceux qui nous dirigent réagissent et prennent leurs responsabilités, dit-il en montant lui aussi de ton.
Faith voulait l’énerver en espérant qu’il lâche une information involontairement.
— Ce n’est pas en tuant des gens qu’ils vous écouteront mieux.
— Nous avons épuisé les moyens conventionnels en lettres et en papier, mais il a fait sourde oreille. Les armes sont le seul moyen qu’il reconnaisse, dit-il en reprenant son calme.
Elle soupira. Rater. Le minotaure semblait plus maîtrisé que ce que son apparence donnait comme impression. D’un côté, elle était vraiment désolée pour eux. Elle en avait vu des groupes défendant les seelies. Malheureusement, certains prennent de mauvais chemins. Elle n’était pas contre leurs pensées. Du coin de l’œil parmi les papiers sur le bureau elle remarqua une feuille où était écrit plusieurs fois le nom de “Damien Lorg”. Le plus étrange était que ce nom avait été écrit avec tellement de force que le papier avait été transpercé par endroits. L’air de rien en continua tout en examinant le bureau.
— Alors, pourquoi viser des innocents? Pourquoi pas viser les réfugiés des camps humains ? Pourquoi salir la pureté de votre cause avec le sang des innocents ?
— Pourquoi tentez-vous à ce point à nous enlever ces actes, cette victoire. Ils nous ont entendu la preuve ils vous envoient.
— Car ce n’est pas une victoire, mais un crime, et vous serez jugé en tant que criminel, votre cause subira vos crimes, et se teintera dans le cœur des gens d’une réputation si mauvaise qu’il ne fera pas avancer les esprits.
— C’est la seule voie.
— C’est une impasse.
— Il est tant de faire ce que pourquoi vous êtes là. Noter nos exigences.
Un SMS vibra arrêtant la conversation.
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Désolé pour ce chapitre très long mais je voyais pas où le couper. Si vous avez une idée, dites-là moi. Sinon j'espère qu'il vous a plu. Vous en faites pas les prochains seront bien plus court ;)
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