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Le soleil brillait, haut dans un ciel parcouru de quelques nuages. Elle revenait vers le village par un sentier bordé de fleurs. Un bruit familier attira son attention. Elle s’arrêta et leva le regard ; un milan doré arrivait vers elle, ses ailes d’engrenages passant d’un courant aérien à l’autre. Il ralentit à son approche et elle tendit le bras pour qu’il s’y pose. Elle esquissa un sourire. Il s’agissait de l’oiseau-automate que Sergey lui avait offert pour qu’ils échangent des lettres. Le cœur joyeux, elle reprit sa marche d’un pas plus vif. Elle arriva à sa maison, salua son père qui travaillait dans son officine, puis monta dans sa chambre et s’installa sur son lit. Elle y déposa l’oiseau et ouvrit son compartiment. À l’intérieur se trouvait une lettre parcourue d’une écriture efficace. Elle eut la surprise d’y découvrir également une fleur blanche, qu’elle sortit précautionneusement. Comprenant le message, elle sourit à nouveau. Elle reporta son attention sur la missive pour la parcourir attentivement. Une fois sa lecture terminée, elle se rendit à son bureau, prit une feuille et sortit son porte-plume avec un flacon d’encre bleue. Après un temps de réflexion, elle se mit à rédiger sa réponse. Rapidement, la lettre se couvrit de sa calligraphie travaillée. Quand elle eut terminé, elle alla chercher une fleur dans son jardin puis remonta et la confia avec sa lettre à l’oiseau, qui s’envola par la fenêtre ouverte.
Cher Sergey,
J’ai été ravie de recevoir ta lettre, et je me suis empressée d’y répondre. Ton idée de correspondre par oiseau-automate était excellente, car nos messages circulent tout de même plus vite qu’avec le système de poste de l’Empire.
Tu me questionnais sur mon quotidien, saches qu’il n’est pas aussi palpitant que le tien. La plupart du temps, j’étudie avec mon père ou je m’occupe de la maison, et sinon je passe du temps avec mes amies ou je sors me promener dans la montagne. Il y a quelques mois, j’ai commencé à broder une nouvelle robe, et j’ai bien progressé. J’ai décidé d’innover en laissant de côté les motifs floraux, et quand j’ai demandé à mon père par quoi je pouvais les remplacer il m’a donné un livre écrit en ancien alphabet avec la clef pour le déchiffrer. Je couvre donc le tissu de runes rouges et oranges, et les phrases qu’elles forment ressemblent à des bénédictions. Qui sait, peut-être que la robe va devenir un talisman ?
Je constate que tu t’amuses bien de ton côté ! Des loups et des assassins, c’est à croire que tant les hommes que les animaux t’en veulent. Prends garde quand même à ne pas risquer ta vie inutilement. Je t’entends déjà me dire que ce sont les autres qui ont commencé, mais essaye d’être prudent. Car saches que si tu fais la moindre bêtise, ce sera moi que tu devras craindre ! Enfin, tant que ton frère est dans les parages, je ne me fais pas trop de souci.
Quelques échos des combats parviennent jusqu’au village, par les premiers voyageurs qui s’arrêtent chez nous. Ils nous informent de l’évolution de la ligne de front et parfois des dernières mesures diplomatiques. Je ne sais pas trop quoi en penser, j’espère juste que la guerre se terminera bientôt. En parlant de nouvelles des affrontements, on mentionne souvent les principaux acteurs, notamment certains soldats d’élite plus connus sous le nom de Chasseurs. C’est assez amusant car pour nous, votre rôle en tant que militaires devient plus concret. En même temps ils ont plus l’habitude de vous voir Pavel et toi comme des membres de notre petite communauté, et non comme des hommes d’armes célèbres dans tout l’Empire.
Toujours à propos de rumeurs, j’avais une petite question… Qui est cette Honoka dont j’ai plusieurs fois entendu parler ?
Ma lettre commence à devenir bien longue, et je ne voudrais pas t’ennuyer. Je te souhaite bon courage pour la période à venir, et j’espère que nous trouverons bientôt une occasion de nous revoir. Passe le bonjour de ma part à Pavel, et dis-lui que je pense bien à lui !
Je t’embrasse,
Shynar
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