Les nuages qui s’accumulaient depuis des heures laissaient enfin s’écouler la pluie. Le regard levé vers le ciel, il observait les premières gouttes tomber sur la ville. Il aimait les jours de mauvais temps, les éléments prenaient les couleurs des murs de la capitale et tout devenait gris. Cela lui donnait l’impression pour quelques instants d’évoluer dans un autre monde, immobile et apaisant.

Alors qu’il s’éloignait du palais impérial par une des rues principales, il croisa l’une de ses connaissances. Chacun s’arrêta à quelques pas de l’autre, surpris, puis elle le rejoignit.

« Akihito, commença-t-elle, cela faisait longtemps ! Comment allez-vous ? J’ai entendu dire qu’il vous était arrivé quelques aventures.

- Je ne me porte pas trop mal, sourit-il, et je suis ressorti indemne de ces péripéties, ce que j’apprécie assez. Et vous, Eriko, toujours à la recherche d’informations ?

- En effet, je viens de terminer une petite mission et je fais des devoirs supplémentaires.

- Pour votre propre compte ?

- Vous êtes perspicace ! Enfin, disons que je le fais pour aider une tierce personne.

- Qui se trouve être le Lieutenant ? compléta-t-il.

- Exactement.

- J’imagine qu’il doit être ravi.

- Vous ne croyez pas si bien dire. L’autre jour il m’a assez clairement interdit de poursuivre mon enquête.

- Alors pourquoi l’ignorez-vous ? s’amusa le jeune homme.

- Allez savoir. » répondit-elle d’un air espiègle.

La pluie gagna brusquement en force, se muant en averse.

« Je pense que je vais aller me mettre à l’abri au palais, reprit la jeune femme, non pas que je n’aime pas la pluie, d’ailleurs.

- Pour ma part je vais rentrer chez moi. Au revoir, Eriko !

- À une prochaine fois ! »

Et ils se séparèrent. Tout en marchant, il se remémorait la première fois où il avait rencontré l’espionne. Les circonstances n’étaient pas idéales, ils se trouvaient alors dans une prison sombre et glacées, mais elle avait été d’une grande aide et depuis elle était revenue quelques fois fournir diverses informations utiles aux Chasseurs. Il trouvait assez amusant qu’il existât dans l’Empire une personne capable d’agacer le Lieutenant au plus haut point sans que celui-ci n’y puisse rien.

Une bourrasque s’engouffra dans la rue, faisant tournoyer de lourdes gouttes avant de les laisser s’écraser sur les pavés. Il remarqua que son épée s’illuminait et entendit la voix de Vey.

Maître, vous devriez vous hâter de rentrer. Si vous restez cinq minutes de plus sous cette averse, vous allez tomber malade.

Légèrement étonné, il répondit :

« La pluie est si agréable en cette saison, j’aurais aimé en profiter encore un peu. Mais je te remercie, et je vais suivre ton conseil sans tarder. »

Il mit la capuche de son manteau et pressa le pas.

« Au fait, reprit-il, as-tu bien retenu ce que m’a dit le médecin impérial ? J’ai beau avoir pris de notes, je ne suis pas sûr d’avoir gardé toutes les informations essentielles. »

Ne vous en faites pas, ces données sont consignées dans ma mémoire. Je serai en mesure de vous aider dès que vous aurez un doute.

« Merci. Je compte me remettre au travail dès que je serai rentré. J’espère que je terminerai vite, mais je crois que j’en ai encore pour quelques jours. »

Vous finirez à temps. Ils sont à la capitale pour plusieurs semaines, vous pourrez lui donner bien avant son départ.

« J’ai hâte ! Et en même temps, je ne sais pas comment il va réagir… »

Vous êtes une personne très attentionnée, Maître. Il sera touché et en éprouvera de la gratitude, soyez-en certain.

Le jeune homme acquiesça d’un air songeur. Il parvint à sa maison, ouvrit la porte et annonça :

« Je suis rentré ! »