chapitre 22
Il passe une main sur son front en sueur et déglutie avec peine. Il essaye de trouver une raison logique à la présence d’agents fédéraux sur ce lieu. Ce sont des individus réputés pour leur coté méticuleux et qui disposent de nombreux moyens pour retrouver un coupable. Il ne s’agit pas de simples policiers. Shawn en a bien conscience, c’est une tout autre classe et ils en ont après lui. Pourquoi des agents du FBI se déplaceraient pour une telle affaire ? Ça n’a pas de sens ! Le jeune homme sait que ces hommes ne sont pas là pour rien. Puis il se rappelle la carte trouvée dans le dossier aux archives, signée par le FBI. Il se demande dans quel bourbier il s’est encore fourré et surtout, il commence à croire que ces deux affaires sont liées.
Cela semble tellement incroyable, tout s’embrouille dans sa tête, plus rien n’est clair. Il pensait déjà avoir atteint le fond et bien il se trompait lourdement. Il semble qu’une crevasse vient de se former et qu’il n’a pas encore atteint le bout du tunnel. Une lassitude immense vient se poser sur ses épaules. Il n’a donc le droit à aucun moment de répit dans sa vie. Pourquoi ne peut-on pas le laisser en paix ? Il ne demande rien d’autre. Mais il semblerait que ce soit trop demandé.
Il se fait le plus petit possible et tente de voir quelque chose en se penchant en avant. Shawn ne comprend pas pourquoi ces individus analysent le sol dans le moindre recoin. Dans quel but se demande le jeune homme. A quoi tout cela mène ?
Shawn prie pour qu’ils ne puissent pas remonter jusqu’à lui. Surtout que lors de l’affrontement, il n’était pas vraiment lui-même. Il a très bien pu laisser des traces compromettantes derrière lui. L’étudiant pousse un soupir, se sentant totalement dépassé par les événements. Il ne sait plus si le feu supprime toutes les traces ou s’il les conserve. Son cerveau est sur le point d’exploser, à force de cogiter
Il est tellement perdu dans son observation qu’il ne se rend pas compte qu’un individu avance silencieusement derrière lui. Soudain, sans crier gare, l’agent lui braque le faisceau lumineux de sa lampe torche en plein sur lui. Shawn sursaute de surprise, se retourne lentement et met ses mains devant les yeux pour se protéger des rayons aveuglants. L’homme en face de lui, donne l’impression d’être un bulldog, prêt à attaquer. Il n’a pas d’arme à la main mais le jeune homme se doute qu’elle ne pas être loin, sans doute sous sa veste. Il ne fait aucun doute que si besoin, l’agent est prêt à dégainer et à faire feu en une fraction de seconde.
Shawn jette un rapide coup d’œil derrière lui et voit que sur le chantier, les agents arrêtent de travailler et le regardent avec étonnement.
- Qu’est ce que vous faites là ? C’est une zone interdite au civil lui dit sévèrement l’agent à la lampe torche.
Le cœur de Shawn bat la chamade dans sa poitrine tellement il est stressé. Mais il arrive à se reprendre pour répondre le plus innocemment possible.
- Je passe toujours par-là avant de rentrer chez moi. Ce n’est pas interdit, je crois !
- Vous, vous foutez de moi ! Vous croyez que je vais gober ces conneries.
- Qui ne tente rien, n’a rien s’exclame Shawn, en secouant les épaules
Le jeune sait qu’il va avoir droit à un interrogatoire en bonne et due forme. Ils doivent posséder des appareils sophistiqués pour le faire parler et ils ne ressemblent pas à des enfants de chœur. Shawn commence à penser qu’il aurait dû s’en aller sans jouer les curieux car maintenant ça sent le roussi pour lui. Mais il est inutile de s’apitoyer, ce qui est fait est fait. Impossible de revenir en arrière. L’étudiant regarde derrière lui et voit l’ensemble des agents se diriger vers lui.
Il regarde l’homme en face de lui et se demande s’il a une chance de s’échapper, sans devoir utiliser son pouvoir. Il veut à tout prix éviter de tuer quelqu’un à cause d’une action maladroite. Il ne voit pas beaucoup d’issue possible, ce qui n’est pas pour le rassurer. Mais il a appris une chose sur lui dernièrement. Il est doué pour agir dans les situations complexes.
Shawn voit les hommes qui se rapprochent dangereusement de lui, ils sont tout proche. Il sait que s’il doit tenter quelque chose, c’est maintenant ou jamais. L’intrus se tourne face à la personne qui l’éblouie avec sa lampe. Ce dernier semble sur ses gardes, essayant de deviner les pensées du jeune homme.
- Il va falloir trouver mieux comme excuse bidon, mon gars dit l’agent fédéral.
- J’ai toujours été nul à ce jeu !
Sans crier gare, l’étudiant se redresse et rapide comme l’éclair, se jette sur l’homme en face de lui. Il le frappe d’un coup de genou dans les parties sensibles et d’un coup de coude dans la mâchoire.
L’agent fédéral recule, un peu sonné, surpris par la rapidité de l’étudiant. Mais, il ne s’écroule pas au sol comme l’aurait pensé Shawn. Au contraire, l’adulte plonge vers lui en poussant un cri de rage, dans l’intention de le plaquer au sol.
Mais Shawn ne laisse pas la surprise le pétrifier. Il réussit à éviter l’attaque d’un bond sur le coté et repousse l’homme d’une grande poussée de ses deux mains. Cette fois, l’agent s’écroule durement contre la voiture. Shawn n’attend pas son reste et court aussi vite que ses jambes le lui permettent.
Il n’ose pas se retourner mais entend de l’agitation derrière lui, ainsi que des bruits de pas rapides. Il aimerait bien retrouver l’énergie qu’il avait après avoir fui son psychiatre, mais là, ses batteries sont vides. Il ne pourra pas les semer facilement, mais il puise dans ses ressources pour trouver de l’énergie supplémentaire. Il court comme si sa vie en dépendait, ce qui n’est pas tout à fait faux. S’il se fait attraper, il peut dire adieu à Sarah, il n’aura aucune chance de lui dire ses sentiments. Sa vie redeviendrait un cauchemar et ça il le refuse. Cette motivation supplémentaire lui donne la force d’accélérer le pas.
Il tourne à droite dans une petite rue, sachant que ce n’est jamais une bonne idée de courir tout droit lorsqu’on souhaite échapper à des poursuivants. Le problème c’est qu’il ne connaît pas du tout le quartier. Il est venu une seule fois et n’avait fait que suivre Jamie, avant d’affronter les agresseurs de Sarah. Encore une fois, il n’a pas prévu de porte de sortie au cas où les choses tourneraient mal. Ce qui est justement en train d’arriver. Il se promet que s’il en réchappe, il ne fera plus cette erreur.
Tout ce qu’il espère c’est de ne pas tomber sur un cul de sac, car là il serait cuit pour de bon. Il court en plein milieu de la route et se demande s’il ne devrait pas se réfugier dans le jardin d’une maison. Il pourrait ainsi attendre que les choses se calment.
Il oublie vite cette idée lorsqu’il se rappelle qu’il a affaire à des professionnels. Ils seront prêts à tout ratisser, quitte à réveiller tout le quartier, dans le seul but de lui mettre la main dessus. Il regrette tellement de ne pas être rentré sagement chez lui. Sa curiosité le perdra. Mais ce qui importe, c’est comment se sortir de ce pétrin en un seul morceau.
Il jette rapidement un coup d’œil dans son dos et voit au moins 7 agents à sa poursuite. Ils ne ralentissent pas, gagnant du terrain, tout en hurlant des sommations. Ils ont tous une arme à la main et Shawn prie pour qu’ils n’en fassent pas usage. Il a eu de la chance contre Sidi (le chef de gang) la dernière fois. Mais il n’est pas sûr de pouvoir reproduire cet exploit, surtout face à sept hommes.
L’étudiant se demande dans quoi il a mis les pieds. Leurs réactions sont assez surprenantes, alors qu’ils n’ont aucune preuve, qu’il ait le moindre rapport avec leur enquête. Ou alors, ils en savent plus long sur lui qu’il ne le pense.
Shawn continue à courir mais commence à faiblir légèrement. Il se maudit, en se disant qu’il aurait dû suivre de façon plus soutenue les cours d’athlétisme au lycée. Au lieu de jouer les feignants. Ça l’aurait bien aidé dans cette situation.
Il entend un crissement de pneus derrière lui, il jette un rapide coup d’œil et voit une voiture noire qui fonce droit sur lui.
- Putain, ils ont mis les moyens ! Ils ne rigolent pas.
Shawn coupe à droite dans une autre ruelle et se rend compte au bout de quelques mètres qu’elle s’achève sur une impasse avec un mur, très haut. Sa pire crainte est devenue réalité. Il n’en revient pas de sa malchance. Il s’arrête et pousse un juron en tapant rageusement sur le mur. Shawn sait qu’il est piégé, il n’aura jamais assez de temps pour faire demi-tour. Il entend des bruits de pas et commence à apercevoir des ombres, se dirigeant vers lui. Il essaye de réfléchir, de trouver une solution mais rien ne lui vient. Il est piégé comme un rat et c’est une sensation très désagréable.
Soudain il se souvient de son pouvoir, celui qui lui a permis de voler. Il ferme les yeux et prie pour que cela fonctionne à nouveau. Il met ses paumes verticalement et attend. Rien ne se produit. Il respire très fort, voyant déjà sa photo sur la première page d’un journal. Il a agressé un agent fédéral et a des troubles obsessionnels d’après son médecin. Son compte est bon. On ne va pas hésiter à lui enfiler une camisole de force et à jeter la clef.
La panique s’empare de lui, il recommence à mettre ses paumes contre le sol, espérant un miracle. Et soudain, sans crier gare, il lévite au-dessus du sol et réussit à passer par-dessus le mur haut de plus de 4 mètres sans que personne ne le remarque. Il se retient de pousser un cri de surprise et atterrit lentement de l’autre coté du mur. Il s’agit d’un vaste espace vert et le lieu semble désert. Shawn regarde ses mains qui ont encore leur teinte rouge.
Le jeune homme ne demande pas son reste et s’empresse de courir à nouveau. Il souhaite mettre le plus de distance possible entre lui et ce lieu. Le garçon sent toutes ses forces revenir d’un coup, trop heureux d’avoir pu se sortir de cette situation qui semblait sans issue. Il n’arrive pas à croire qu’il ait pu s’en sortir sans dommage. L’individu qui l’a interpellé a sans doute vu son visage, mais Shawn est sûr qu’il aura du mal à pouvoir l’identifier en raison de l’obscurité.
Arrivés au bout de la rue, les agents n’arrivent pas à le croire. Ils regardent à droite et à gauche, dans les bennes à ordures, mais ne trouvent pas la moindre trace de leur suspect. Alors qu’ils pensaient qu’il était piégé. La situation les dépasse et ils ne voient pas comment il a pu sauter un mur d’une telle hauteur, surtout en si peu de temps.
Un agent avec les cheveux roux parle avec un de ses partenaires, un homme au regard tiré.
- Ce n’est pas possible. Je n’y comprends plus rien dit le roux du nom de Parker.
- C’est sans doute l’un d’entre eux dit son coéquipier du nom de Kenny.
- En tout cas, ce qui est sûr. C’est que le boss va nous tuer.
Les deux agents se regardent et poussent un long soupir. Ils savent que le pire est à venir.
Leur patron déteste les échecs et les responsables sont punis sévèrement.
De son coté. Après avoir parcouru près de deux kilomètres, Shawn ralentit l’allure. Il se permet une petite pause pour reprendre son souffle et se remettre de ses émotions. Il a conscience qu’il n’est pas passé loin de la catastrophe. Le pire dans cette histoire, c’est que ce risque n’a servi à rien, il n’est pas plus avancé dans son enquête. Il se rapproche de la faculté et soudain il ressent quelque chose au fond de lui, quelque chose d’étrange, comme s’il était en danger. Une bouffée de chaleur l’envahit, ses paumes deviennent moites. Il les regarde et ses mains tremblent sans qu’il ne puisse l’empêcher. C’est une sensation assez inconfortable, qu’il n’arrive pas à expliquer.
Shawn entend du bruit derrière lui, se retourne, sur le qui vive et voit des brindilles de feuilles bouger à quelques mètres de lui.
Il a l’impression qu’on l’observe, qu’on le surveille, qu’on s’amuse avec lui. Ne supportant plus ce silence, il finit par dire :
- Qui que vous soyez, montrez-vous, maintenant !
Shawn fait un mouvement du bras, prêt à envoyer un projectile enflammé en cas d’attaque. Mais personne ne se montre. Il plisse les yeux, essayant de mieux voir à travers la pénombre mais il n’aperçoit toujours rien.
L’étudiant décide de ne pas s’éterniser, se disant qu’il a peut-être rêvé. Il est très surmené en ce moment et il pourrait très bien paniquer pour rien. Tout ce qu’il souhaite, c’est rentrer dans sa chambre universitaire et de dormir pendant des jours. Rien de mieux qu’une bonne nuit de sommeil.
De retour sur les ruines, les agents Parker et Kenny se dirigent vers une petite camionnette de couleur blanche. Elle parait tout ce qu’il y’a de plus banal, aucune inscription ne se trouve dessus. Kenny frappe à la porte, celle-ci s’ouvre à la volée et Cross en sort, l’air énervé. Il regarde d’un air médisant les deux jeunes agents lorsqu’il remarque qu’ils reviennent les mains vides. Les yeux fermés, il pousse un long soupir, consterné au plus haut point. Il a l’impression de n’être entouré que d’incapables, ils ne comprennent pas que le danger est réel.
- Je n’ai pas de temps à perdre alors dites-moi de façon claire et précise, où en est la situation ? demande Cross, d’une voix agressive.
- Nous n’avons toujours rien trouvé sur le site dit Parker.
- Je ne parle pas de cette situation, crétin ! s’exclame Cross, exacerbé.
- Il a réussi à s’échapper dit Kenny, gravement.
- Comment est ce possible ? Vous êtes normalement les meilleurs. Est-ce que je me suis trompé en vous engageant ?
- Il était coincé dans une ruelle, nous allions lui tomber dessus mais il s’est volatilisé.
- Vous n’avez pas d’autre histoire à dormir debout.
- Nous pensons qu’il s’agit de l’un d’entre eux dit Kenny
Cross se tourne lentement vers lui et le fixe d’un long regard perçant. L’agent ne soutient pas le regard très longtemps et baisse les yeux rapidement, se sentant tout penaud.
- Vous n’avez aucune preuve, alors je vous conseille de vous taire.
- C’est juste un pressentiment.
- Je n’en ai rien à cirer de vos pressentiments. Dégagez d’ici sinon je vais finir par faire un massacre crie Cross, avant de refermer la porte de la camionnette au nez des deux hommes.
Les agents Kenny et Parker s’empressent de partir sans demander leur reste. Ils sont assez étonnés, s’attendant à recevoir un blâme ou pire.
Cross bouille intérieurement, il était à deux doigts d’en capturer un et ses agents se sont montrer incapables. Il sait que l’agent Kenny a raison, mais il n’allait pas lui faire ce plaisir. Le directeur du CAS regarde par la fenêtre les restes du gymnase, espérant découvrir quelque chose d’utile. Mais plus le temps passe et plus, il se dit qu’il perd son temps. Mais par contre, une chose est sûr, il ne quittera pas cette ville.
Tout a débuté à Chicago, il est normal que tout se termine ici. Il aurait dû y penser plus tôt. Il est sûr que le jeu vient de débuter et il compte bien être de la partie. Cross sait d’avance que cela va être terrible et qu’il y’aura des morts. Mais il est préparé à toute éventualité et meurt d’envie que ses cibles apprennent sa présence. Qu’elles le craignent. Et elles auraient raison car il ne s’arrêtera pas, pas avant de les avoir toutes exterminées. Il le doit à son père, il lui en a fait la promesse et Cross est un homme de parole.
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