Chapitre 2
Quand Margot me réveilla, je mis plusieurs secondes à comprendre où j’étais. Quand tout me revint en mémoire, je bondis sur mes pieds et m’habillais aussitôt. Margot avait posé mes affaires au pied de mon matelas. Une fois prête, je tournais le regard vers le lit et remarquais que Véra était aussi réveillée. Je voulus ouvrir la penderie pour lui choisir une tenue, mais elle ordonna à Margot d’aller remplir une carafe d’eau, nous laissant seules.
— Approche Élia, dit-elle en tapotant son lit pour que je m’y assoie. J’ai apprécié que tu détournes le regard hier pendant que je me changeais.
— C’est normal, Ma dame.
— Non. N’importe qui à ta place aurait regardé.
— Parce que vous êtes l’Impératrice? osais-je demander
— Exactement, répondit-elle avec un sourire. Dis-moi, la chanson que tu as murmurée cette nuit, c’était quoi ?
— Vous ai-je réveillée, Ma dame? m’inquiétais-je alors
— Non au contraire. J’ai réussi à me rendormir en t’écoutant. Alors, d’où vient-elle
— Ma mère me la chantait tous les soirs avant de m’endormir, mentis-je. Elle… elle faisait tout pour que je ne manque de rien.
— Est-ce qu’elle est morte ?
— Non ma dame. Elle travaille pour le duc qui m’as offerte à vous hier.
Elle replia ses longues jambes découvertes et attrapa mes mains dans les siennes. À son contact, j’eus un léger mouvement de recul.
— Que faisais-tu avant d’arriver ici ?
— Je travaillais pour le Duc dans son auberge.
— C’est pour ça que tu savais comment préparer ma chambre ?
— Oui Ma dame.
— Est-ce que ta mère sait que tu es ici ?
— Je ne pense pas, Ma dame. Nous sommes partis si précipitamment.
— Dans cette caisse ?
— Oui, Ma dame.
— J’enverrais un message à ta mère pour lui dire que tu es ici, qu’elle ne s’inquiète pas.
— Merci Majesté.
— Je ne vois pas beaucoup ma mère depuis que je suis montée sur le trône à dix-huit ans. Elle aimait être Impératrice mais la santé de ma grand-mère s’est détériorer. Elle as préférer me laisser le trône pour pouvoir s’occuper d’elle. Depuis ce jour, c’est Margot qui veille sur moi. C’est ma mère qui là choisie.
— Pourquoi dormez-vous dans le même lit alors ?
Ses yeux s’écarquillèrent de surprise. Étais-je allé trop loin en posant cette question ? Je baissai les yeux pour regarder ses mains douces, sans défauts dans les miennes.
— Tu ne connais décidément rien à la Cour, n’est-ce pas ?
— Non, Ma dame.
— Eh bien, pour répondre à ta question, il est conseillé à une Impératrice de ne pas dormir seule, au cas où il y aurait des tentatives d’assassinat. Margot est ma dame de chambre et toi ma demoiselle de chambre. Je crois que cet conseil a été mis en place à cause de ce qui est arriver à ma grand-mère. Mais je ne sais pas quoi. Est-ce que tu vois la différence ?
— Oui, Ma dame.
— On te prenant sous mon aile, je fonde beaucoup d’espérance sur toi. Si tu parviens à satisfaire mes espérances, tu seras récompensée.
— Comment dois-je y parvenir, Ma dame ?
— Écoute attentivement tous les conseils que Margot te donnera. Elle travaille ici depuis que je suis née.
— Je ne vous décevrai pas, Ma dame.
— J’espère bien. Va donc prendre une douche avant que Margot ne revienne.
— Merci, Ma dame.
Très rapidement, je pris ma douche, dans la salle de bain de l’Impératrice et me rhabillais. Quand Margot revint avec la carafe d’eau, je rangeais les bougies usagers pour en mettre de nouvelles. Margot habilla Véra et je notais attentivement la moindre étape dans ma tête. Dès qu’elle eût fini, je m’occupai aussitôt de refaire le lit.
— Qu’avez-vous de prévu aujourd’hui, Ma dame? l’interrogea Margot
— J’ai plusieurs réunions avec des ministres. Élia, j’aimerais que tu ailles cueillir des fleurs dans la serre pour décorer la chambre.
— Oui, Ma dame.
— Tu nous rejoindras après dans la salle Impérial. Demandes ton chemin aux gardes si tu te perds.
— Bien, Ma dame.
Comme elle me l’avait demandé, je sortis de la chambre pour rejoindre les jardins Impériaux. Il y avait plus d’une centaine de fleurs différente, j’avais le choix. Pendant une demi-heure, je composai plusieurs bouquets différents. Ma mère m’avait appris comment associer les couleurs pour créer un beau bouquet. Remarquant une jolie rose, je la cueillis aussi, mais ne l’ajoutais à aucun bouquet.
Ayant une bonne orientation, je retrouvai facilement mon chemin jusqu’à la chambre. De chaque côté du lit, je disposai un bouquet et les autres un peu partout dans la chambre. Je plaçai la rose sous l’oreille de Sa Majesté. Par ses produits de beauté et son parfum, j’avais compris qu’elle aimait l’odeur de la rose.
Une fois fini, je demandai mon chemin et rejoignis Véra et Margot dans la salle impérial. Quand elle me vit, Margot m’installa à droite du trône, place de la demoiselle de chambre. Pendant toute la matinée, j’écoutais distraitement ce qu’il se disait, ne comprenant rien.
Quand l’heure de manger arriva enfin, j’aidais Margot et d’autres femmes à mettre en place la table et à transporter les plateaux, replis de nourriture. Je m’assis ensuite à table, toujours à droite et commençais à manger dès que la Reine fut servie.
— Élia, parle-moi un peu de toi, m’interrogea-t-elle.
— De quoi voulez-vous que je parle, Ma dame ?
— Est-ce que tu as de la famille ? Un frère ou une sœur peut-être.
— Non, Ma dame, mentis-je. Je n’ai que ma mère.
— Pas de père ?
— Non, Ma dame. Il est mort quelques années après ma naissance. Je ne l’ai pas connu.
— C’est dommage. Dis-moi Élia, sais-tu danser ?
— Oui, Ma dame. Je connais toutes les danses, même celle de la Cour.
— Qui te les apprit ?
— Une amie, mentis-je alors que c’était ma sœur.
— Parfait ! Il y a un bal dans une semaine et j’aimerais que tu y participes. Si ça ne te dérange pas, j’aimerais te trouver un partenaire de danse.
— Ça ne me dérange pas.
Je finis le repas en silence, pendant qu’elle discutait avec Margot, repassant en boucle mes souvenirs avec ma sœur. Elle avait veillé sur moi pendant seize ans, avant d’être subitement sortie de ma vie il y a deux mois. Deux mois que je vivais sans elle, perdue au fin fond mon propre cœur, vidé de tout espoir. Mais aujourd’hui, j’avais enfin une nouvelle raison de vivre, celle de satisfaire l’Impératrice. Même si je n’avais pas choisi d’être là, ma vie reprenait enfin un sens. Vers seize heures, un jeune homme entra dans la salle impérial et Véra se leva, attrapa mon poignet et me tira jusqu’à lui.
— Marcus, commença-t-elle, je te présente Élia, ma demoiselle de chambre. Élia, je te présente Marcus, mon cousin et Prince de Carandis. Vous serez tous les deux partenaires pour le bal de la semaine prochaine. Tu as le reste de l’après-midi de libre pour discuter avec lui.
— Merci, Ma dame.
Galant, il me tendit son bras pour que je le prenne. En silence, on marcha jusqu’aux jardins.
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