un artiste

2 minutes de lecture

- Pour moi les 900 sont une catastrophe. Sous des airs de mesure sociale, c’est juste du fascisme masqué. Imaginez qu’au début, dans les années 2000 nous pouvions nous en sortir en donnant une cinquantaine de représentations par an. Peu à peu, le statut s’est dégradé. Les 900 c’est juste l’aboutissement des constantes attaques contre les artistes en France. Nous avions un pays exceptionnel et unique au monde concernant la protection sociale des artistes. Maintenant, c’est comme partout, l’artiste, le vrai, celui qui fait de la création est voué à la pauvreté. La loi du marché a finalement repris le dessus, les libéraux de droites sont contents. Si tu veux être riche ou seulement vivre bien, il faut baisser la culotte. Obéir au désir du plus grand public. Il faut être au top 50, prix du public des lecteurs de Télérama, etc.

- Qu’est-ce qui a changé pour vous ?

- Pour certains c’était déjà dur avant les 900, mais après ils se sont retrouvés à la rue. Sans rien. Juste 900 euros pour vivre. Les cachets ont fondu. Tout un tas de gens qui faisaient de la musique dans leur salon le dimanche ont envahi les scènes. Ils se mettaient à temps partiel et faisaient de la scène pour à peine de quoi à couvrir leur frais. C’était n’importe quoi, les professionnels ont commencé à faire autre chose. Résultat, le vendredi soir, il y a des groupes plein les bars qui font des reprises ou leur propre compo de merde, et les pros ne jouent plus. Les festivals ont trouvé des petits groupes de bonne qualité pour combler leur scène, ont baissé les cachets des grosses pointures. Tout cela parce que le prix d’entrée des festivals a baissé. Plus de recette, plus de salaire. Tout est devenu amateur, ils trouvent des mecs qui leur font le son et les lumières presque gratos. C’est une catastrophe. Tout le monde veut faire quelque chose dans son temps libre, c’est une épidémie. Ils sont prêts à se prostituer pour monter sur une scène, faire la lumière d’un grand concert, le son d’un artiste qui leur plait. Leur récompense c’est de dire « l’année dernière j’ai bossé sur la lumière des concerts de U2 ». Le fric, ils s’en foutent. C’est la nouvelle mentalité ! Toutes sortes de raisons pour bosser gratos. Au final, les pros ont disparu à 90 pour cent. Si tu veux organiser un concert, tu vas sur un site internet et s’offrent des milliers de bénévoles, avec diplôme et expérience, qui ne demandent presque rien pour faire le son, monter la scène, faire la sécurité, etc.. Du moment qu’ils aient une place gratuite au prochain concert, qu’ils puissent voir leur artiste préféré, et leur frais payés, ça leur suffit !

- Alors comment faites-vous maintenant ?

- Ben je trouve encore quelque concert et je travaille en intérim dans des restaurants. Guitariste serveur ! Voilà ce que je fais… En moyenne je tape mes 2000 euros par mois les 900 inclus. Je fais dix fois moins de guitare, on répète crevé dans l’urgence. Je n’ai pas composé depuis des mois. Pour les artistes, c’est fini la fête !

- Que pourriez-vous améliorer ?

- Rien, cette société refuse toute contestation. Les artistes dénoncent, ils sont dangereux, ils sont trop libres… Alors on les affame, on les remplace par des bidochons, on fait en sorte qu’ils ferment leur gueule. Il n’y a rien à faire contre le conformisme...

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire philippemoi ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0