43. L'interrupteur est au sous-sol

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"Quel est le parasite le plus résistant : une bactérie, un virus, un ver intestinal ?...

Une idée."
Inception

Après plusieurs mois d'engagement dans deux thérapies chamano-coachées en parallèle et malgré quelques actes manqués qui traduisaient mon relatif manque d'enthousiasme envers tout type de suivi psy (oui je vous pointe du doigt, oublis de rendez-vous et honteux retards, je ne suis pas dupe), j'étais assez contente du résultat. J'avais bien incisé dans mon dedans, autopsié mes sentiments putréfiés et disséqué mes ancrages nocifs. Well done ! Il y avait de l'optimisme dans l'air et ça sentait moins les émotions refoulées à l'intérieur (une odeur de moisi, pour info).

Le chantier bien-être émotionnel était enfin entamé et je travaillais à la refonte de mes représentations, raisonnements et attentes. Présentement, je pense que c'est le travail d'une vie, l'agriculture de la pensée positive. Ce n'est pas quelque chose qu'on obtient un jour et que l'on peut garder avec soi par la suite. Nan, cela demande des efforts constants et réguliers et j'y prête plus attention. Mais au delà de ce souhaitable accomplissement, j'avais un objectif un peu plus précis. Parce qu'être heureux et optimiste c'est chouette et tout et tout, mais si t'es mort, ça ne sert pas à grand-chose. Alors idéalement, il fallait intégrer la culture des pensées positives à mon plan "contenir le plus longtemps possible". Traduction : je devais croire que j'allais y arriver.

Il fallait y croire.

Croire.

...

Punaise, grosse grosse difficulté pour moi.

Mon cerveau, ma volonté, mon envie d'y croire étaient alignés, mais pas mes tripes. C'était comme réciter une leçon apprise par cœur à la différence de chanter sa propre composition. Donc, j'ai décidé qu'il fallait encore pousser, gratter un peu plus, et que je devais me persuader moi-même, jusqu'au fin fond de mes boyaux. J'ai bien réfléchi à comment y arriver et je me suis dit que le mieux, c'était de me prendre à revers. En traître, avec une approche inédite. Du coup, je suis allée voir une hypnothérapeute. Parce que si la nana, elle arrive à convaincre des gens d'arrêter de fumer, d'arrêter de manger du chocolat et du saucisson, elle pouvait aussi m'aider à arrêter de douter, non ? Je n'attendais pas vraiment de miracle, mais bon, je me suis promis de tout essayer pour contenir au mieux, et je n'étais plus à cela près.

L'hypnothérapeute m'a expliqué que la technique de la suggestion ne fonctionne que si l'on a bien préparé le terrain auparavant, il faut vraiment être décidé. OK, pas de soucis pour ça, rien ne me motive plus que vivre. Il fallait aussi que je prépare une phrase simple, en formulation positive, car le cerveau sous hypnose ne comprend pas la négation.

Si tu lui dis "ne fume pas", lui il entend fume.

Si tu lui dis "arrête de manger", il entend manger.

C'est un peu simplet, un cerveau sous hypnose. Il faut l'imaginer comme si c'était Groot. Sympa, mais pas super évolué au niveau langage.

Alors je suis allée droit au but et j'ai préparé une phrase toute bête, une affirmation élémentaire ultra positive. Une formule un peu choc à laquelle je n'étais pas sûre de croire au niveau conscient, mais que diable ! Des fois je suis joueuse comme ça. Allez, j'allais me faire une petite blague à moi-même. Je pensais la déposer à l'intérieur, comme un petit mot qu'on glisse sous la porte, ou la refiler à mon enfant intérieur, car justement on avait parlé de ça avec le médecin chamane. Alors, si j'avais l'occasion de lui faire un petit coucou, c'était plus cool.

Donc quand l'hypnothérapeute m'a indiqué que c'était le moment de me communiquer mon message à moi-même, je me suis visualisée avec ce petit mot comme prévu. Parce que j'étais bien bien consciente de tout ce qui se passait, en parfaite maîtrise de mon corps et de mes pensées, et en train de me dire que l'hypnose, ça ne le faisait pas du tout pour moi. Je n'étais pas réceptive. Prévisible.

Mais là, il n'y a pas eu de porte et il n'y a pas eu de bambin. Mon message était maintenant une boule, mon personnage enfantin une ombre, et on était au sous-sol. A l'étage le plus bas de moi-même. Je lui ai donné la sphère en lui répétant lentement la phrase, plusieurs fois, c'était important qu'elle la comprenne vraiment bien. Elle a pris l'espèce de boule de pétanque, qui s'est mise à briller de plus en plus fort. L'ombre s'est enflammée façon Torchman et tout s'est allumé. Voilà, j'étais un peu bébête et désorientée, comme lorsqu'on sait qu'on rêve mais que l'on ne se réveille pas.

Puis, j'ai suivi les indications de l'hypnothérapeute pour aller dans un endroit où je me sentais bien, histoire de faire comme un petit streching du cerveau Grootien pour clôturer la séance.

Ben finalement, je dois être réceptive à l'hypnose. Je me fabrique mes propres petits scénarios du tonnerre, mieux qu'une usine à rêves, et ça l'a carrément fait pour moi. J'avais l'impression de sentir le poids de la boule dans mon ventre, dans mes tripes, à la fin du rendez-vous. Depuis, j'ai refait quelques séances de consolidation et l'hypnothérapeute m'a guidée pour reproduire la séquence à la maison tranquillou sur mon transat de jardin dis donc. Il m'est arrivé de revoir mon ombre enflammée, certainement parce que j'en avais envie, et des fois d'autres choses que mon inconscient m'envoie en guise de récepteur.

Je suis donc officiellement rentrée dans le club des illuminés, avec ceux qui se sont fait enlever par des extra-terrestres, ceux qui ont croisé Jésus "ouais il est super sympa, on a pris un thé vert ensemble" et celles qui t'assurent que les crèmes amincissantes, ça fonctionne. Eh bien si mon cerveau Grootien a choisi de communiquer avec moi par personnages bizarres interposés, je m'en fous et je suis hyper preneuse. Aux jaloux qui veulent leur propre Torchman : il/elle est à moi, mais je peux envisager un prêt ou une location.

En tout cas, à partir de là, ce "il faut y croire, madame B." que me lançait mon oncologue à chaque conclusion de nos rencontres et qui me laissait amère et dubitative, prit un tout nouveau sens. Car j'avais très littéralement planté une putain de graine en moi. Je m'étais inceptionnée. Cette pousse de certitude s'est enracinée aussi vite et efficacement que du chiendent ou de la cellulite au Nutella et elle a si bien intégré le circuit cerveau-coeur-tripes que je ne sais plus vraiment si ma résolution vient d'en haut ou d'en bas.

Je ne crois pas en Dieu, en un être suprême, en la réincarnation ou aux anges gardiens. J'aimerais bien, ça serait chouette. Cela viendra peut-être. Mais je crois à l'auto-suggestion et à la détermination, je crois qu'il y a des bons moments aux bons endroits, même et surtout avec les avancées médicales et que ça peut me tomber dessus. Je crois que dans tous les possibles et les univers à venir, la loi de Murphy n'est pas une fatalité. Et punaise, je crois en mes tripes.

Enfin, pour clôturer ce chapitre, j'invite tous les sceptiques à regarder le clip de Hooked on a Feeling version David Hasseloff pour méditer sur la notion de foi et de croyance et passer trois minutes et trente et une secondes d'émerveillement.

Il ne faut pas se fixer de limites.

Il faut y croire.

Il faut oser.

Car si David Mitch Buchannon Hasselhoff a cru qu'il était un chanteur, il n'y a plus de limites à rien, n'est ce pas ?

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