Promesses mesquines

Une minute de lecture

On a plié sa tendre nature

Aux exigences apolloniennes,

On l’a jetée aux dieux en pâture

Comme on jette un gigot à des hyènes.

On lui a assuré que l’ivresse

Existait en dehors des tavernes

Parce que la plus pure allégresse

N’était jamais celle du Falerne.

On lui a juré qu’être amoureuse

Signifiait marcher jambes en l’air

Et que la seule passion vertueuse

Etait la grossesse oraculaire.

On lui a dit que la seule voie

Qui lui avait été insufflée

Etait de sagement donner voix

Aux vains vers qui lui étaient soufflés.

On lui a fait savoir que ce souffle

Transmettait un divin plaidoyer

Auquel son âme, comme un écoufle,

Ne pouvait que se laisser ployer.

On lui a peint la métamorphose

Qui logerait dans son cœur austère

De la musique avant toute chose

Pourvu qu’elle ne fît pas d’impair.

On lui a promis la vérité

Loin du monde et de ses balivernes

Mais c’est sa propre ombre dépitée

Qu’elle voit danser sur la caverne.

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