070 - Dimanche 10 Janvier
Je suis reçue comme le Pape à Votre Dame en Principauté. La Reine Frances est là et on me place à sa droite. Je suis adoubée par la Couronne et on me remet l’Ordre des Compagnes d’Honneur, une médaille rouge à tirets dorés. Je la reconnais. Je l’ai déjà vue sur la tenue de Adé et Nathalie. Après la cérémonie je demande conseil à ma belle :
- Isa, c’est quoi cette Couronne sans Royaume, ces Reines démissionnaires et cette Principauté sans Princesse ?
- C’est au cas où la spiritualité ne fonctionne plus, que la politique échoue, que la science disparaisse, que la technologie s’oublie. C’est pour qu’il nous reste quelque chose à suivre. Une autorité de secours.
Pauvre Clémence. Elle a tout le poids de cet héritage qui l’attend, en plus de celui de Victoria. Votre Dame est démesurée. Même Sainte-Claire fera petite à côté. Mais ce sera une Cathédrale au centre de la civilisation 4, à Sylvania, sur le Jordania, ça a plus de sens qu’ici. Clémence va replacer la Couronne au centre de l’Humanité, durant notre ère à nous. Et avec moi de leur côté, ça a plus de chances de se réaliser. Je passe devant un grand miroir, je regarde ma nouvelle médaille, et puis moi en entière. Je repense à ma mère, elle est si belle. Je peux être comme elle. Elle me donne envie de maigrir, d’avoir son charme. Mais je m’aime comme je suis, et on m’aime comme je suis. Il est temps de partir. Si on reste l’après-midi ici, ça risque de dégénérer. On est dimanche. On est invitées au repas dominical chez Aline, de quoi décompresser de tout ce protocole. Après manger on fait une promenade digestive dans la neige jusqu’au chantier de la Cathédrale. Elle est comme éteinte. Il n’y a aucune âme dans ces pierres. Il manque une dynamique, des architectes, des ingénieures. Il faut que je réussisse là où Adé a échoué. C’est moi qui pense ça ? Moi, la grande perdante. Non, je pense plutôt que c’est Paloma XVI qui se révèle, la fille de Abigaëlle qui se réveille. Et on rentre au chaud se faire un gros câlin autour du ventre de Aline, pour faire sentir à Émeline qu’on l’aime et qu’on s’aime toutes et tous dans ce monde à venir pour elle. Justement, on a un cadeau pour elles, on installe un minibri en Aline, il se connecte avec les nôtres et Willem se sent bien seul et inutile avec sa semence qui n’a plus nulle part où aller. Heureusement, car elle a ce pouvoir étrange d’éliminer la concurrence. Sans doute un dernier cri de l’évolution chez ces garçons voués à disparaître de notre civilisation et des prochaines aussi. Il finit par sortir de la couche aussi et nous laisse sur son Aline sur laquelle nous nous vouons à ses seins et à son lait magique, celui-là même à l’origine de l’existence de ma mère. La boucle est bouclée, je me nourris à mon tour du fluide de la vie et de l’Invisible.
Annotations