141 - valeur absolue de 4
Sharon est en traitement à l’Hôpital. On va la voir avec Jules. Big est là pour nous expliquer :
- On a ressorti la technologie de vos ancêtres pour remettre de l’ordre dans son cerveau torturé. Et pour faire le deuil de sa mortalité et de la mort de sa famille, on lui injecte du savoir sur la vie quotidienne ici, sur qui on est et où en est notre civilisation, on va même la faire parler en français, comme nous tous, histoire de lui faire sentir qu’elle doit vraiment se préparer à une autre vie ici. Mais tout va bien. Elle était conditionnée pour une mission difficile, alors tout rentre comme dans du beurre. Pour le reste, elle accepte tout comme si elle était dans une vie après la mort, comme dans sa religion de l’époque, quoi que, elle était plus protestante que catholique. Mais bon. En fait, elle est très courageuse, très forte. Je l’ai vu pleurer devant les images de ses parents sur le pas de tir, sur ses élèves en pleurs. Et je vous parle pas de son mari et de ses enfants, jeunes à l’époque aussi. C’était bouleversant. Mais elle accepte tout ça. C’est dingue. Paloma, elle veut te parler.
On me fait rentrer dans sa chambre. Elle n’a pas encore changé. Il faut un peu de temps avant que les forces telluriques de notre planète fassent effet. Je demande si on peut sortir, dehors, dans le jardin. Après vérification de ses constantes et de sa bio, on a l’accord. On va s’asseoir sur un banc dans la cour intérieure près d’un arbre où un oiseau chante. Elle me regarde avec douceur, elle a l’air paisible, calme. Elle me prend la main et reste muette.
- Sharon, moi aussi j’ai eu un changement de vie dans ce monde. Avant je n’étais pas importante du tout. Mais j’étais heureuse, dans ma petite vie, avec mon fils. Et je faisais le même métier que toi. Pour des plus petits. J’étais institutrice. Et d’un coup j’ai été aspirée par des autorités spirituelles et leurs cultes. Mon fils aussi, et il a grandi, et il est parti. Alors depuis je me réfugie dans l’Amour. J’en reçois plein et j’en donne beaucoup. C’est comme une respiration. Respirons ensemble.
Elle n’a pas besoin de parler, j’entends tout ce qu’elle ressent et ça lui fait du bien d’être avec moi. Pourquoi ? Pourquoi moi ?
- J’ai remarqué ta croix autour de ton cou la première fois qu’on s’est vues. Elle a un peu changé. On dirait un 4. C’est ton interprétation à toi de tout ça. Il faut que je me trouve un symbole aussi.
- Pas la peine Sharon.
J’enlève mon collier et je lui mets autour du cou. Elle prend le 4 dans sa main et le serre en inspirant et en fermant les yeux. Elle souffle, soulagée.
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