162 - une par une
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Je regarde la belle enveloppe au nom de Jules I.A. Je finis par trouver la boîte aux lettres dans un buisson devant la maison familiale. Il doit y avoir un capteur quelque part parce que je suis tout de suite repérée. Lily me fait coucou depuis la fenêtre de la cuisine. Elle me fait signe de venir. Bisou. Et on s’installe en cuisine. Tout est calme. Personne n’est encore levée. Lily attend que je parle.
- Tu viens de rentrer ?
- Je rentre avant que le jour apparaisse, comme les vampires.
- J’arrête d’écrire dès qu’il y a trop de lumière. Cette nuit j’ai écris une lettre pour Jules. Je suis venu la poster. Elle n’est pas obligée de la trouver tout de suite. C’est intemporel. Un message perdu entre le passé et l’avenir. C’est ma deuxième lettre. Une par jour. Tu en auras une aussi un jour, forcément Lily. J’écris à toutes celles qui comptent, pour moi.
- Tu as enfin un sujet à écrire alors. Un concept. Et c’est original, c’est pas du Megan H. Tu ne t’adresses pas à tout le monde, juste à quelques unes, une par une. Tu ne veux pas être lue par toutes. Tu veux d’une lecture intime, personnalisée, spécialisée, précise, qui a du sens. Tu n’as pas de leçons à donner à la civilisation. C’est comme une anti Bible. Tu es bien la fille de l’antéchrist de la planète 3.
- Ma Déesse ! Tu n’as pas besoin de pouvoir pour lire dans l’Invisible. C’est peut-être pour ça que je n’ai jamais réussi à lire la B4.
- Tu n’as jamais réussi à lire quoi que ce soit, Paloma.
- Merci. Ainsi ma littérature est originale et rare, précieuse, privée, presque secrète, anonyme. C’est tout moi. J’ai trouvé mon style.
- Et comment ça va avec ton Isabelle ?
- Et comment ça va avec ton William ?
- Ils nous définissent en tant que couple. Mais, on garde notre identité.
Je m’approche tout près d’elle pour ne pas le dire à voix haute :
- Et Lily, quelle est ton identité ?
Elle me fait un bisou. Je lui rend en lui caressant la joue. C’est à elle de parler mais elle ne dit rien. Il n’y a pas de mot. Juste son regard. Et…
- Je suis Lily la nuit. Mais en plein jour, je t’aime bien, Paloma. Mais c’est normal, tu es belle, irrésistible même. Je pense souvent à ce qui s’est passé, dans la serre. Ça remet beaucoup de choses en question, chez moi, en moi.
- Faut pas. Cherche pas. Tu es Lily, madame William, maman de Jules, entre autres. Je suis désolée de t’avoir troublée à ce point. Reste comme tu es. Reste qui tu es. C’est comme ça qu’on t’aime.
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