166 - seconde
Quand on sort du restaurant du père de Jules, je l’aperçois appuyée sur la rambarde de la plage. Elle tourne le visage, c’est bien elle, dans une robe légère. Je laisse Isa et je vais me positionner à côté d’elle :
- Les agentes sont censées être discrètes.
- J’ai fini. Je suis sur la Base maintenant.
- J’ai adoré. C’est toujours aussi bien ?
- C’est horrible. Il fait froid dans les hangar, chaud sur le tarmac, il y a tout le temps du bruit, ça pue l’huile de moteur.
- Et les aviateurs ?
- Il n’y en a plus. Que des filles. Elles sont formidables. Intelligentes, bienveillantes, courageuses, belles. Le rêve.
Elle me regarde, éblouie par la lumière, elle essaie de sourire. Elle est belle avec sa bouche pulpeuse, ses petits seins pointus et je me souviens de ses grands yeux ronds vert foncé. Je m’approche pour lui faire de l’ombre et je les découvre à nouveau. Je ressens comme un vertige tellement son âme a l’air belle et profonde. Je ne sais plus quoi dire. C’est à elle de parler.
- Après on va à l’Agence. Tu m’emmènera dans l’espace ?
- C’est plus ton truc que le mien, c’est évident. Je vais faire un effort. Pour toi. J’ai pas le choix. Tu as l’air tellement… il n’y a pas de mot. Ou plutôt il y en a trop. Little a lot.
Ça la fait rire. Elle est trop. Du coup, surprise, on y va maintenant.
- Maintenant ? Dans l’espace ?
- J’ai une fusée toujours prête. Est ce que tu as mangé aujourd’hui ?
Pas le temps d’appréhender. On enfile les combinaisons, on prend les médicaments qui suppriment la peur et décollage. On se retrouve vite en apesanteur. Je me détache pour la libérer et on flotte, et on rit. Le contrôle nous demande si tout va bien. Je coupe la com et l’éclairage. Silence et nuit. On est juste éclairées de temps en temps par la lumière de la planète par le hublot du plancher. Je chuchote :
- C’est que ma deuxième fois. Au GC28, l’Agence était fermée. Je suis venue ici bien après, il y a peu de temps en fait, avec Brigitte. On est allé très loin. Ça va Little ? Parle-moi.
- Merci Paloma.
Je sens quelque-chose sur mes lèvres. La capsule pivote et on est éclairées à nouveau. Son visage est tout prêt. C’était un baiser ? Un voyant rouge s’allume. Je l’attrape pour la brêler à son siège. On redescend.
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