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De longues heures plus tard, alors que le soleil se levait, la marque sur son poignet recommença à le faire souffrir. Il s’était arrêté au bord d’un lac car il était épuisé, et avait momentanément désactivé l’Ipsa. Il était assis dans l’herbe et cherchait à arrêter le tourbillon de pensées qui le tourmentait. La douleur commençait à se propager insidieusement dans tout son corps. C’était mauvais signe car cela signifiait que les Chasseurs en avaient fini avec Sakura et Sei et pouvaient désormais s’occuper de lui. La sensation se renforça, prenant de l’ampleur. Il se courba et gémit. Il se produisit alors quelque chose d’étonnant. L’épée s’illumina et la silhouette revint. Elle apparut dans l’herbe, assise à côté de lui. Malgré sa souffrance, il sursauta. Elle l’observa un instant. Puis elle lui prit le poignet et la brûlure reflua, pour finalement cesser totalement. Elle retira sa main. Il regarda son poignet. La marque avait disparu. Il lança à la forme un regard éperdu de reconnaissance. Et il remarqua qu’à présent, elle était plus qu’une forme : elle avait une véritable apparence. Tout chez elle était dans des tons bleu et violet, de ses vêtements dont les éléments principaux étaient une robe et une longue cape à sa peau turquoise et ses cheveux cyan. Elle avait un visage fin dont les yeux vides ne comportaient ni pupille, ni iris, seulement le même bleu que son visage, mais ce détail ne faisait qu’accentuer l’étrange beauté qui la caractérisait au premier abord.
« Merci. commença-t-il. Mais… qui êtes-vous ? »
Elle eut un sourire. Elle répondit de sa voix claire :
« Mon nom est Vey. Je suis l’esprit qui réside dans cette épée, qui a pour nom ‘‘le Lys’’. Je suis liée pour toute la durée de sa vie au détenteur de cette épée, et pour l’éternité à sa famille. J’ai pour mission de l’aider et de le servir en tout. Afin de réussir en ceci, je dispose de nombre de connaissances et pouvoirs. En ces circonstances, je puis vous donner un premier conseil, maître : tenez mon existence la plus secrète possible, sans quoi vous attiserez la jalousie et le danger. »
Tōru réfléchit un moment à ces paroles, puis finit par déclarer :
« Merci de ton sage conseil. Mais cela me fait bizarre de me faire appeler maître.
- Je ne puis faire autrement.
- D’accord. Pourquoi mon père ne m’a-t-il jamais parlé de toi ?
- Il a suivi le premier conseil.
- Très juste. Si je comprends bien, tu as toujours été là et tu connais donc mon histoire.
- C’est cela.
- Ainsi, j’avais depuis toujours une présence amie près de moi et je l’ignorais.
- J’aurais aimé me manifester plus tôt, mais l’emprise de Nikita Senaviev était trop forte sur moi.
- C’est un homme puissant. commenta Tōru.
- Puissant et perverti par l’attrait du pouvoir.
- Vey, que vais-je faire à présent ?
- Je ne peux le prévoir, maître. Mais le mieux serait de vous rendre discrètement à Kalleos, sur les traces de votre passé. Après cela, vous aurez l’esprit plus clair pour décider.
- Et Sakura et Sei ?
- Ils ont été vaincus. Je suis désolée, maître. Mais ils sont encore en vie et en bonne santé. Ils demeurent en relative sécurité tant que les Chasseurs ne vous trouvent pas.
- Pourtant, je dois les libérer.
- Accomplissez les choses dans l’ordre, maître, c’est la meilleure des choses à faire. Mais sachez que votre temps est compté. Les Chasseurs jumeaux, Sergey et Pavel, sont lancés à votre suite.
- Je ferais mieux de repartir, dans ce cas. conclut Tōru, une note d’inquiétude dans la voix.
- Ne vous en faites pas, maître. Je veille sur vous. »
Il sourit, à moitié rassuré. Elle ajouta :
« Si vous le permettez, je vais me retirer.
- Bien sûr. »
Elle retourna dans l’épée. Puis Tōru se leva et rejoignit l’Ipsa. Il le réactiva et repartit.
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