Se justifier

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La douleur et la terreur apparaissent dans ses yeux tandis que du givre se forme autour de sa bouche. Les renforts sont arrivés. Oh Bon sang ! Il était temps ! Je lâche son entrejambe et j'envoie mon poing dans son estomac pour parvenir à m'éloigner de lui. L'un de mes amis me fait reculer à toute vitesse. Sûrement Gaëtan, j'ai senti du vent. Je me précipite vers Louis inconscient pour le relever avec l'aide de Gontran qui me regarde bizarrement.

Mes amis s'attaquent aux trois hommes et leur font subir des attaques d'une grande violence. Gontran nous téléporte Louis et moi à deux rues de là puis va chercher Arthur pour remettre sur pied Louis toujours inconscient et dont la tête saigne abondamment. Je pleure d'inquiétude en voyant mon ami dans cet état tout en stoppant de mon mieux l'hémorragie. Arthur arrive moins d'une minute après et se précipite pour soigner Louis du traumatisme crânien.

J'entends les bruits de la bataille qui fait rage à quelques mètres à peine. Je tremble de peur. Louis bien que sonné se concentre sur son fils et son épouse et parvient à ralentir le temps des assaillants à distance. Mushu les encercle de flammes et une odeur de cochon grillé se fait sentir. Nos amis prennent le dessus et les trois sorciers s'enfuient. Tout le groupe accourt et s'assure de notre santé. Arthur et Marie soutiennent Louis encore faible. Gaëtan m'entoure de ses bras. L'adrénaline retombée, je ne tiens plus sur mes jambes et mon visage baigné de larmes me brouille la vue. Nous rentrons à notre cachette.

À peine arrivés, Marie me tombe dessus et m'assaille de questions. Ludovic est aussi puissant que Louis. Les deux autres assaillants avaient un très bon niveau, celui de sorciers d'au moins deux cent cinquante ans. Comment ai-je pu survivre aussi longtemps ? Comment se fait-il que quand ils sont arrivés, aucun des trois ne s'occupait de Louis et tous étaient concentrés sur moi avec une mine effrayé et pourquoi le frère de Louis hurlait de douleur ?

Marie est hystérique. Son chéri est gravement blessé et a failli mourir. Elle suspecte à juste titre que c'est par mon odeur que Ludovic a pu nous retrouver et elle m'en veut, toute encore chamboulée par la peur qu'elle vient d'avoir pour son destiné. Elle me demande pourquoi je ne suis pas blessée alors que Louis a failli mourir? Comment une humaine est encore debout?

Ils sont tous suspicieux sauf ma choupinette. Même Arthur et Gaëtan qui ont toujours été bienveillants envers moi me regardent avec inquiétude. Bordel, je suis en état de choc. Je me mets à crier sur eux. On a failli crever Louis et moi. Pourquoi ils me regardent tous avec méfiance ? Je viens de sauver le cul de Louis et ils doutent de moi ?

Léa me prend le visage entre ses mains pour calmer ma colère qui arrive. Elle veut me faire comprendre, m'apaiser. Si je ne ma calme pas, cela va finir mal. Léa sait ma capacité dans ce genre de situation et elle a vu toute la scène mentalement. Elle pense que je dois laisser Marie et les autres voir mon souvenir. Ses mains sur mon visage font redescendre ma fureur, son inquiétude pour moi m'aide à réaliser l'état de nerfs que nous avons tous.

Léa m'explique que je dois les laisser voir comment j'ai tenu face à eux. Avec mon aplomb. Elle sait parce qu'elle me connaît depuis toujours, mais eux ne savent rien de moi. Elle me demande de me mettre à leur place et m'envoie leur inquiétude pas vis-à-vis de moi, mais leur peur de voir leurs amis blessés. Coccola me fait comprendre leur point de vue, combien la situation est invraisemblable pour eux. Une humaine qui a tenu tête à trois sorciers chevronnés. Alors, j'accepte, mais je rappelle à Louis que j'ai fait ça pour lui sauver les fesses, puis je cache ma honte sous une couverture.

Léa implore tout le monde de se calmer. Il faut que nous soyons tout ouverts d'esprit et compatissants envers les émotions des autres. Je la vois délivrer l'amour et la confiance qu'elle a en moi vers nos amis. Elle leur rappelle l'essentiel. Louis et moi sommes en vie. Peu importe comment j'ai fait mais nous sommes tombés dans un piège et nous sommes vivants. Léa les fait se poser et s'asseoir.

Marie pose sa main sur ma tempe et envoie les images du souvenir sur la Télévision. Je souris en entendant Léa proposer du pop-corn. Cette chipie va me le payer cher. Léa connaît la suite et se prépare d'avance à savourer le spectacle. Marie remonte un peu trop loin, mais l'évocation de Jessica la fait plutôt rire. Gontran hurle qu'il ne veut pas entendre quand c'est le moment où Louis me parle des dessous coquins achetés par Marie. Pour l'instant, tous rigolent et tout va bien.

L'atmosphère se détend un peu en retrouvant mes espiègleries habituelles. Ils répondent à mes moqueries avec humour et défendent Louis face à mes taquineries. Je tremble quand je vois qu'on se rapproche du moment fatidique. Je ferme les yeux et verse une larme à l'avance. Mes amis poussent un cri en voyant Louis se prendre la batte en pleine face. La violence de la scène fait couper la liaison quelques secondes, Marie éclatant en sanglots. La télévision reste en pause sur Louis étalé au sol et commençant à baigner dans son sang et de moi voyant les trois autres s'avançaient vers moi avec des mines patibulaires.

Léa intervient et explique que je me suis reliée à elle à ce moment-là. Elle fait les commentaires en évoquant les différentes émotions que je ressentais face à la scène. Elle leur explique la peur que j'avais, l'inquiétude pour Louis, mes réflexions à vitesse grand V et mon analyse rapide de la situation et de ce que je pensais être la meilleure solution pour nous sortir de ce pétrin Louis et moi.

Jouer une comédie pour gagner du temps et permettre aux autres de venir nous secourir. Léa leur fait part de mon cheminement mental et de mes conclusions. Ma stratégie pour que Louis et moi nous nous en sortions vivants. Faire patienter les sorciers le temps que les renforts arrivent via mon contact mental avec Léa. Elle leur explique mes intentions pour qu'ils ne me prennent pas pour une folle.

Arthur, et même Mushu comprennent et valident mon plan. Ils ont des mots plutôt sympas sur le fait que je ne me suis pas enfuie en courant pour tenter de sauver Louis. Ils me traitent de folle aussi, ce plan était hyper risqué et potentiellement mortel pour moi. Il n'était pas courageux mais insensé. Tellement incompréhensible que les sorciers ne pouvaient pas deviner mes intentions. Leurs propos de remerciements ainsi que ceux de Louis permettent de faire revenir le calme.

Marie revient et essuie ses larmes. Louis lui prend la main et fait un baisemain pour la rassurer, lui rappeler qu'il est là et en bonne santé. Marie se reconnecte à moi et l'image se remet à bouger. Marie confirme sentir la présence de Léa dans mon esprit à cet instant, mais elle ne peut expliquer comment. Le début est silencieux. Ils voient Ludovic renifler et ils comprennent que c'est effectivement de ma faute si les sorciers nous ont pisté. J'ai envie de pleurer. J'ai tout bien fait, je me suis parfumée, j'ai accepté le sort d’Inès, j'ai respecté leurs règles. Et pourtant , c'est par moi que Ludovic nous a retrouvé.

Je vois que mes amis m'en veulent. Je n'y suis pour rien et ils m'en veulent. Je sens la colère me submerger et j'ai envie d'arrêter là le film. Seul Léa et ses yeux remplis d'amour parviennent à me calmer et me laisser faire. Mon évocation de méchant infiltré ne les fait pas rire du tout. Dans ces temps de suspicion, tout est possible et déjà qu'ils se posent des questions sur les liens avec Léa et ma résistance à la magie de Marie...

J'entends des expressions de dégoût au moment où je me scarifie et lèche le sang qui perle sur ma peau. Ils commentent les réactions des trois sorciers face à mon attitude et reconnaissent que je suis déstabilisante. Pour eux, le ton de ma voix alors que je simule aimer le goût du sang est plus que dérangeant et ils se demandent où est la part de comédie et la part de vérité. Je m'enfonce sous ma couette et rêve d'un trou de souris pour me cacher. Puis Mushu éclate de rire en m'entendant l'évoquer et Marie met sur pause.

- Tu es totalement barge ou suicidaire, ma parole. Marie, mets nous la suite. Je veux savoir ce qui m'attend, ricane cette andouille.

Mon dieu quand il va savoir, je risque d'avoir des ennuis. J'espère qu'il comprendra que je bluffais. Léa leur détaille ma frousse intérieure alors qu'ils me voient tous m'avancer vers Ludovic. Ils entendent l'évocation de mon meurtre et de ma pseudo-prise de possession d'apparence et je les vois me regarder avec perplexité. Ils sursautent en apercevant mes ongles lacérer la peau du cou du vieux sorcier. Bon sang, en revoyant les images, je suis méga-flippante.

Mes amis commentent mon aplomb avec différents degrés d'acceptation. Les filles trouvent cela anormal. Les garçons sont choqués ou admiratifs. Léa se met à rire, connaissant la suite. Cette saleté ne m'aide absolument pas et m'enfonce encore plus. Elle leur dit que le meilleur moment arrive et que là, malgré ma terreur, j'ai pris beaucoup de plaisir. Je lui lance un coussin au visage pendant qu'elle se cache derrière Gaëtan. Pourquoi elle leur raconte le plaisir quasi-jubilatoire que j'ai eu à faire flipper Ludovic et ses deux acolytes?

- C'est ça ! Enfonce-moi encore plus. Les mecs vont me haïr dans dix secondes.

Mushu me chope et me fait asseoir sur ses genoux en me tenant la taille. De la salle, il est celui qui semble le moins méfiant envers moi. J'ai presque l'impression que son geste est destiné à montrer à mes amis que je fais partie du groupe. Je rêve sûrement mais je crois que Mushu me protège en quelque sorte.

N'ayant plus ma couette, je me cache le visage entre les mains et ne peux m'empêcher de rire, Léa m'envoyant sa joie par ondes mentales. Je vais me faire lyncher dans quelques secondes, c'est sûr. Mushu va me brûler vive. Marie repose pour la troisième fois sa main sur ma tempe. Les gars hurlent de compassion. Les filles sautent de joie. Ils entendent tous mes paroles et Léa jubile en leur racontant le plaisir que j'avais à faire mal à Ludovic, vengeant Louis en quelque sorte. Fin du film. Je suis mortifiée et je n'ose plus bouger.

Mushu pose sa tête contre mon dos. Tout le monde est silencieux. Vont-ils me croire ? Même moi, j'ai du mal à croire ce que je viens de réaliser, tenir tête à trois puissants sorciers avec juste un putain d'aplomb et un brin de sadisme. Je me remets à trembler. Pas à cause des images que j'ai revues, mais en raison de mon angoisse quant au jugement de mes amis. J'ai de l'affection pour eux et à l'idée qu'ils me détestent, j'ai envie de pleurer.

À ma plus grande surprise, je sens mon geôlier poser ses lèvres sur mon épaule dénudée en souriant. Il me serre avec douceur dans ses bras et prend mon visage dans sa main pour que je le regarde dans les yeux.

- T'es vraiment une enflure. Une vraie garce. Je te félicite. T'as des putains de couilles pour une chochotte d'humaine. Maintenant, peut-être que mes potes me croiront et aurons pitié de moi quand je leur dis que tu me tyrannises, dit Mushu en essayant de ne pas rire.

Peine perdue, il part dans un fou rire tout en me tenant contre lui. Arthur confirme que je ne dégage aucune aura sombre et donc la théorie de la sorcière métamorphe est impossible. En plus, une sorcière n'aurait pas permis un libre accès à ses souvenirs et déclencherait les appareils électroniques ou la colère des oies.

La joie de Mushu écroulé de rire dans mon dos est communicative et Léa n'a même pas besoin de partager les émotions que nous rions tous comme des gamins en nous tenant les côtes. La pression redescend d'un seul coup et je pleure enfin, de joie et de soulagement. Je suis une enflure et fière de l'être. 

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