Comme chaque dimanche matin, Eugène, jeune père d'une trentaine d'années se leva aux alentours de onze heures du matin.

Encore endormi, les yeux à moitié fermés, il bailla nonchalamment sans regarder où il allait. En conséquence, il se prit la table à manger.

— Bordel ! Mais qui a changé cette table de place  ?

Tout en ronchonnant, il sortit tout ce qu'il lui fallait pour petit-déjeuner, les couverts, le bol, le lait, les céréales. Mais quelque chose manquait. Il ne trouvait pas le cacao.

Eugène était planté devant le meuble, se sentant ridicule de ne pas voir sa poudre au chocolat. La boîte n'était pourtant pas petite et se trouvait être la plus colorée du rayon.

Il chercha dans tous les meubles, dans le frigo, le four, et même tous les endroits de la cuisine ou personne ne rangerait le cacao en temps normal. Mais en vain, il ne trouvait pas cette boîte.

— Bon sang ! Mais je l'ai achetée hier !

Commençant à sentir son sang bouillir dans ses veines, il décida de se calmer. Sa fille ne devait pas le voir en colère.

En attendant que le cacao se montre, Eugène remonta à l'étage dans le but de réveiller sa fille.

— Mina, ma puce, il faut se lever !

Il ouvrit la porte tout doucement et fut abasourdi devant la scène qui se déroulait devant ses yeux.

Sa fille était assise au sol, devant son miroir, le récipient chocolaté devant elle, éparpillé au sol. Mina avait de la poudre chocolatée sur le visage qu'elle étalait à l'aide d'un pinceau de maquillage.

— Bah.. Mina.. Qu'est-ce que tu fais avec le cacao ?

La petite fille se retourna vers lui en souriant.

— Je fais comme maman, elle met toujours du marron sur son visage !

— Mais maman c'est du maquillage, toi c'est de la nourriture.

Eugène s'approcha de sa fille, toujours un peu perdu. Mina perdit son sourire.

— Mais maman ne veut pas que je me maquille avec du vrai maquillage.

— Ma puce, tu n'as pas besoin de maquillage pour être magnifique ! Regarde tes belles joues toutes rondes, ton sourire avec tes petites dents trop mignonnes et tes beaux yeux verts ! Maman cache la fatigue et c'est de son âge, mais toi tu rayonnes !

Le jeune père parlait à sa fille en la regardant tendrement, tout en éloignant la boîte de cacao qui s'était presque entièrement vidée sur le tapis de chambre.

— C'est vrai ? Je suis belle ?

— Mais bien sûr ! Tu sais, tous mes collègues de travail me félicitent parce que tu es très sage, gentille, drôle et en plus, tu es magnifique ! Tu vas avoir plein d'amoureux plus tard !

Mina retrouva le sourire que son père aimait tant. Elle avait beau avoir sept ans, elle semblait déjà avoir des doutes sur sa beauté et ça brisait le coeur d'Eugène.

Il prit sa fille sur ses genoux, lui enlevant le pinceau des mains puis essuya le cacao de son visage enfantin.

— Mina, écoute-moi bien. Ne laisse jamais qui que ce soit te dire que tu n'es pas belle ou t'en faire douter ! Personne n'a le droit de dire si oui ou non tu es mignonne, ou si tu as le droit ou non de faire ce que tu aimes faire.

Sa princesse le regardait, concentrée sur ses paroles.

— Tu es une grande fille maintenant, mais il ne faut pas commencer à vouloir être plus grande, parce qu'après tu ne profites pas d'être suffisamment petite pour que les gens te câlinent et t'offrent plein de cadeaux ! Et puis c'est pas si génial d'être une grande personne, il y a plein de problèmes.

Eugène sourit à sa fille en lui caressant les cheveux.

— Tu es unique, belle, intelligente et personne ne doit te le faire oublier.

Mina hocha la tête en souriant légèrement.

— Bon, et maintenant on fait comment pour le cacao partout, mademoiselle ? Je vais devoir te manger vu qu'il en reste un peu sur ton visage !

— Nooon !

La fillette sauta sur le sol puis partit en courant pour se cacher, tandis qu'Eugène nettoyait tout, en rigolant.

— Le mystère du cacao est réglé, je vais enfin pouvoir manger.

Il redescendit à la cuisine, jeta le cacao irrécupérable, puis se prépara un bol de lait, rapidement imité par Mina qui avait trop faim pour rester cachée.

Les deux mangèrent dans une bonne ambiance, qui réchauffa leur coeur.