Chapitre 1

8 minutes de lecture

Première alerte

Une alarme silencieuse s’allume dans les tréfonds d’un laboratoire d’astrophysique. Les écrans scintillent, affichant une cascade de données incompréhensibles pour le profane. Soudain, au milieu du chaos numérique, une anomalie surgit. Le système, impassible, lui attribue un code froid et impersonnel.

Mais ce code pourrait tout aussi bien désigner un simple caillou cosmique qu’un messager de l’apocalypse. L’objet, quel qu’il soit, fonce vers la Terre à une grande vitesse. Son entrée dans l’atmosphère n’est plus qu’une question d’heure.

Et pendant ce temps, l’humanité vaque à ses occupations, ignorante du drame qui se joue au-dessus de sa tête. Dans un laboratoire désert, un ordinateur affiche une alerte, seul témoin d’un évènement qui pourrait changer le cours de l’histoire.

Sainte-Marie : Quelques heures avant l’impact.

Sainte-Marie, située en France, en « province », dans cette petite ville, la vie se déroule sereinement. Comme souvent dans ces agglomérations, la ville s’était développée comme un organisme vivant, autour d’un noyau qu’était le « centre » ville historique. Mais dans ce cas précis, une étrangeté avait produit un développement urbain sur un côté et non autour de l’origine. Ce qui aurait dû être un centre-ville historique était devenu un quartier résidentiel calme et excentré de la ville. Une petite ville collée à ce qui était resté un petit village traditionnel, avec ces petites rues dont certaines encore pavées. Des arbres miraculeusement préservés. Et au bord de ces quelques rues, une église plantée là, elle aussi excentrée du côté de la campagne, comme une ancre retenant le village, lui évitant de sombrer dans la métropole attenante. Le parc immobilier avait tout de même évolué avec son temps, mais avec la volonté de garder son cachet. On y trouvait des maisons, aux façades en pierres et aux jardins bien entretenus, les anciennes granges ayant laissé la place à des garages. Tout le charme de la campagne avec les avantages de la ville si proche.

C’est au cœur de ce quartier tranquille que se dresse la maison des Lefèvre. Une demeure restaurée avec goût. Un jardin coloré entoure la propriété. Un petit banc en bois donnant sur la rue invite les voisins à faire une pause et à partager quelques mots. La porte d’entrée s’ouvre sur un intérieur accueillant. Le salon arbore des couleurs chaudes et changeantes en fonction des heures de la journée et les meubles confortables en font un cocon douillet. Des étagères remplies de livres et de souvenirs familiaux donnent à l’endroit une ambiance personnelle. Cependant, sur les photos familiales, un vide se fait sentir : l’absence d’un père, on peut y voir un couple âgé, et des selfies des occupants, Isabelle et Léo à différents âges.

Isabelle est une belle femme de 39 ans, curieuse, intelligente et active, et Léo qui vient d’avoir 10 ans a hérité de la curiosité de sa mère sous sa tignasse frisée.

Une soirée tranquille de début d’été enveloppe la maison des Lefèvre alors que la famille se prépare pour un dîner paisible. Il fait encore jour dehors, mais il faudra bientôt allumer l’éclairage de la cuisine. Léo est installé à table et lit tranquillement. Une belle soirée en perspective, mais une ombre plane, invisible aux yeux de cette famille paisible.

Une Menace

Vincent était passionné depuis tout petit par l’espace et l’espoir d’y trouver une espèce intelligente. En grandissant, il orienta ses études vers l’astrophysique. Au début, encore jeune, il alla de déception en déception, paradoxe de Fermi, problème de temps, et d’autre, toute une série de réflexion de grands scientifiques expliquant pourquoi nous n’étions pas en contact avec une civilisation spatiale et pourquoi cela ne pourrait pas arriver. Ce qui acheva son rêve fut cette question cruciale du temps qui mettait en perspective l’âge de la civilisation humaine par rapport à celui de l’univers. Notre existence était si ridiculement brève à l’échelle cosmique que la probabilité de rencontrer une autre forme de vie intelligente devenait quasiment impossible. Cette théorie suggérait également que si d’autres civilisations existaient réellement ou avaient déjà existé, nous en aurions déjà des preuves tangibles ou des vestiges. En effet, compte tenu de l’immensité du temps écoulé depuis la formation de l’univers, une civilisation plus ancienne aurait eu amplement l’occasion de se développer et de coloniser l’ensemble de la galaxie. Bref, il avait été désabusé. Il était maintenant en licence et avait obtenu un stage dans un laboratoire d’astrophysique. Vincent conservait néanmoins une trace de ses aspirations d'enfance : son ordinateur personnel, comme des dizaines de milliers d’autres, participait au projet SETI, une initiative collective d'envergure. Ce programme exploitait la puissance de calcul de sa machine pour décortiquer les masses de données captées par d'imposants radiotélescopes. L'objectif avoué ? Dénicher un signal « hors norme » qui serait LA preuve.

Or ce lundi matin, en arrivant au laboratoire, il ne s’attendait pas du tout à l’excitation que sa « découverte » provoquerait. Son stage avait été assez barbant. Il récupérait des données de radar plus ou moins puissant pour cartographier le ciel. Il participait à la mise à jour des orbites des milliers de satellites et autres objets en rotation autour de la terre, certains officiels, d’autres moins. Et donc, en regardant les données compilées du week-end, il vit une anomalie. Quelque chose de nouveau qui après trois vérifications, il en était certain, n’était pas là avant et n’était pas répertorié. En lançant le logiciel de calcul de trajectoire, il fut encore plus surpris de constater que cet objet allait percuter la terre. Percuter ou atterrir ? L’excitation le gagna. D’où venait le vaisseau ?

— Doucement, se dit-il.

— Restons sur le terme « objet ».

Reprenant les informations dans l’ordre, il demanda au logiciel de retracer son parcours. Après quelques instants, la machine qui effectuait les calculs complexes d’attraction gravitationnelle traça une trajectoire provenant d’une zone hors du système solaire. La trajectoire de l'objet l'avait amené à proximité de Jupiter environ quinze ans auparavant. Mais chose un peu étonnante, sur la fin de sa course, il était arrivé à l’opposé du soleil. C’était pourtant la position la plus propice pour être détecté par les télescopes optiques. Un objet bien brillant visible la nuit seulement.

Il repassa en revue toutes les entrées récentes qui auraient dû signaler cette apparition, rien ne correspondait. Peut-être un revêtement de camouflage se dit-il

— Non, non, un objet, on a dit, se murmura-t-il.

Une fois l’excitation de la découverte passée, il ressentit un léger stress. Il n’avait pas terminé ses contrôles et un autre point crucial était à vérifier : la signature radar. Les objets reflétant plus ou moins de « lumière » radar en fonction de leur surface. La mesure lui apprit rapidement que la taille de l’objet ne représentait aucune menace. Rassuré, il alla enfin en informer son responsable de stage.

Il le trouva en train de marcher dans le long couloir desservant tous les bureaux de l’étage.

— Monsieur ! J’ai un objet non répertorié !

— D’accord, on regarde cela tout à l’heure.

— C’est qu’il va bientôt entrer dans l’atmosphère.

— Comme tant d’autres !

— Mais il n’était pas répertorié !

— OK, OK je vais regarder ça. Il est gros ?

— Non, a priori pas de danger.

Il murmura de façon complétement inaudible : c’est juste un objet non identifié qui vole, un OVNI.

Le docteur, lui, souriait intérieurement, « Ah ! la fougue de la jeunesse ».

Le scientifique refit toutes les vérifications. Tout correspondait, enfin presque, la trajectoire évaluée par son étudiant était fausse. Après tout, il n’était qu’en licence, mais il était tout de même difficile de se tromper en utilisant le programme.

— C’est bien ! Je t’enverrais le signalement officiel dès que je l’aurais terminé.

La discussion s’arrêta là au grand désespoir de Vincent.

Préparant son rapport sur l’apparition et la prochaine désintégration d’un petit corps spatial, son responsable de stage prit son temps, on était lundi matin et son étudiant avait coupé son élan vers la machine à café. Après quelques dizaines de minutes, il revint pour enregistrer l’évènement. Regardant machinalement le système d’analyse automatisé ; l’alerte était toujours présente. Pourtant, les estimations précédentes prévoyaient une disparition rapide dans l’atmosphère. Un deuxième objet ? C’était envisageable. Il était assez commun que des objets en orbites s’attirent et tombent par groupe de deux ou trois. Pour en être sûr, il reprit les données utilisées plus tôt par Vincent. Il avait eu tort, le petit avait bien fait son travail. Donc trois objets ? Mais leurs signatures étaient exactement les mêmes, vraiment très étranges, ou alors…

Émilie

Émilie travaillait dans une société d’informatique spécialisée dans la sécurité des réseaux. Jeune, brillante et sportive, elle y était promise à un bel avenir. Alors qu’elle faisait ses courses le samedi soir pour ses repas de la semaine, elle reçut un texto : « Suite à votre commande, veuillez trouver ci-dessous votre référence client », suivi d’un code mélangeant lettres et chiffres. À la vue de ce message, son cœur se serra. Elle savait que ce message était plus qu’une simple notification. Elle quitta la supérette précipitamment, laissant ses emplettes entre deux rayons.

De retour dans son appartement, elle se dirigea d'un pas décidé vers la salle de bain, naviguant dans l'obscurité. Une fois à l'intérieur, elle referma la porte avant d'actionner l'interrupteur, illuminant soudainement la pièce. La pièce avait du charme, comme tout le reste de l’appartement. Deux renfoncements en inox étaient incrustés dans le mur, abritant quelques objets décoratifs. Elle s'arrêta devant le premier, retirant rapidement la bonbonnière remplie de petits savons et la figurine d'un poisson rouge. Une fois l'alcôve vidée, elle la fit glisser dans son emplacement jusqu'à la dégager complètement. Elle saisit le sachet caché derrière et remit la niche grossièrement en place.

Dans le sachet se trouvait un autre téléphone qu’elle alluma. Code SIM, puis code téléphone, puis authentification par empreinte digitale. Une seule application était installée sur cet appareil renforcé : Amazon. Mais, après une nouvelle identification, un tout autre aspect du site apparut. Lisant attentivement le texte, elle cliqua sur l’icône « Answer » et écrivit ces deux lettres : « OK ». Elle glissa ensuite le mobile dans la poche arrière de son jean, remit avec délicatesse la niche en position, essuya avec du papier toilette la trace de ses mains sur les bords, et replaça les bibelots.

Sortant de la salle de bain, elle se dirigea vers une bibliothèque murale et saisit rapidement un serre-livres fantaisie, une figurine massive d’un superhéros. Faiblement éclairée par les lumières de la rue, elle se déplaça vers un petit bureau informatique, retira la chaise et plaça la figurine sur le sol. Le puissant aimant caché dans son le socle rencontra un autre aimant dissimulé sous une plaque du sol. En soulevant le tout, Émilie saisit alors un gros et lourd sac de sport. La cache refermée et la figurine remise en place, elle se dirigea vers l’entrée, récupéra un autre sac dans un placard à vêtements. À peine six minutes s'étaient écoulées qu'elle se glissait déjà derrière le volant de sa voiture, tournant la clé de contact.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 7 versions.

Vous aimez lire KaTextil ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0