Arthur retrouva sans problème l'appartement de son ami, il y était venu de nombreuses fois. Il n'avait pas de chez-lui et Paul n'avait pas beaucoup de famille et aucun ami en dehors de l'armée. Étant sur le même navire, leurs permissions étaient souvent tombées aux mêmes dates, et ils avaient régulièrement organisé leurs vacances ensemble. En principe, quelques jours à Brest chez Paul, pour récupérer, et puis en fonction de l'époque, une semaine au ski ou un voyage à l'étranger.

Une seule fois, en revenant d'une longue mission dans le pacifique, Arthur avait annulé son séjour avec son ami pour aller voir ses parents. Ceux-ci étaient de retour en métropole, son père ayant été nommé dans le sud de la France.

C'était la première fois qu'il les revoyait depuis l'année de son bac et le voyage surprise de ses parents depuis la Martinique, officiellement pour fêter l'obtention de son diplôme, mais surtout pour parler de son avenir. Enfin, celui que son père imaginait pour lui. Ce jour-là, ils avaient mangé dans un grand restaurant et très vite le repas avait tourné autour de ses choix, ou plutôt de ses non-choix, puisqu'Arthur n'avait fait aucune demande pour organiser la poursuite de ses études. Ses parents, qui en avaient préalablement discuté, avaient décidé de faire une nouvelle fois jouer les relations de son père, pour lui assurer une place dans une prépa et pouvoir ensuite intégrer une grande école d'ingénieur. Sa mère, toute mielleuse lui faisant remarquer qu'ils avaient tenu compte de ses envies, même si eux auraient préféré d'autres études. Evidemment, ils avaient vu rouge lorsqu'il leur avait annoncé qu'il s'était engagé pour un an dans la marine comme matelot volontaire. Arthur avait quitté le restaurant avant la fin du repas. Ils avaient par la suite échangé quelques messages, mais il ne les avait pas revus, jusqu’à leur retour dans l'hexagone.

Il avait quand même tenu trois jours cette fois-là... Comme d'habitude, son père n'avait pu s'empêcher de critiquer ce qu'il faisait, arguant que quitte à s'engager, il aurait dû faire une école d'officier. Et sa mère, avait un peu adouci les angles mais avait fini comme toujours par arriver aux mêmes conclusions que son époux. Le deuxième soir, ils s'étaient à nouveau disputés et Arthur avait emprunté la voiture de son père pour faire un tour en ville. Il avait fini la soirée dans une boite gay et avait dragué le premier mec qu'il avait trouvé à son goût. Arthur n'avait pas fait ça depuis longtemps mais il savait, que dans ce type d'endroit, peu d'hommes résistaient à son charme, et ce fut une nouvelle fois le cas. Et même s'il n'avait rien prémédité, lorsque son compagnon d'un soir lui avait proposé de finir la soirée à l'hôtel, il n'avait pu s'empêcher de refuser pour l'inviter plutôt à passer la nuit "chez lui". Ses parents n'émirent aucune remarque le lendemain matin lorsque les deux jeunes hommes firent leur apparition au petit-déjeuner. Mais une fois que l'invité surprise fut reparti en taxi, ils n'avaient pu s'empêcher de laisser éclater leur colère. Arthur s'y était préparé, il avait même sans doute inconsciemment espéré que ses parents s'énervent, trouvant ainsi une raison supplémentaire pour écourter son séjour. Il avait mis ses valises, qu'il n'avait même pas défaites, dans la voiture de son père et était directement parti à la gare, sans même répondre à leurs reproches.

Tout en réfléchissant à ses dernières rencontres avec ses parents, le jeune militaire avait terminé la préparation de son repas du soir et l'avait mis en cuisson. Il hésita un moment avant de leur envoyer un message pour leur faire part de sa décision de quitter l'armée et de son intention de, sans doute, reprendre ses études. Peut-être que pour une fois, les relations de son père lui seraient utiles, et puis même s'il ne le formulait pas vraiment, il espérait toujours avoir leur approbation. Quelques minutes plus tard, sa mère lui répondait de manière plutôt positive. Ses parents l'encourageaient dans sa démarche, promettaient de l'aider quel que soit son choix, mais souhaitaient qu'il vienne les voir dans les prochains jours pour en discuter ensemble. Arthur accepta et commença à chercher un billet de train pour rejoindre Lyon, où travaillait désormais son père. Il pourrait du même coup commencer à chercher un petit studio, puisque s'était également dans la capitale des Gaules qu'il souhaitait, si possible, étudier.