Velrak

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Allongé sur le somptueux lit à baldaquin de la chambre des plaisirs, Velrak ruminait les paroles de la haute matriarche. Il avait mis son âme à nue devant elle, après avoir hésité pendant plus d'un siècle. Il n'est jamais sûr pour un Borgias de montrer ses faiblesses, même à la plus grande prêtresse de Ghenhorrott.

Il fit un signe à Gwyrf, son kobold domestique, pour qu'il enlève les deux corps démembrés qui souillaient le sol. Même les tortures de ces deux filles, ne lui avaient procuré qu'un infime frisson de plaisir. Le goût de leur sang était à peine rehaussé par leur peur.

Lorsqu'il avait plongé son épée dans la chair tendre de ses proies, la lame d'opale s'était teintée de rouge. Encore. Il avait pourtant choisi les plus naïves de ces esclaves, des filles qui passaient leurs journées à tisser des étoffes soyeuses, dans un univers limité à un atelier et une chambrette pour elles deux. La matriarche lui avait révélé que seule une âme innocente parfaitement pure, teinterait sa lame de blanc. Et l'épée pourrait enfin lui donner la réponse à la question qui le tourmentait : comment atteindre le bonheur parfait.

Après son accession à l'immortalité, alors que les souffrances innombrables de la transformation avaient enfin cessé, il avait cru atteindre son but. L'apaisement de son corps martyrisé, après de si longues heures, l'avait plongé dans un état de bien-être qu'il n'espérait plus.

Il avait pris possession de son fief. Avoir sa propre forteresse et ses terres à administrer, devenir un des seigneurs de l'Espilia, après toutes ses années d'esclavage chez les Borgias, était sa première victoire. Mais cette euphorie n'avait duré qu'un bref instant, juste assez pour qu'il prenne conscience que ce bonheur ne pouvait en aucun cas être suffisant.

Il s'était rallié à l'armée levée par les Borgias dès qu'ils lui en avait donné l'ordre. Et il s'était plongé dans les sanglants affrontements qui effrayaient les autres clans, et terrifiaient les races inférieures. Revêtu de son armure noire obsidienne, la visière grimaçante de son casque lui couvrant le visage, il avait dirigé son armée, fidèle à son engagement, décimant les ennemis au mépris de la vie de ses hommes. Lorsqu'il était sûr de sa victoire, il chargeait lui-même, ivre de sang et de victoire, pour pouvoir brandir la tête décapitée du chef de l'armée adverse. Le visage argenté démoniaque gravé sur sa visière inspirait la terreur à ses ennemis. Le bonheur de ses victoires était, hélas, aussi éphémère que la montée d'adrénaline du combat.

Il s'était ensuite lancé dans des orgies de chair décadente. Raflant les esclaves les plus plaisants dans les villages avoisinants, il avait expérimenté tous les délices de la chair. Puis les associant aux tortures les plus sadiques, sa peau d'albâtre éclaboussé de sang, il achevait ses victimes au paroxysme de son plaisir.

Mais ces plaisirs de la guerre ou de la chair finirent par l'enfermer dans une routine monotone. Au bout de quelques siècles plus rien n'arrivait à le rendre heureux plus qu'un fugace instant. Il ne pensait plus qu'à la recherche d'un bonheur qui le fuyait.

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