Chapitre 5 - Mercenaire pour l'armée des morts

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Je n'ai jamais partagé les objectifs des nécromants. Leurs conquêtes ne m'intéressent pas et leur puissance m'indiffère. Je ne cherche pas la gloire faisandée qu'ils offrent à ceux qui commandent leurs armées. Vivants ou morts.

"C'est dommage. Nous sommes nombreux à penser que tu vaux à toi seule plusieurs légions. Je n'insiste pas, mais c'est toi qui es venue parler d'Hohenraumheim."

"Je ne veux pas d'armée. Je veux un chariot et deux chevaux vivants. Un robuste pour le chariot, et un rapide pour moi."

Beobartus a détourné le regard, et il fait mine de tourner les pages d'un livre de pierre, sculpté sur son bureau. Pour la première fois, je me demande s'il voit bien la même chose que moi. Peut être que, dans les ombres et les gouffres de son cerveau, il a du créer des illusions pour accéder à ses souvenirs. Peut être que sous sa main, il voit réellement des pages se tourner, et que c'est sa propre mémoire qu'il feuillette ainsi. Je me demande combien de temps encore Beobartus conservera son titre de nécromant. Combien de temps avant que la baisse de ses capacités ne le fassent nommer à un poste inférieur.

"Elsa, c'est dommage que tu ne sois pas venue il y a trois semaines. Nous entamons une longue campagne. Une campagne qui mobilise toutes nos ressources. Tu as peut être vu passer nos armées ?"

J'attends. Il reprend.

"Bref, je n'ai plus de chevaux pour toi. Les derniers ont été attelés ce matin à une bouche à feu qui doit partir rejoindre le commandeur Eymeric Eisenkopf. C'est dommage, tu aurais pu te joindre à l'escorte. Car par une étrange coïncidence, l'armée du commandeur marche précisément sur Hohenraumheim."

Je fais de mon mieux pour garder un visage impassible. Mais mon cerveau fonctionne à toute allure.

Quelles sont les probabilités qu'il ait lui aussi entendu parler de l'alchimiste ? Y a t'il des chances que les nécomants aient lancé leurs armées pour la même raison que moi ? Et comment arriver avant eux sans cheval ? Comment sinon en les accompagnant ? Lorsqu'il n'y a pas le choix, il faut prendre l'unique décision, même si elle ne plaît pas.

"J'escorterai votre bouche à feu. Une fois à Hohenraumheim, je prendrai deux chevaux pour le trajet de retour. Deux chevaux vivants : un robuste et un rapide."

"Elsa, je suis content que tu acceptes de combattre sous notre bannière. Mais le marché ne vaudra que si la bouche arrive sous les murs d' Hohenraumheim. Elle doit pouvoir être mise en position et chargée de poudre. Lorsque la bouche à feu aura tiré, tu seras délivrée de ta parole, et le commandeur te détacheras deux chevaux que tu pourras choisir, ainsi que la solde prévue pour les combattants libres qui nous rejoignent. Tels seront les termes de notre accord."

Beobartus a toujours eu l'esprit tordu d'un juriste. Le genre d'esprit qu'il faut pour traiter avec des mercenaires comme moi.

"Ces termes, je les accepte. Lorsque la bouche à feu aura atteint Hohenraumheim et qu'elle aura tiré, je prendrai livraison de mes chevaux et je serai libre de tout engagement."

Beobartus passe la main sur la table, comme pour sceller notre accord. Je sais qu'il ne reviendra pas sur sa parole. Je suis désormais mercenaire pour l'armée des morts.

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