3. Le contact
Terre Lambda, Décembre 2024
Maguy, son mari Benoît sortirent du restaurant en compagnie de Pascal vers 22 heures. Tout au long de la soirée, ils avaient ri en se remémorant leurs souvenirs de jeunesse, des souvenirs qu’on ne partage qu’en famille.
Comme aimait à le dire sa sœur, "Rien n’est plus vivant qu’un souvenir, surtout quand celui-ci est agréable."
Ils avaient prévu de finir leur soirée chez lui, en jouant une bonne partie de cartes endiablée dont ils avaient le secret, devant un café chaud.
A peine sortis, ils furent saisis par le froid. La neige commençait à tomber. Pascal recouvrit son crâne rasé d’un bonnet en polaire, souffla dans ses mains et se dirigea vers sa voiture.
Même si les pneus de leurs véhicules étaient équipés pour rouler sur des routes enneigées, il fallait se hâter de retourner à Paulhenc. Les conditions climatiques pouvaient se dégrader très rapidement dans la région. Benoît et Maguy prirent la route à bord de leur 4x4 BMW, tandis que Pascal les suivit à bord de sa Tesla Model 3. La technologie de pointe de la voiture américaine permit de l’accueillir dans un habitacle chauffé à 21 degrés, avec un pare-brise déjà désembué.
Il mit une playlist de Muse. la voix de Matthew Bellamy fit résonner "Resistance" dans le véhicule. Il enclencha la marche avant et s’élança sur la route. La neige commençait à recouvrir l’asphalte. Il prit la mesure de ses pneus froids en donnant de petits coups de volant qui faisaient légèrement déraper sa voiture.
Il connaissait relativement bien la route qu’il empruntait toutes les semaines depuis plus de trois ans maintenant et il pouvait anticiper ses manœuvres en fonction des difficultés de la circulation dues aux intempéries du moment. Il descendit la Vallée de Brezons sans souci, traversa la rivière du même nom avant de remonter la côte du Ménial en direction de Paulhenc.
Son regard croisa son reflet dans le rétroviseur. La cicatrice qui marquait une partie de son visage fit remonter en lui une vague de souvenirs. Ses pensées se tournèrent vers son passé, alors qu’il avait moins de vingt ans.
La vie s’offrait à lui, ce passé où l’insouciance, la légèreté et le bonheur semblaient tout dominer, s'imposant à lui avec une clarté douloureuse.
Il se revit à l’École de Conduite où il rencontra par le plus grand des hasards son ami Philippe, avec lequel il avait passé ses dernières années de lycée. Il y fit aussi la connaissance d'une charmante jeune femme.
Glorie.
Il revit ses premières sorties en voiture avec les copains, ses soirées en famille, tous ces instants de jeunesse que l’on minimise tant lorsqu’on les vit mais que l’on comprend réellement qu’à l’aube de la vieillesse.
Il se souvint de ce mois de septembre, en 1983 où, de retour de vacances, il appela Glorie. Le cœur battant, il lui avait timidement donné rendez-vous en plein centre de Marseille.
Elle avait accepté.
Ils avaient passer la journée à se découvrir l’un l’autre, puis échangé leur premier baiser alors que le soleil déclinait. Insouciant, ils avaient parlé de leur avenir, comme si le simple fait d'en discuter pouvait le figer dans le temps. Du haut de leurs dix-huit ans, ils évoquaient toutes sorte de projets, maison, travail, enfants, sans se douter une seule seconde que la dure réalité de la vie leur réserverait un tout autre destin.
Ce jour-là, le temps semblait s’être arrêté spécialement pour eux. Lorsque la nuit était tombée, assis sur leur banc au cœur de la cité phocéenne, ils ne s’en étaient même pas aperçus. Mais une fois les dernières paroles échangées et les derniers baisers partagés, un sentiment de vide, de tristesse et de mélancolie avait pris place en eux.
Pascal se souvenait de ces instants comme s’ils dataient de la veille :
— Appelle-moi dès que tu seras arrivée, Glorie.
- Je te le promets, Pascal.
Il était remonté dans sa Simca 1100, mais son esprit et son cœur étaient restés sur ce banc, à ses côtés. Il sentait encore la chaleur de sa main dans la sienne. A cette époque, il habitait dans une petite villa à Aubagne. Il avait une demi-heure de route devant lui, trente minutes qu'il passerait à penser à sa nouvelle petite amie. Il ne savait pas que, de son côté, après avoir démarré sa vieille Renault 5, Glorie effleurait ses lèvres du bout de ses doigts. Elle se remémorait le tendre baiser qu'elle avait reçu quelques minutes auparavant.
Elle, habitait Gréasque, un petit village de Provence. Tout comme Pascal, elle avait pensé à lui durant son retour. Dès son arrivée, elle l’avait appelé, puis, au fil des semaines, ils se retrouvaient presque tous les samedis, puis, de plus en plus souvent. Plus tard, les parents de Glorie avaient invité Pascal à passer le week-end chez eux, permettant aux deux tourtereaux de profiter pleinement de leur temps libre avant son départ pour le service militaire.
Glorie... celle dont il tomberait éperdument amoureux pour le reste de sa vie.
Puis les pensées de Pascal le transportèrent vers les années suivantes, plus sombres, moins joyeuses, ces années où ses choix n'avaient pas été les meilleurs, où la malchance était devenue sa compagne de route. C'est durant cette période qu'il avait perdu son amour, alors qu’ils étaient promis au plus radieux des avenirs.
Il se revit, jeune marin, investi corps et âme dans son travail et ses engagements. Puis, affecté aux Forces Spéciales, il participait à des missions de sauvetage périlleuses en Afrique, en Asie, au Moyen-Orient. Toutes les années qui suivirent furent consacrées à son travail et laissèrent peu de place aux loisirs. Cette dévotion qui lui avait valu une ascension professionnelle fulgurante fut stoppée nette par un accident survenu lors de sa dernière mission, entraînant la mort de ses camarades. Cela l'avaient conduit à sa mise à l'écart. Lui qui avait contribué à des dizaines de missions de sauvetage se retrouvait abandonné par sa propre hiérarchie.
Sur le plan personnel, il avait bien tenté de reconstruire sa vie, de rencontrer d'autres femmes dont Isabelle, une femme véritablement adorable qu'il n'oublierait jamais. Mais le destin semblait le condamner à vivre seul, loin de tous, et surtout, loin de son amour perdu.
Il avait continué d’avancer, encore et toujours, se demandant quel était le sens de la vie, quel était le sens de Sa vie ? Une étrange impression le hantait. Celle d’être passé à côté de quelque chose, d’avoir été inutile, mauvais, égoïste. Cette question revenait sans cesse au plus profond de son être :
"Que vais-je laisser derrière moi ?"
Freddie Mercury le tira de ses sombres pensées lorsque les premières notes de "Just Keep Passing The Open Window" résonnèrent dans l'habitacle. Pascal se revit acheter ce dernier album de Queen à la FNAC de Marseille lorsque le conducteur de la Toyota Land-Cruiser, qui arrivait face à lui à vive allure, perdit le contrôle de son 4x4.
Celui-ci dérapa et percuta violemment la portière avant gauche de la Tesla.
Ce fut une véritable explosion : les vitres de l'américaine volèrent en éclats. Malgré sa ceinture de sécurité, la tête de Pascal cogna le montant de la portière, lui causant une douleur intense au dessus de l'œil gauche.
La berline fut projetée dans le ravin, dévalant la pente à toute vitesse. Elle heurta plusieurs rochers, fit plusieurs tonneaux puis alla s’encastrer brutalement contre un chêne. Le froid, la neige, suivi d'un silence oppressant envahirent l’atmosphère.
Pascal souffrait de multiples fractures, l’hémorragie interne dont il était atteint faisant affluer le sang dans sa bouche et dans son nez. Il n’était que douleur. Il sentait la vie s'éteindre tout doucement en lui.
Une douce lumière blanche le tira de son inconscience.
Tout était flou autour de lui. Il avait l'impression d'être allongé mais il ne sentait aucun contact physique, comme s'il flottait. Bien qu'il se demandât où il se trouvait, il ne ressentit ni peur, ni anxiété, seulement une étrange sensation de familiarité.
Il connaissait cet endroit.
Ce lieu, la lumière, la douceur qui l'entouraient. Tout cela lui paraissait étrangement familier. Il tenta de se lever mais ne le put.
Il réalisa qu'il flottait réellement.
Il tourna la tête de gauche à droite pour se repérer dans l'espace. Il n'était ni entravé, ni retenu. Son corps, comme éthéré, se mouvait doucement dans l'espace.
Il n'y avait ni porte, ni fenêtre, aucun mobilier : tout était d'un blanc immaculé, baigné d'une lumière douce et tiède, le tout enveloppé dans un silence absolu. Il essaya de se souvenir d'où il venait, comment il était arrivé là, en vain. Il s'efforça de ressembler ses souvenirs et son esprit cartésien dut écarter rapidement les explications les plus irrationnelles.
La seule hypothèse qui lui vint à l'esprit fut qu'il devait être en train de rêver, tout simplement.
- Bonjour, Pascal.
Il reconnut immédiatement cette voix. Il tourna lentement la tête vers elle quand il vit à sa gauche, une forme brumeuse qui prit progressivement forme.
Elle était grande, élancée, d'une teinte bleuté. Peu à peu, la silhouette se précisa, révélant une jeune femme d'une beauté éclatante, aux traits fins et délicats. Ses yeux, dont la couleur oscillait entre l'or, l'argent et le cuivre, brillaient d'une intensité presque surnaturelle. Ses longs cheveux blonds flottaient derrière elle comme portés par une brise invisible. Sa grâce rappelait celle d'une déesse descendue de l'Olympe.
Son corps, entouré d'une aura scintillante, était parfaitement épousé par une combinaison qui semblait une seconde peau. Tout en parlant, elle glissait doucement vers lui :
— Comment te sens-tu ?
- Je me souviens de vous. Vous avez caressé ma joue alors que je n'étais qu'un enfant.
- C'était bien moi. Je m'appelle Raaver. Je suis ravie de pouvoir enfin communiquer avec toi.
- Raaver, murmura-t-il. C'est un rêve, n'est-ce pas ?
Elle lui adressa un sourire apaisant :
- Non, pas vraiment. Une sorte d'illusion. Mais notre conversation est bien réelle. Nous avons dû bloquer quelques parties de ta conscience pour éviter de t'effrayer. Nous allons progressivement t'expliquer la situation puis répondre à tes questions. Il est important que tu prennes le temps de t'acclimater à ton état actuel.
- Nous ?
- Plus tard, tu rencontreras Raeha, un de mes compagnons. Nous serons tes guides dans ce voyage extraordinaire, si tu choisis de le faire. Mais avant tout, tu dois prendre conscience de ton état. Pour cela, nous allons transmettre à ton esprit des images qui te rappelleront ce qui t'est arrivé. Rassure-toi, Pascal, nous veillons sur toi.
Raaver approcha doucement sa main de sa joue. Aussitôt, une sensation de bien-être et de calme profond l'envahit. Il ferma les yeux, se laissa emporter par un souvenir lointain, celui d'une chaude nuit d'été où, enfant, il avait reçu la visite de deux êtres mystérieux venus à son chevet.
Peu à peu, des informations commencèrent à affluer dans son esprit, telles des vagues. Des images, des odeurs, des sensations se mêlaient dans un tourbillon d'impressions. Il revit une route sous la neige, des phares perçant l'obscurité, puis un choc violent, un fracas assourdissant. Son corps projeté comme une marionnette désarticulée et lui, incapable de contrôler ses gestes.
Il ressenti la nuit glaciale, chaque muscle de son corps engourdi par le froid. Lorsqu'il déglutit, un goût métallique de sang envahit sa bouche.
Tout devenait clair, il venait d'avoir un accident.
Le souvenir désormais net le submergea. Le froid se fit plus intense, il voulut crier, mais aucun son ne sortit de sa bouche. Brusquement, il ouvrit les yeux. Il aperçut Raaver, qui le regardait tendrement, en souriant.
- C'était un très grave accident. Je suis désolée de te l'annoncer, mais la vie va bientôt quitter ton corps. Nous communiquons directement avec ton esprit, auquel nous sommes connectés. Tu ne dois pas avoir peur. Nous resterons avec toi aussi longtemps qu'il le faudra. Lorsque tu seras prêt, nous répondrons à toutes tes questions. Nous te fournirons les explications nécessaires. Pour l'instant, tu dois t'accimater. Je reviendrai plus tard.
Avant que Pascal ne puisse réagir, il sentit son esprit vaciller, sombrant dans une obscurité totale.
-------------------------------------------
La voix qu'il entendit était douce et ferme. Il ouvrit doucement les yeux. Un visage se dessina devant lui, un visage qu'il ne connaissait pas mais qui lui paraissait familier tout comme la voix qui l'accompagnait :
— Pascal...
- Raeha ?
Un sourire illumina le visage de l'être majestueux qui se tenait devant lui :
- Oui, c'est moi. Je suis heureux de te revoir.
Raeha était un être d'une incroyable beauté, il étincelait littéralement. Ses longs cheveux blancs comme la neige encadrait un visage au teint clair, tandis que ses yeux d'un vert émeraude brillaient intensément. Il mesurait plus de deux mètres, sa combinaison bleue révélant un corps puissamment musclé. Une ceinture étrange et lumineuse ornait sa taille, assorties à ses bottes blanches. Sa tenue arborait deux écussons distincts, l'un sur la poitrine représentant un motif atomique, l'autre sur l'épaule droite exhibant une sorte d'écriture hiéroglyphique.
Malgré l’incongruité de la situation, Pascal, encore engourdi par l’état second dans lequel il se trouvait, éprouvait un curieux sentiment de bien-être.
- Où est Raaver ? Je pensais qu'elle serait là à mon réveil.
- Je suis là.
Il tourna la tête vers la voix familière et aperçut Raaver. Elle se tenait dans l'encadrement d'un sas. Lentement, l'environnement autour de lui commença à se matérialiser. Les murs, le mobilier, tout prenait forme, même si certains objets restaient encore flous. Tout ce qui l'entourait ressemblait à une scène tirée d'un film de science-fiction. Avant qu'il ne puisse poser la question qui lui brûlait les lèvres, Raaver anticipa :
- Oui, Pascal, c'est ici que nous vivons, temporairement, bien sûr.
- Je suppose que tes questions doivent être nombreuses, ajouta Raeha.
Pascal hésita, la voix tremblante :
- Je... je ne sais pas par où commencer. Suis-je... mort ?
- Raeha eut un rire discret :
- Non, heureusement, tu es bien vivant. Tu as subi un terrible accident, mais nous sommes intervenus à temps.
Puis son visage se fit plus sérieux :
- Pascal, il est temps que je te révèle certaines vérités.
Raeha marqua une pause. Il le fixa avec une intensité troublante.
— Vois-tu, nous ne venons pas de ta planète. Nous sommes... disons, des cousins éloignés. Comme toi, nous sommes humains, mais notre civilisation est bien plus ancienne, notre technologie infiniment plus avancée. Cela fait des siècles que nous veillons sur ton espèce et, crois-moi, ce n’est pas une tâche aisée.
Il y a des millénaires, vos ancêtres ont été modifiés génétiquement. L’Homo erectus est devenu Homo sapiens, l’être que vous êtes aujourd’hui. Nous avons côtoyé ceux que nous appelons vos "Créateurs" et ensemble, nous avons établi un pacte : La Concorde.
Ce pacte stipulait que votre évolution se ferait naturellement, sans intervention directe, mais sous notre surveillance bienveillante. Pendant des millénaires, nous avons respecté cet engagement. Vous avez progressé à votre rythme. Mais cette harmonie a été brisée par l’arrivée d’une autre espèce, une race exogène.
Il marqua un temps, observant la réaction de Pascal, puis poursuivit d’une voix plus grave :
- Ces êtres ont astucieusement réduit votre espèce en esclavage. Ils se firent passer pour des dieux. Ils vous ont transmis la connaissance, vous ont appris l’écriture, l’agriculture, les mathématiques, les sciences physiques, l’astronomie. Mais en échange, ils vous ont divisés. Ils ont multiplié vos langues, vous ont soumis en instaurant rois et nobles, à l’image de leur propre société.
Nous avons tenté d’intervenir, mais vous avez choisi ces faux dieux et leurs promesses. Nous ne pouvions pas aller contre votre libre arbitre. Alors nous avons reculé, mais jamais nous n’avons cessé de veiller sur vous.
Aux heures les plus sombres de votre histoire, nous avons essayé de vous ouvrir les yeux sur votre condition. Parfois, nous avons réussi. Cela nous a encouragés à persister. Nous avons envoyé des émissaires, certains ont été pris pour des prophètes. D’autres pour des imposteurs et ils ont été massacrés.
Les yeux de Pascal s’écarquillèrent, bouleversés par ces révélations. Il ouvrit la bouche, mais aucun mot ne vint. Voyant son trouble, Raeha s’interrompit et attendit, lui laissant le temps d’assimiler l’impensable.
- Veux-tu que je fasse une pause ?
- Non, répondit Pascal, captivé. Votre histoire est fascinante, incroyable. Qu'est-il arrivé ensuite ?
- Nous prêchions l'Amour, la compréhension mutuelle. Eux aspiraient à établir une sorte de colonie, un peu comme des fourmis où chacun a un rôle précis. Leur objectif était de vouer vos vies à cette "Colonie" pour assurer sa pérennité. Mais ce n'est pas tout. Le plus difficile à comprendre reste à venir. Constatant qu'ils ne pouvaient atteindre leur objectif rapidement, ils ont décidé de transgresser un interdit universel. Ils ont altéré le temps. Pascal, il existe des lois cosmiques qu'aucune civilisation n'a le droit de violer, d'utiliser ou de manipuler. La loi du Temps en fait partie. Sans entrer dans les détails, certaines civilisations peuvent manipuler le temps. Lorsque nous l'avons fait, nous avons respecté des règles strictes, notamment celle de rester spectateurs. Nous ne devions jamais interférer avec les "visités", peu importe les circonstances. Mais la "Colonie" a bafoué ces règles. Nous avons été contraints de lutter de la même manière. Malheureusement, nous connaissions d'avance les conséquences de ces actes.
- Les conséquences... ?
- Chaque altération du temps passé engendre la création d'un nouvel Univers, un Univers parallèle si tu préfères. Depuis les premières interventions temporelles de la Colonie, nous avons créé un multivers infini, sans possibilité de retour en arrière. Nous savons désormais que cette guerre sera interminable, sans vainqueur ni vaincu. Nous sommes condamnés à la livrer. Pour cela, nous sommes en quête de "soldats", des hommes et des femmes dotés d'une empathie exceptionnelle, prêts au sacrifice et à l'altruisme, des gens comme toi, avec une conscience plus claire, plus sensible, plus intuitive.
Pascal sentit un frisson le parcourir. Il prit un moment pour choisir ses mots :
- Vous voudriez que je devienne un "soldat", que je lutte pour votre cause, que je... "remonte le temps" ? Tout cela pour me battre dans une "guerre" dont je viens seulement d'apprendre l'existence. Une guerre qui ne semble pas me concerner, et...
Raaver l'interrompit doucement :
- Verdun, la Shoah, Hiroshima, Nagasaki, le Viêt Nam, l'Afghanistan, les Guerres du Golfe. Aujourd'hui l'Ukraine. Ces événements ne sont que quelques-uns des conflits majeurs du XXe siècle, sans compter tous les conflits mineurs, les coups d'État et les actes de terrorisme. Es-tu vraiment sûr que tout cela ne te concerne pas ?
La douce voix de Raaver et ses paroles eurent l'effet d'un coup de couteau.
- Oui, bien sûr, balbutia Pascal. Il les regarda tour à tour, la confusion marquée sur son visage :
- J'ai l'impression de vivre un cauchemar.
Annotations
Versions