Chapitre 3 : Traverser la terre

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Cette voix, ce n'était pas celle de la mère d'Etienne décédée 2 ans plus tôt, mais celle de sa jeune cousine, Lucie. De 3 ans sa cadette, elle venait profiter du voyage avec lui, histoire de "mettre un peu d'ambiance", comme elle l'avait dit elle même. Malgré la migraine intense qui le frappait après son réveil, il enfilait rapidement un pantalon et un t-shirt qu'il recouvrait d'un épais gilet. Nous étions au mois d'octobre et nos héros se rendaient dans une petite ville de montagne de Lozère, il fallait bien prendre quelques précautions. Ceci fait, la petite équipe embarqua à 5 heures du matin, prête à décoller vers ce bled paumé où le wifi et le réseau ne devaient pas encore avoir été inventés. Une fois parti, le petit groupe somnolait dans la voiture. Il faut dire qu'après la sortie de l'autoroute, il n'y avait pas grand chose à voir ni à faire. Au bout d'un moment, Lucie se souvint qu'elle avait prêté de l'argent à son cousin préféré.

-10 balles tu dis? Attends, je te rend ça.

Le jeune homme sortit alors son portefeuille et l'ouvrit, sortant un billet de 10 qu'il rendit immédiatement à sa cousine. A l'intérieur se trouvaient de nombreuses cartes. Sa carte bleue bien sûr, mais aussi de nombreux tickets de caisse indiquant une réduction aux prochains achats, une carte de membre d'une salle de musculation qui ne lui avait de toutes façons jamais servi, une carte d'imprimerie et évidemment, la fameuse carte Auchan. Il avait aussi ses papiers d'identité et son permis de conduire, derrière lesquels se cachait une photo d'un groupe de 4 personnes dont Etienne, tous souriants devant le pont d'Aquitaine. Toutefois, un léger détail attira son attention: une pièce de 100 francs. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire ici? Par réflexe, il la rangea dans sa poche.

La montagne était haute, le chemin était rocailleux. Une atmosphère étrange s'échappait de cet endroit. Une sorte de pression, de pesanteur aggravée... Ils étaient arrivés à destination. L'endroit était sinistre et chaleureux, accueillant et repoussant, en un mot: fascinant. Tous trois sortirent de la voiture qui venait de se garer devant la bâtisse. C'était un petit hôtel devant lequel plusieurs voitures étaient garées, un immense séquoïa était planté près du bâtiment et le surplombait complètement. Posant leurs affaires dans leur chambre, Lucie, Etienne et Georges s'étirèrent un instant avant de profiter du confort qui leur avait été offert.

-Ah! Ça va te faire du bien, tonton! lança Lucie avant de se jeter sur le lit.

Georges venait à l'instant d'acheter le journal "L'Equipe" et commençait déjà à le lire en s'installant. Etienne récupéra alors une petite enveloppe qui avait été laissée à l'entrée, il l'ouvrit, elle contenait un programme pour une semaine ainsi qu'une lettre signée de la main de Gatignol, Etienne s'en saisit alors avant de la lire.

"Cher Georges,

J'espère que vous et votre famille serez satisfaits de votre séjour dans l'hôtel que nous avons réservé pour vous! Si vous rencontrez un quelconque problème, n'hésitez pas à vous adresser à Gabriel, l'un de mes neveux qui travaille au service, vous verrez, c'est un bon gars! Je vous ai préparé un petit programme que vous pouvez suivre concernant les activités à faire dans la région! N'hésitez pas à passer au musée d'art, l'exposition y est particulièrement impressionnante cette année, et comme notre séquoia, il y aura de nombreuses oeuvres ramenées d'Amérique! Prenez soin de vous, et à la semaine prochaine.

Mes amitiés

Louis"

-C'est sympa de sa part! répondit Georges, on ira voir ce musée demain, ça vous dit?

-Ouais, carrément! lui dit sa nièce.

Le lendemain même, ils se trouvaient devant le musée, Yves, Etienne, Lucie... Et Rémy. Il s'agissait d'un jeune homme d'une vingtaine d'années d'une chambre voisine de l'hôtel s'étant particulièrement rapproché de Lucie, et cette situation était loin de plaire à Etienne qui ne souhaitait pas pour le moins du monde être accompagné de ce zouave. Comme à son habitude, il ne disait rien, il laissait couler. Il avait un comportement très agaçant, en particulier avec son Etienne, qu'il ne cessait de vanner. "Il est chelou, ton frangin!" "Eh oh, tête de mort?", et j'en passe. Bien sûr, Etienne n'en avait rien à foutre. Il se promenait, s'allongeait de temps à autres dans l'herbe et songeait de temps en temps. Son père, il l'adorait, mais il savait qu'il ne lui dirait jamais, c'était la même chose pour lui, mais ça ne le dérangeait pas, il n'avait pas besoin de le dire pour le savoir. Et puis il songeait à autre chose, regardait le paysage, en roulait une de temps en temps. En entrant, Etienne remarqua que de nombreuses personnes étaient présentes. Ils étaient au moins 25 en plus de lui et de sa famille, ce qui peut vous sembler relativement faible. Néanmoins, la pièce centrale était relativement petite, et il ne faut pas oublier que nous nous trouvions en Lozère, dont la densité de population au kilomètre était sans doute inférieure au nombre de dents dans la bouche d'El Risitas, l'idole du jeune garçon...

Toujours est-il que ce musée exposait de nombreuses sculptures amérindiennes éveillant la curiosité d'Etienne. Il y avait aussi des peintures impressionnantes, teintées de mystère et aux douces odeurs d'Ouest lointain... Et puis il la vit. Elle était immense, stupéfiante, terrifiante. C'était la statue d'un costume de shaman, sa tête était un énorme crâne de caribou, le reste semblait être un squelette recouvert d'une cape... Etait-ce réellement le squelette d'un shaman...? Toujours est-il que les sens d'Etienne semblaient se réveiller à cet instant, il ouvrit grand les yeux et recula de quelques pas, sentant un frisson dans sa nuque. Il regardait autour de lui et remarquait que personne d'autre que lui ne regardait la statue qu'il ne pouvait plus quitter des yeux... Commençant à se sentir un peu étourdi, le jeune homme ne voyait ni son père ni sa cousine, et décida de prendre un peu l'air. Sortant dehors, il contemplait la nuit étoilée et la large forêt qui entourait le musée. Tout était si calme. L'air était doux, la nuit fabuleusement éclairée, et ce bois baigné de mystère intriguait de plus en plus Etienne qui, se sentant bien plus détendu esquissait un petit sourire... Mais l'inconnu laisse souvent place à l'inquiétant, et le superbe, au monstrueux.

Un bruit se fit entendre, une voix. Une voix de femme. Une voix de femme? Une voix de jeune femme. Non...? Le jeune homme tourna alors brusquement la tête et aperçut la voiture de son père, elle semblait trembler. Il fut alors pris d'un doute, courut vers la voix qu'il entendait et se rapprocha. C'étaient Lucie et Rémy, ils faisaient ce pourquoi la nature les avait créé à l'arrière de la Mondeo, ce qui rassura Etienne dans un premier temps.

-J'espère qu'ils se sont bien protégés, pensait-il, avant de les laisser tranquille et de rebrousser chemin.

Mais le sourire qui avait commencé à réapparaître sur le visage d'ange d'Etienne disparut rapidement lorsqu'il entendit le premier "Non". Il se rua alors vers la portière, tentant de l'ouvrir et se rendit compte qu'elle était verrouillée. Il brisa alors violemment la vitre en donnant de multiples coups de poings, pieds et coudes. C'est à cet instant qu'il vit quelque chose d'effroyable: Rémy s'était tourné vers lui et son visage était devenu méconnaissable. On l'aurait dit marqué de nombreuses cicatrices, ses pupilles avaient virées au blanc total et il dégoulinait de sa gueule béante une bave infâme qui tombait en plein sur le corps dénudé de sa victime.

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