Maya, assise près de la fenêtre, observait les flocons tourbillonnant doucement dans le ciel avant de recouvrir le sol d'une blanche couverture.

La grosse horloge au fond de la classe sonna dix huit heures c'était la veille de noël et elle était toujours là à attendre Valerian qui comme à son habitude était en retard.

À six ans et demi, elle était bien assez grande pour rentrer toute seule alors pourquoi sa mère demandait-elle toujours à ce gros béta de venir la chercher ! Ce bon à rien semblait prendre un malin plaisir à la laisser se morfondre seule au fond de la classe.

La sonnerie du téléphone brisa le pesant silence qui régnait dans l'école, l'institutrice quitta la pièce pour aller répondre. Maya la regarda s'éloigner d'un pas souple puis évalua la distance qui la séparait de la grande porte, et si…

Sans réfléchir davantage, elle se leva, enfila son manteau puis s'approcha silencieusement de la lourde porte, celle-ci n'était pas fermée à clef et ne grinça pas lorsqu'elle tourna le loquet pour se faufiler à l'extérieur. Elle traversa la cour d’un pas rapide, puis franchit le petit portail qui donnait sur la rue. Personne ne s'était aperçu de son départ.

Elle allait montrer à ce Valerian qu'elle n'avait pas besoin de lui.

Le vent soufflait et la neige tombait de plus en plus fort. Maya resserra son écharpe autour de son cou.

Elle avait du mal à marcher et il commençait vraiment à faire froid elle allait bientôt ressembler à un bonhomme de neige si elle ne se dépêchait pas de rentrer.

Le chemin semblait beaucoup plus long que d'habitude, avec toute cette neige, elle avait peut-être raté la deuxième rue à gauche. Il fallait qu'elle revienne sur ses pas jusqu'à l'école et fasse un peu plus attention. L'horloge de l'église sonna sept heures et Maya commença à paniquer, cela faisait beaucoup trop longtemps qu'elle était dehors, elle s'était surement perdue.

- Bonjour p'tite gamine, tu fais quoi dehors par ce temps ?

Cette voix surgit de nulle part était celle d'un vieil homme, qui dégageait une forte odeur de vomi et d'alcool. Il exhiba un sourire édenté en s'approchant de la fillette.

Maya apeurée se mit à courir de toutes ses forces, elle entendit la démarche lourde et pesante de l'homme qui la poursuivait, il trébucha, se mit à jurer puis abandonna la course.

Elle s'était enfuie sans réfléchir, s'égarant davantage dans la grande ville. Elle était à présent seule, dans le noir, il lui semblait avoir parcouru des milliers de kilomètres et il n'y avait personne à qui demander son chemin.

Elle avait faim, froid et peur et pensa tout à coup à l'horrible conte que sa grand-mère lui avait lu un soir d'hiver, c'était une petite fille qui craquait des allumettes pour se réchauffer la nuit de noël et bien qu'elle se soit longtemps demandé comment ce minuscule bout de bois pouvait apporter de la chaleur, elle aurait donné cher à présent pour en avoir une boite ou deux.

Elle fredonna quelques paroles de la chanson du petit papa noël pour se donner du courage, mais le cœur n'y était pas. Le vent soufflait de plus en plus fort et les flocons tombaient de plus en plus dru.

Une lumière au loin attira tout à coup son regard elle se mit à courir dans sa direction, s’enfonçant de plus en plus dans la lourde neige, épuisant ainsi ses dernières forces.

Elle tomba une première fois, se releva avec difficulté pour s'écrouler à nouveau quelques instants plus tard.