4. Le départ
Un matin, à l’aube, elle fut réveillée par les sœurs qui la conduisirent, le chiot dans ses bras, auprès du père Gabriel. Les jours précédents leur départ il avait continué ses visites quotidiennes à distance, regardant Lilith évoluer avec l’animal non sans espoir. Ils se sauveraient l’un l’autre.
- C’est le grand jour, nous partons, Lilith. Notre destination est un camp militaire qui se trouve à la frontière nord. Ne tardons pas, car notre voyage sera long.
À son habitude, elle suivit les religieux sans rechigner, s’installa dans une calèche de fortune tirée par deux chevaux, son nouvel ami toujours contre son cœur. Ni les sœurs, ni la Mère supérieure ne parurent affectées par le départ de Lilith, pourtant née au couvent. Pas plus que l’enfant ne se retourna vers ce qui lui avait fait office de maison et de famille. Le père avait craint de provoquer un traumatisme supplémentaire en la déchirant de son milieu, mais il se demandait si cette absence de réaction n’était pas pire encore. Il parlait à Lilith au cours du voyage, se donnant l’impression d’un monologue sans fin, mais les réactions de la petite lui montraient qu’elle était attentive à son verbiage, bien qu’aucun son ne sortit jamais de sa bouche.
Leur voyage se poursuivit, laissant apparaître une routine au fil des jours, levé à l’aurore et départ sitôt le repas avalé, un arrêt au zénith pour reprendre des forces et profiter d’une sieste à l’ombre des arbres, monologue intarissable du bon Père et mutisme de l’enfant qui l’écoutait avec attention, du moins lorsqu’elle ne jouait pas avec son petit compagnon.
Annotations
Versions