Porte
La jeune fille tournait, retournait, décortiquait sans cesse ces mots: "tu es un monstre". L'était-elle? Vraiment? Oui elle se montrait parfois égoïste... Il lui arrivait d'être lâche aussi... On disait d'elle qu'elle était trop gentille, autant dire niaise. Bête même peut-être. Oui, peut-être. Peut-être qu'elle n'était qu'un monstre stupide dont on pardonnait les lourds défauts seulement parce qu'elle était jolie. Elle avait aussi de nombreuses mauvaises habitudes dont elle n'arrivait pas à se défaire. Elle n'avait pas envie de faire d'efforts physiques trop intenses, elle préférait la solitude à la foule, le silence au bruit... Elle était peut-être associale? Elle avait toujours dit préférer la compagnie des animaux à celle des humains, mais était-ce sincèrement une préférence? N'était-ce pas par dépit? N'était-ce parce que seuls les animaux savait de taire assez longtemps pour s'entendre en soi? N'était-ce pas parce que le silence de ces êtres lui permettait enfin de s'entendre et de s'exprimer? N'était-ce pas profondément égoïste de vouloir vivre au milieu d'être dépendants de soi? Etait-ce pour se sentir mieux, meilleure, superieure? Avait-elle un complexe du genre? Ou pire, un syndrome? Elle ne dormait plus, ne mangeait plus, cherchant tout ce qui pouvait lui donner des indices sur sa monstruosité. Tout ce qui prouvait, que oui, c'était elle le monstre, le bourreau. Terrasser par ces pensées et les émotions qui en découlaient, elle se laissait envahir par ses ombres, frolant le suicide. Il lui fallait sortir de la prison doré, il fallait sortir et partir loin, loin de ce château, loin de ce qu'il lui renvoyait. Elle tenta sa chance. A sa grande surprise, la porte était ouverte. Elle n'hésita pas deux secondes et détala, fuyant le chateau enchanter une seconde fois, mais seule avec les deux chiens qui ne la quittait pas. Et aussi sans aucuns itinéraire précis, elle n'avait aucun désir de retrouver des amis. Elle alla sans repères, sans but, se fuyant elle-même, et au bout de plusieurs heures de marche, elle se laissa tomber sur un parterre de mousse, au pied d'un immense chêne, non loin coulait un ruisseau. Il faisait sombre, humide, la terre était noir et gluante. Elle sanglota de plus belle, accablée de chagrin, éreintée, chancelant. Une voix ne cessait de lui répéter:" C'est toi, c'est toi le monstre!" Et tous les signes revenaient en boucle la tourmenter. Alors qu'elle hurlait au désespoir, une voix se fit entendre:" T'en as du coffre pour une petite skinny!
- Hein!? Pardon!? Skinny? Je...
- Ouais, maigrelette. Une femme d'une quarantaine d'année, vêtu de vêtements chauds sans prétention, les cheveux longs et or, un sourire immense et aimant dévoilant ses dents, légèrement potelée, s'avança avec douceur.
- Ah, oui... La jeune fille se recroquevilla un peu, tentant de cacher ce corps plus d'os que de chair, honteuse. Maigrelette...
- Ca à pas l'air de péter le feu ma choupinette!
- On se connait madame, mademoiselle?
- Oh non! Pas madame! Mademoiselle! Elice, pour vous servir!
- Me servir?
- Oui, tu te souviens, à la base on est un peu dans un conte de fée, et il se trouve que moi, je suis la fée de ce conte là! Et toi l'héroïne, alooooors...?
- Tu es ma bonne fée?
- Par A + B!
- Vous plaisantez?
- Quelque chose pèse très très lourd dans ton coeur et je voudrai t'aider à t'en séparer, même si ça peut faire un peu mal, c'est vrai...
- Ta grimace me fais un peu peur, tu es certaine que savoir ce que tu fais? Je ne sais si je pourrai le supporter...
- Qu'as-tu à perdre à m'écouter, n'es-tu pas déjà égarée, désespérée, un peu cinglée?
- Euh, non mais! Qui vous permet...?
- Pardonnes moi, s'il te plaît! Je jure, je veux ton bien, ton bonheur, ta fortune...
- Je ne mérite rien de tout ça...
- Comment ça?
- Oh... Les larmes montèrent aux yeux de la jeune fille, elle contracta son visage pour les ravaler, elle ne réussit qu'à les faire couler. Elle lâcha un sanglot. La femme qui se disait fée, vint entourer la jeune fille de ses bras. Celle-ci se laissa faire, se laissa aller, à gros hoquets et chaudes larmes. L'étreinte dura un moment, puis elle se reprit. Merci. Dit-elle, un peu gênée.
- Je t'en prie ma Jolie.
- Oh non, je t'en prie.
- Puis-je en savoir d'avantage. Demanda la fée, intéressée.
- Je suis un monstre idiot, le corbeau dont brille le ramage! Je suis... je suis une horrible personne...
- Pourquoi penses-tu cela? Demanda la curieuse.
- Facile, je suis égoïste, paresseuse, gourmande, associale, lâche, envieuse, orgueilleuse...
- Rien d'autres? Demanda doucement la fée à la malheureuse.
- ... peureuse.
- La plupart de ces défauts tous les gens les ont. Et la plupart ont aussi des qualités. Tu en a certaines que tu sais possédées. Sois franche, tu sais aussi aimer.
- Il y en a qui dise que je suis gentille, mais c'est surement pour pas dire que je suis niaise.
- Pourquoi penses-tu cela? ëtre gentil en ce monde, c'est plutôt balèze!
- La plupart des gens sont hypocrites. Et je me suis faite souvent avoir.
- Et toi tu ne l'es jamais? Tu n'as jamais abusée de ton pouvoir.
- Si... Si, c'est arrivé. Tu vois, je suis un monstre...
- ... d'humanité! Certains philosophe ont dit que l'hypocrisie est une sorte de tampon qui maintient un certain équilibre social.
- Alors pourquoi ça me fais si mal? Je veux vivre en harmonie, en équilibre, en authenticité.
- Pour cela c'est par toi qu'il te faudrait commencer. Que reproches-tu à tes ennemis, ceux pour qui tu ressens une réellé inimitié?
- Leur arrogance, leur ego surdimentionné, leurs mensonges, leurs stratégies afin de tout contrôler dans un seul but, le pouvoir, tout ce qui les attire c'est avoir.
- Et toi, quel est ton but?
- La paix, être dans l'harmonie, l'amour, le partage. Seulement moi-même je me laisse parfois gagner par la rage.
- Arrives-tu à discerner? A reconnaître les choix qui te raprocheront de ton but ou ceux qui t'en éloigneront?
- Je ne sais pas vraiment...
- Tu sais, la paix, mon amie, c'est comme la guerre, ça s'apprends!"
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