La cave.
Pendant des jours, des semaines, des mois, elles avaient poussé des bennes remplies d’ordures hors des bassins de décantation.
Ces boues qui se déposaient au fond des réservoirs étaient extraites par des esclaves et traitées pour aller augmenter la colline de terreau.
Au début elles avaient porté des paniers suspendus à un fléau, puis Ashka, la nouvelle intendante, avait préconisé l’utilisation de wagonets pour plus de rentabilité et d’efficacité.
Le couple d’iŭga était devenu plus fort, les muscles de leurs cuisses s'étaient développés, elles avaient maintenant une silhouette bien plus athlétique, sans une once de graisse.
La plante des pieds d’Antje avait durci au contact des traverses de la voie ainsi que des scories qui jonchaient le chemin. Les bennes qu’elles poussaient, étaient toujours entièrement chargées.
Le seul repos ou soulagement qu’elles recevaient durant la journée, c’était quand, au retour, elles freinaient leur wagonet vide du sommet de la colline de terreau jusqu’ aux bassins. Ou pendant que des esclaves et non des iŭga remplissaient leur benne, durant cet arrêt. Là d’autres esclaves, les plus chanceuses les abreuvaient et leur balançaient des seaux d’eau, mais c’était rare.
La fonction première des iŭga, était de tirer, de pousser ou de porter des charges. En aucun cas elles ne devaient employer leurs mains pour prendre ou manier un outil. La nourriture c’était un peu améliorée en quantité et en qualité depuis l’épisode des cages, et surtout grâce à la nouvelle Intendante. Mais bien que les rations aient été augmentées, elles étaient toujours affamées, parce qu’elles travaillaient tellement dur, alors naturellement elles avaient toujours faim.
Antje s’était réveillée avec un début de migraine. Elle fouilla du regard la pénombre qui l’environnait, un peu de lumière coulait de l’unique soupirail du haut d’un des murs. Ce qu’elle avait ressenti durant son passage de la Civitas au Dépotoir n'était rien d'autre que de la honte et de la douleur. Toutefois, elle s’était rapidement habituée à cette vie de servitude, au fouet, à la nudité constante, à l’absence de toute lumière artificielle, ainsi que des commodités et du confort qu’elle avait jadis connus.
Déjà bien des fois avant sa maladie, elle avait ressenti le sentiment étrange de ne pas mériter sa vie de Duchesse richissime. Que son destin pouvait basculer, qu’elle marchait sur un fil comme une funambule. Elle avait eu le pressentiment d’être promise à un destin farceur avant même d'avoir franchi la porte du cabinet médical. Lorsque le médecin avait diagnostiqué sa leucémie, il lui semblait que, quoiqu’injuste, c’était le prix à payer pour racheter les turpitudes de sa famille d’industriels proche du gouvernement Botha. Jadis elle avançait comme faisant partie de la classe la plus privilégiée. L’apartheid avait été le moteur de cette richesse et de ce pouvoir et elle en avait profité plus que de raison. Elle pensait que c'était la façon dont les choses devaient être. Après tout, la vie des noirs et des coloured était certainement meilleur sous l’apartheid, que de ce qu'elle aurait été, si on les avait simplement laissées à eux-mêmes, dans un monde où ils seraient retournés à la savane. Antje n'avait jamais pensé à ces emplois pénibles, dangereux, dégradants, toujours mal payés réservés aux noirs. Mais elle savait de par sa propre expérience qu'il y avait trop de négros et qu’il fallait bien les employer. Chaque magasin en avait au moins un pour les tâches ingrates.
Maintenant elle se sentait coupable, non pas pour son autosatisfaction d’avoir vécu dans un monde parfait, mais de son rôle dans les rouages même de cette ségrégation. Ici elle n’était qu’une iŭgum bien moins qu’une esclave et elle avait vite compris où était sa place. Cela signifiait qu’aucune lueur d'espoir n’était à attendre pour un « traitement spécial » et que le vœu d’une quelconque compassion devait être chassée. Pour ne pas devenir folle, elle s’était convaincue qu’elle était au bon endroit et que sa position était méritée. Elle évacua ses pensées d’un autre temps, d’un autre lieu, pour revenir à sa réalité.
Sa vision s’ajustait lentement à cette obscurité. C’était le matin parce qu'il y avait un peu de lumière. Encore heureux que depuis quelques temps, elle ne portait plus en permanence sa cagoule sans ouverture au niveau des yeux. Le palefrenier les avait privées de toute vision durant plusieurs semaines, histoire de les punir ou de rire, il avait probablement eu ses raisons, allez savoir.
C’était il y a longtemps. Trois autres filles étaient avec elle. L'une, qu’elle connaissait, était étendue sur le côté, ronflant doucement. Les deux autres assises sur leurs talons, dos au mur de briques, essayaient d'avoir le moins de contact possible avec le sol de terre fangeux. Elles regardaient la porte en pleurant.
Antje, ne faisait plus attention à son collier en bronze, ni à la lourde chaîne qui la reliait à Chiendri. Tête basse, sans retenue et sans gêne, elle urina à l’endroit même où elle était, elle commença à vider sa vessie. D'abord ce fut un ruissellement, puis un déluge qui siffla entre ses jambes. L’odeur d'ammoniaque lui chatouilla les narines. Elle éclaboussa ou plutôt, elle aspergea sa compagne. Puis elle sentit une boue chaude suinter entre ses orteils. Elle était dans une des caves du Dépotoir, la même que celle où elles avaient été amenées après qu’on les ait assignées à l’attelage d’un chariot. C’était il y a combien de temps déjà ? bientôt, elles seraient nourries.
« Bientôt » et « en ce moment » étaient les seules notions qu'elle employait facilement. Du moins, ce sont les seuls mots que Chiendri connaissait et lui avait appris dans sa langue.
Elle avait bien essayé de lui expliquer cette notion qu’était le temps. De parler de cette définition proposée par Godin, de milieu indéfini et homogène où se déroulent les événements naturels et l'existence humaine. Mais cela, c’était compliqué. Quand Chiendri avait questionné, demandant : Indéfini ? homogène ? C'est-à-dire ? ça c’était quand elles étaient encore à la Civitas.
Enfin cela faisait passer le temps sous l’appentis.
Une autre fois elle avait tenté d’aborder la notion de temps qualitatif. Par opposition au temps de la science, essentiellement quantitatif, le temps de la conscience, vécu. Qu’un tel temps n'était pas homogène et qu’il correspondait au ressenti, on pouvait avoir l'impression que le temps passe plus ou moins vite. En ce sens, le temps où l'on s'ennuie et où l'on s'amuse sont différents, en tant qu'émotionnellement distincts. Trois jours qu’il avait fallu pour expliquer juste les mots science, conscience, homogène. Tous ces mots dont Chiendri n’avait pas les équivalents avec le maigre vocabulaire d’une esclave par nature. Alors la notion de futur, du futur d’une iŭgum ? Une chose était certaine, sa compagne lui avait appris à vivre l’instant présent, qui seul comptait. Depuis elles avaient été transférées au Dépotoir, elle vivait et pensait comme une iŭgum. Alors « demain » ne signifiait plus rien, car il lui serait impossible de le distinguer d'aujourd'hui. Il y avait belle lurette qu’elle avait perdu toute notion de calendrier. Pour ce qui était d’un futur lointain, c’était quelque chose auquel elle évitait de penser. Elle pourrait continuer à vivre comme maintenant, pendant combien de temps ? des mois ? des années ? avant qu'elle soit physiquement handicapée ? Elle ne voulait pas penser à ce qui se produirait alors. De temps à autre, des angoisses sur son futur l’assaillaient, mais aucune perspective n'était bonne. Elle trouvait ennuyeux de ne pas savoir depuis combien de temps elle s’était éveillée dans une des cellules de la Civitas, combien de mois ou peut-être d’années ? mais après tout, quelle différence cela faisait ? Ce n’est pas qu'elle était indifférente aux événements, ou incapable de les analyser. Elle était sensible et très intelligente, mais elle avait changé, beaucoup changé depuis son arrivée sur cette maudite planète. Elle pensait maintenant à elle, en tant que deux êtres intimement imbriquées, une Iŭgum et Antje la terrienne. Il y avait maintenant cet animal, avec des émotions bestiales, physiquement sensible qui, hébété, était toujours à la recherche de nourriture, d'eau, de sommeil et de sexe. Et il y avait cette jeune femme, hautaine, arrogante, qui semblait flotter au-dessus de l’iŭgum. Tout en se tenant éloignée, elle observait ironique et méprisante cette sous-esclave, cette chose plus abjecte qu’une kafir*. Antje la Duchesse ne pouvait pas agir. Elle ne pouvait que jouir du spectacle, de cette déchéance qui lui donnait une sorte de plaisir à la fois malsain et masochiste. Heureusement son esprit était libre, il pouvait encore errer vers des concepts philosophiques. Elle réfléchissait à de petits riens, comme « bientôt » et « en ce moment ». Parfois elle avait l’obsession de vouloir mesurer le temps. C’est vrai que dans son ancienne vie, quand elle était blanche, libre et riche, elle divisait le temps en seconde, minutes, heures, jours… Elle avait un agenda avec des rendez-vous. Elle avait même un beau stylo en platine avec une plume en or. A cette époque, avant sa maladie, le présent n’était que plaisir parfois futile. C’était un instant glissant entre un futur radieux mais mesurable et un passé tout aussi mesurable. Maintenant, le temps était complètement différent. Et bien qu’elle n’aima pas ce philosophe du nom de Kant, il fallait bien lui accorder qu’il n’avait pas tout à fait tort, en voyant dans ce que l'on nomme le temps, une forme a priori de sa sensibilité. Que son existence était surtout dépendante de l’humeur du sujet. Il est vrai que 5 minutes de fouet et 5 minutes de repos, si d’un point de vue newtonien, c’était la même chose… il n’en allait pas de même sous sa forme kantienne et sa vie était plutôt à voir sous cette forme. Le moment présent représentait presque l'intégralité de son existence. Pour ce qui était du futur, qui pour elle était plutôt angoissant, elle faisait en sorte qu’il existe à peine ; et le passé, était un concept élastique de… « hier » qui pouvait être une notion utile, une date encore claire dans son esprit. Mais pour « Avant-hier » c’était déjà beaucoup moins certain. Il suffisait que quelque chose de vraiment remarquable se produise juste un jour ou deux avant, ou encore quelque jours précédemment … de sorte que cette période « d’avant-hier » se fonde en un autre concept de « récemment ». Pour tout le reste qui venait après « récemment » cela rentrait dans un tiroir qu’elle avait étiqueté comme « il y a longtemps ».
Dans la cave, il y avait maintenant un peu plus de lumière et beaucoup plus de mouches. Elle mesurait approximativement dix coudées pour chacun de ses côté. Les murs de briques lépreuses s'élevaient sur huit coudées ou davantage, jusqu’à un étroit soupirail, qui jouxtait le plafond, où pendait quelques chaines rouillées. Il régnait en cet endroit une pénombre fraiche et c’était bien la seule chose positive, car il fallait avoir le cœur bien accroché pour supporter la puanteur, les insectes de toutes sortes et la boue grasse d’un sol qui avait recueilli les excréments de plusieurs générations d’iŭga. Rien n’était prévu pour leurs besoins, pas de seau, pas de paille, rien. Comme des truies, elles mangeaient et dormaient dans ce lisier. Contre le mur du soupirail, reposait une auge de pierre jamais nettoyée grouillante de mouches. Dans un coin une baille de bois contenait un peu d'eau, c’était le seul mobilier dont elles disposaient. Ce qui la surprenait aussi c’était l’absence de tout graffiti. Cependant, il vrai qu’avec les bras entravés dans le dos, cet exercice scriptural ne devait pas être aisé.
Antje, avait grandi d’au moins deux ou trois pouces, sa poitrine, qui avait pris encore du volume, était restée ferme. La marque sur son front indiquait qu'elle était désormais et à tout jamais une iŭgum. D’ailleurs s’il lui fallait une preuve supplémentaire, il suffisait de constater que sa peau avait pris une teinte bleu clair. Sur le sommet de son crâne rasé, il ne restait maintenant qu’une sorte de petit chignon de cheveux qui, s’ils avaient été lavés, auraient été blonds, presque blancs, ils étaient attachés en une tresse simple. Assez curieusement pour elle, la chose la plus humiliante était cette coupe de cheveux réservée aux iŭga du Dépotoir.
Elle observait attentivement Chiendri, qui partageait depuis tant de temps sa chaine de collier. Presque sur un ton neutre, elle l’invita à ne plus bouger. Puis avec sa bouche, elle traqua deux énormes blattes aussi grosses que son pouce, qui couraient sur la poitrine humide de sa compagne. Elle en goba une qui craqua sous sa dent, pendant que l’autre dévalait le corps de Chiendri, pour se réfugier sur son pubis humide. Celle-ci écarta largement les jambes, du moins autant que le lui permettait la chaine de ses chevilles. Elle exposa la manille de son sexe glabre ainsi que le cafard qui cherchait à le pénétrer. Antje, qui avait maintenant l’habitude de telles chasses, du bout des lèvres cueillit l’insecte. Gémissante, sa compagne remua la tête. Antje qui avait coincé le gros cafard entre ses dents l’embrassa, lui faisant don de la blatte. Nullement troublées, leurs salives se mélangèrent, alors que le cafard changeait de propriétaire. Leurs lourds anneaux nasals se balançaient, s’entrechoquaient. Puis bien vite ils retrouvèrent leur place, reposant sur le rebord inférieur de leurs lèvres supérieures. Chiendri roula sur elle-même dans la fange tiède et ouvrit un œil trouble.
- Ça va ? demanda Antje, inclinant la tête vers l'autre.
Chiendri sourit timidement, alors qu’elle se passait la langue sur les lèvres. Elle ouvrit juste son autre œil et continua de regarder autour d’elle. Elle avait peut-être dix-huit ans, elle n’avait jamais connu la liberté. Son chignon de cheveux couleur de jais au sommet de son crane chauve ressemblait dans la forme à celui de son amie et de presque toutes les iŭga du Dépotoir.
Après quelques secondes, Chiendri, qui regardait toujours dans le vague, soupira. Elle était de nouveau sur le dos. Antje, la comprit, et sans autre forme de procès l’enjamba, se voûta en avant pour placer sa bouche au-dessus du sexe de sa camarade. Elle commença à le lécher. Puis elle prit en entier la manille dans sa bouche. Son anneau de langue jouait avec le manillon, ce son métallique avait la faculté de les exciter. Puis il y eut le gargouillis fugitif de l’aspiration, comme si elle la buvait à grand bruit et goûtait le doux nectar de sa sœur de chaine. En même temps, elle arqua ses hanches vers le bas, sa chatte encore trempée d’urine se plaqua sur les lèvres de Chiendri, l’étouffant de son parfum musqué. La traction sur son clitoris envoyait des décharges électriques sur son bourgeon rosé. Elle gémit et de concert elles se sucèrent plus ardemment. Elles étaient ruisselantes de cyprine. Chiendri l’observait avec délectation pendant que ses hanches se soulevaient vers la langue et les lèvres de son amie. Cette pensée joyeuse était due à sa jouissance qui montait.
Pour Antje, son état d’iŭgum impliquait qu’elle n’était qu’un animal et que désormais, elle devait agir comme tel, en toute circonstance, n'importe où, et devant n’importe qui. Sa compagne n'était aucunement différente si ce n’est qu’elle n'avait rien connu d’autre et qu’elle n’avait aucune notion de décence ou de pudeur. Qu’elle était dressée à satisfaire tous les ordres de ses maitres. Pour l’Afrikaner, son humanité s’était envolée en même temps que toute trace de honte. Elle avait réussi sa conversion en une véritable trainée capable de combler un chien ou n’importe quel esclave. Maintenant on aurait pu tout lui faire sans qu’elle ne s’en offusque.
Chiendri, était toujours étonnée que sa noble amie attaqua sa chatte ou la bite d’un chien avec une spontanéité si naturelle. C’était comme la première fois où elle avait été baisée par les molosses des gardes. Elle n’avait pas cillé, elle en avait même joui. En réalité Antje, savourait sa déchéance, elle se délectait de son avilissement, c’est comme si elle avait voulu montrer à la face du mondes à quel point elle se moquait de son éducation. Déjà Antje, au-dessus du visage de Chiendri était secouée de spasmes pendant que sa copine comptait le premier des orgasmes de sa compagne. « Quelle salope ! » pensa-t-elle avant qu'elle estima, « en fin de compte elle est comme moi maintenant, » les choses étant ce qu’elles étaient, elle se focalisa entièrement sur sa jouissance et sur le va-et-vient d’une langue complice. Son orgasme fut entrecoupé d’un flot de pisse et de diverses sécrétions. Antje d’abord surprise s’en délecta. Un filet d'urine ruissela sur son menton. Elle en rit.
Les deux autres iŭga sans mot dire, presque éberluées, regardaient cette scène de luxure.
Antje et Chiendri s’étaient agenouillées, elles étaient en sueur et d’une saleté repoussante mais elles n’en avaient cure.
- Vous êtes nouvelles ? vous n’avez pas encore bleuies et vous êtes encore propres. S’étonna Chiendri.
- Oui, d’hier, à peine nous sommes arrivées au Dépotoir qu’on nous a jeté ici. Dit l’une des deux, une rousse à la poitrine menue. Et sa compagne renchérit : nous avons perdu à la loterie et nos familles n’ont pas pu nous racheter. C’est la loi, notre vie est foutue.
- Vous pouvez nous raconter ? avant ma copine était une esclave de peine de naissance et moi je suis une étrangère. On ne connait rien ou presque de ce monde, ou des citoyens de Yuchekha. Ça fera passer le temps avant la bouffe. Nous c’est la chaine 51 et vous ?
- Nous on nous a dit qu’on était la 192. Vous voulez savoir quoi ?
- Tout, après on vous dira comment survivre.
La rousse qui était plus loquace commença :
- A Yuchekha, on croit au Dieu des Fleuves, au commerce, aux contrats et aux lois. Et l’une d’elle a fait notre malheur. Celle sur la servitude, car dans note cité, on ne tient responsable l'individu qui a signé volontairement un contrat et seulement pour la durée du contrat. Il est ainsi légal pour une personne de devenir une valeur mobilière pour un autre citoyen, pour la Guilde ou de la Civitas et cela pour la durée d'un contrat. De tels accords peuvent être conclus par des courtiers de commerces autorisés. Ces courtiers comme la Guilde Souveraine, rédigent les contrats et les conditions de service, conformément à la loi. Les commissionnaires démarchent les familles et proposent les contrats qui sont en général honnêtes. Le compromis inclus des règles cohérentes ainsi qu'une « prime à la signature » avec la durée du service et salaire annualisé tout du long du contrat. Le bonus et le salaire peuvent être tenus au profit de l'individu sous contrat, ou payés au profit de leur famille. Tout dépend des termes du contrat. Je m’appelle Arielle, et j’ai signé un tel contrat.
Elle se contorsionna pour soulager ses bras étroitement entravés dans son dos.
- ça fait mal, jamais ils nous libèrent de ces chaines ?
- Jamais quand on est au repos. Mais on s’y habitue. La bonne chose, c’est que comme ça, ton plaisir dépend d’une autre. Ça fait des mois que j’ai pas pu me masturber ni me gratter.
- Pourquoi ils font ça ?
- Pourquoi ? comment savoir ? T’es plus qu’une putain d’iŭgum. Alors t’es pas prête d’avoir une réponse. Continue ton histoire Arielle.
- Au fait vous vous appelez comment ?
- Moi c’est Antje et ma compagne c’est Chiendri. Je te serrerai bien la main. Mais comme tu vois… elle agita ses bras menottés dans son dos aux coudes et aux poignets.
- Mon amie c’est Marielle.
- Vous avez volontairement conclu cet accord ? Antje étonnée regardait Arielle.
- Oui. Sa gorge était très sèche et elle n'était pas sûre que sa réponse ait même été entendue.
- Va boire, pour une fois qu’il reste de l’eau dans la baille.
- Oui, merci. Elle se dirigea à genoux vers le bac en bois pour y plonger la tête. Puis elle poursuivit. A la signature on a quatre jours pour accepter ou refuser. Après la transaction devient définitive et on est sans condition liée à tous les termes et clauses de l'accord. Antje comprends-tu cela ?
- Oui justement, mais devenir une iŭgum ? quelle drôle d’idée.
Arielle se racla la gorge, assez pour se faire entendre.
- Oui, mais c’est plus compliqué. Je me dis que ce n'est pas le moment de commencer à me sentir désolé pour nous deux. Nos familles le seront assez pour nous.
- Oui, mais il faut être stupide pour devenir une iŭgum.
- Nous n’avons pas voulu cela, tu vas comprendre. Les condition de servitude ont divers degrés de protection en grande partie en fonction de la durée du terme. La durée maximale d'un contrat est de 30 ans. Le minimum est de six mois.
- Mais être une iŭgum, c’est pour la vie !
- Oui, je sais, j’y viens, tu vas comprendre. Pour ceux qui signent un contrat jusqu’à cinq ans. Les conditions sont supportables. Ils sont considérés en général comme des serviteurs ou des apprentis. Bien que ce service remplisse tous les engagements pendant la durée, c’est-à-dire 5 ans au plus. L’acte de la personne la lie au propriétaire du contrat, du début jusqu'à la fin, sans interruption. Les engagements imposent des restrictions à la sévérité des mesures qui pourraient être infligées aux serviteurs. Ceux-ci ne comprennent pas de marques permanentes sur le corps, aucune modification corporelle, pas de missions dangereuses et aucune activité sexuelle forcée. En général c’est plus un contrat de travail ou d’apprentissage, souvent à la fin d’un tel contrat, il n’est pas rare que le propriétaire propose un véritable emploi. Le service de cinq ans et un jour, jusqu’à quinze années, permet certaines modifications du corps y compris le perçage et une seule marque de propriété. Soit par tatouage, soit au fer rouge et il doit être situé sur le flanc droit ou sur un sein ; les signataires sont affectés à des travaux pénibles, tels que le travail dans les mines, les carrière ou les galères, ainsi que des obligations sexuelles décidés par le propriétaire. Pour le service de quinze ans et un jour jusqu’à vingt années, on permet les marquages multiples à partir du cou jusqu’à la plante des pieds et des modifications du corps presque illimités, à l'exception du retrait d’un membre. Pour le service de vingt ans et un jour et plus, il n’y a plus de restrictions et de nombreux individus sont marqués sur le front. Bien qu'il puisse sembler absurde pour une personne anciennement libre de s'engager pendant de plus longues périodes, en particulier pour les extrêmes, jusqu’à trente années ou plus. Car dans ces deux cas on ne parle plus de prime à la signature, puisqu’en principe il s’agit de décision judiciaire. Les engagements de cinq ans ou moins n’ouvrent souvent droit qu’à une prime minime à la signature et le paiement annuel est également plus faible. Ces engagements sont recherchés par des personnes ou des enfants qui attendent une protection ou une formation avec un petit pécule à la fin.
- Oui je comprends, mais comment êtes-vous devenus des iŭga ?
- Nous sommes les ainées de nos familles. Nos pères étaient frères et de riches armateurs. Mais ils ont sombré avec leur cargaison dans le lac de Murdir Durant la guerre du Croissant. Nous n’avions plus de dot mais des dettes. Nous avons recherché partout de l’aide sans aucun résultat. Du vivant de nos pères, aucun banquier ne nous aurait refuser un emprunt. Nos biens ont juste suffit à rembourser une partie de nos créanciers. Nous et nos mères, on a bien cherché du travail, mais rien d’assez bien payer et tous les emplois non qualifiés étaient soit occupés par des serviteurs sous contrat ou des esclaves. Je ne sais pas si vous le savez mais à Yuchekha, un ou une citoyenne, ne peut pas devenir esclaves. Donc ils ne nous restaient plus que les contrats de servitude. Mais même pour les contrats classiques de longue durée, la prime versée n’était pas encore suffisante. Il ne restait plus que la grande loterie du Dieu des Fleuves. Cela fait partie des festivités organisées par le Temple, la Civitas et la Guilde Souveraine.
- Alors d’une certaine façon, si vous êtes là, c’est un peu à cause de nous. Intervint Chiendri.
- Oui les numéros du carrousel. Réplica Marielle.
- Cela sert à cela de ce faire baiser par des chiens ? demanda Antje, j’ai jamais compris comment ça fonctionnait.
- C’est assez simple, il y a 8 couples d’iŭga à quatre pattes sur un manège. Chaque iŭgum porte une lettre peinte sur son dos et trois pancartes colorées avec des chiffres dessus, sont placées sous elle. Puis on lâche les chiens. 16 chiens, l’un derrière l’autre. Selon le couloir qu’il choisit, il prend une couleur. Il y a trois couleurs, la bleue pour le Temple, la rouge pour la Civitas et la jaune pour la Guilde Souveraine. Les chiens peuvent pour 4 d’entre eux, devenir des bleus. Pour 6 d’entre eux des rouges et pour les 6 derniers des jaunes. La couleur bleue est la plus dangereuse, car c’est soit le Supplice du Fleuve soit la prêtrise. Pour la couleur rouge on peut être libéré ou avoir une peine de servitude de 15, ou de 30 ans ou devenir une iŭgum. Pour la jaune c’est la même chose que pour les rouges, sauf que la durée des peines est de 5 ou 10 ans. Ma cousine est moi n’avons vraiment pas eu de chance. On avait choisi la lettre O, omicron. Quand un chien jaune l’a couverte. On se croyait sauvée, on avait une malchance sur 6 de devenir des iŭga. Tous nos espoirs se sont évanouis quand la prêtresse a levé la pancarte et que dessus il y avait un grand I. Il faut savoir que l’exécution des peines est quasi immédiate. Une fois que l’on a choisi notre lettre on n'a plus la possibilité de revenir en arrière. Sauf bien sûr si on peut payer dans l’heure la somme de 5000 pétales d’or.
- Dans toute cette merde, coupa Marielle, on peut dire que nos familles ont eu de la chance. Car pour les participants la prime est de 1000 pétales d’or et de 20 pétales d’or par année passées à remplir le contrat. Si nous survivons 10 ans il y a même un bonus de 100 pétales d’or.
- 10 ans ! mais jamais on ne survivra 10 ans. Je suis terrifiée, coupa Arielle. Nous sommes en enfer, on est là, suantes, assise sur du lisier. Regarde Marielle, je me remets à trembler. J’ai vu comment ils liquident les iotas et les iŭga comme nous. Je l'ai vu pas plus tard que l’année dernière à la Civitas. Je l’ai vu alors que j’étais encore une citoyenne. Ils nous pendront en l’air par les pieds, alors un homme tiendra ma tête, dégageant ma gorge et alors il prendra son couteau. Non ! Non ! Dieu des Fleuves, veuillez ne pas que cela se produise !
Chiendri cracha par terre et dit :
- Et après, puisque vous avez participé à la loterie… ils découperont la marque au fer rouge de vos fesses et l'enverront à vos familles. Prouvant à tous votre exécution… que vous êtes vraiment éliminées. À moins qu’ils ne découpent votre marque avant de vous égorger ? ça dépend de l’humeur du boucher. Ensuite il vous débitera en morceaux, les meilleurs seront donnés aux chenils, les bas morceaux… mes chéries… on les aura dans le cycéon. Je suppose que pour le reste, vous finirez en colle ou quelque chose comme ça.
Maintenant les deux filles pleuraient.
- Oh je souhaite, ne jamais m’être offerte. Je n'ai pas pensé à une fin comme celle-ci. Se lamenta Marielle.
- Bah ! regardez ma copine. Dans son pays c’était une duchesse. Elle vivait dans un luxe que vous pouvez même pas imaginer. Elle parlait même pas notre langue. Et le pire pour elle… en devenant une iŭgum elle n’a plus eu de chaussures.
- Oui, c’est vrai, même que maintenant… je suis une bonne iŭgum. Je vais vous dire ce que Malda, une autre iŭgum, m’a dit notre premier soir : Le mieux, c’est de s'rendre l’temps aussi agréable que possible en étant gentil avec vous-même. En quoi elle se trompait un peut. Car dès qu’on nous a sorties des cages, on nous a entravées les bras dans le dos. C’est parce qu’on est maintenant des animaux d’attelage. Et que ça gave les palefreniers de nous attacher et de nous détacher tous les jours. Vous avez des questions ?
- On mange vraiment d’autres iŭga ?
- Oui, mais depuis la nouvelle Intendante, on ne mange plus ni les cervelles, ni les yeux. Dans le cycéon, y a plus que du sang d’iŭga et des raclures de carcasses. Parfois on a encore l’heureuse surprise d’y trouver un doigt ou une oreille. Maintenant il est bien meilleur… ou alors… peut être que je m’y suis habitué ? va savoir.
- ça fait mal d’être baisée par un chien ?
- Vous êtes vierges ?
- Bien sûr.
- Dans ce cas faudra vous faire dépuceler par un esclave. Sinon vous allez vraiment déguster. Parce qu’ici les pines des chiens, c’est vraiment quelque chose. Et faut pas oublier le nœud… oui car ces salauds de gardes prennent bien soin à ce que le nœud disparaisse dans notre fion ou notre con. Mais avec le temps vous allez voir… des orgasmes de folie, de folie j’vous dit. Bon faut aussi oublier la honte, les moqueries, les crachats et tout le reste.
- Tu devrais leur dire le plus important. Intervint Chiendri.
- Oui, c’est vrai. Vous êtes désormais une chaine, si l’une de vous deux devient folle ou meurt, dans la minute l’autre est égorgée. Alors un conseil, prenez bien soin l’une de l’autre.
- C’est quoi le reste ?
- D’abord le mauvais, le fouet, la cravache, les autres marques au fer rouge. Car il vous en manque. La faim, oui, on a tout le temps faim. La soif, les besognes exténuantes, parfois dangereuses, les punitions sadiques et les palais où nous dormons.
- Et pour nous laver ?
- Non, petite Arielle, je vais te faire à peu près la même réponse que Malda. Non, en dehors de la pluie, jamais de bain en dehors de la merde qu'on transporte, où dans laquelle on dort. Mais des fois, quand on est vraiment trop sale, on nous balance quelques seaux d’eau. Ironisa Antje.
- Et pour nos besoins ?
- Qu’est ce que tu n’as pas compris Arielle ? tu nous as pourtant vue.
- Tu veux dire…
- Laisse Antje, je vais leur montrer, j’ai comme une envie pressante, gloussa Chiendri, avant de reprendre : vous avez plusieurs solutions, soit vous vous retenez jusqu’à ne plus pouvoir, soit vous faites ça debout, à quatre pattes ou accroupis.
- Là ! comme ça ? questionna Marielle.
- Oui, moi je préfère accroupie. Ici les seules distractions sont soit de se donner du plaisir soit de chier ou pisser. Comme vous voyez, les toilettes se composent du sol de la cellule, si vous en avez le cœur, après, vous pouvez mélanger votre merde avec les déchets de toutes les filles, qui ont passé leur vie ici avant nous. Tout ce qu’on vous demande c’est de faire ça un peu plus loin que l’auge. En dehors de la cave, quand on travaille, tu t’arrêtes pas, tu fais ça en marchant ou en courant. Sauf en ville, là si tu t’oublies, tu vas dérouiller comme jamais.
Et joignant le geste à la parole elle déféqua. Se leva, pour aller se frotter le cul sur le mur.
- Bon avant que vous demandez… oui, peut être un jour vous serez amenée à manger votre merde ou celle d’un ou d’une autre. Ça fait partie des nombreuses punitions. Antje, dit que ça à un goût de chocolat. Moi je connais pas le chocolat. Si vous refusez, on vous gavera avec. Et même que vous risquez de finir crucifiées.
En entendant du bruit dans le couloir. Les quatre filles se tournèrent vers la porte de la cave. Mais le bruit ce prolongea, retentissant plus près maintenant. Elles entendaient les paroles d’un homme, mais elles ne pouvaient pas bien comprendre ce qu’il disait. Sa voix semblait aimable mais ferme. Et les grincements des gonds ont continué, se rapprochant de plus en plus. Antje savait que ces bruits étaient ceux des multiples portes s'ouvrant et se fermant. Des cris, des ordres aboyés, des pleurs, les sons incertains continuèrent pendant quelque temps. Ce devait être la nourriture.
- Les filles, quand, comme maintenant, vous entendez du bruit des portes qui claquent et même d'autres filles pleurer dans les cellules voisines. Eh bien, en aucun cas je dis bien, en aucun cas... vous ne devez essayer de communiquer avec les autres iŭga ou avec le palefrenier.
- Ils ne peuvent pas nous blesser plus qu'ils ne l’ont déjà fait.
- Détrompe toi petite gourde, tu sais combien tu vaux réellement ? non bien sûr, et bien tu vaux bien moins cher qu’un des chiens qui te baisera. Ici, vous ne possédez rien. Avez-vous oublié, qu’à votre arrivée on vous a marquées comme du bétail ? tu dois réaliser qu’ici, la moindre punition, c’est de rester deux jours et toute une nuit sans boire ni manger, suspendue par les poignets. Avec un madrier qui repose sur la chaine de tes chevilles. Et je peux te dire que la poutre est bien lourde. C'est la punition normale pour la moindre désobéissance.
- Et pour la chaine qu’on a entre les jambes ? jamais ils ne la retirent ?
- Mais Arielle, ton collier, tes bracelets, tes chaines sont rivetées, donc tu devras les garder à jamais. Alors un conseil, si un jour vous avez la chance d’avoir un bout de tissu gardez le pour entourer vos chevilles.
- Ecoute ce que te dit Chiendri. J’étais comme toi, je ne voulais pas la croire ! Avant j’étais une jeune femme d'une très noble famille, bien éduquée et avec des montagnes d’or. Mais dans cette citée, j’ai été littéralement vendue pour presque rien, comme iŭga, d’abord à la Civitas, avant d’être cédée au Dépotoir. D’ici, je n'ai aucune chance d'informer ma famille sur mon sort. J’ai compris que pour le reste de ma vie, je devrai travailler du matin à la nuit tombée, sans jours de repos, sans vêtements, sans même une couverture, que je mangerai toujours la même bouillie froide. Ici les corvées sont fatigantes, malsaines, les gardes cruels, mais on s’y fait. J’ai aussi rapidement perdu la notion du temps, jour après jour, mois après mois, j’ai été transformée en bête de somme. Nous n’avons même pas les restes des esclaves ou des gardes, parfois on porte une cagoule alors on ne sait jamais si c'est le jour ou la nuit. Tout ralentissement dans l’exécution d’une tache est immédiatement sanctionné par le fouet.
- Alors c’est quoi les points positifs ?
- On va pas se mentir, il y en a peu. C’était Chiendri qui avait repris la parole.
- Oui, mais ils sont importants, tout d’abord vous n’avez plus à avoir honte de quoi que ce soit, surenchérit Antje.
- C’est bien maigre comme consolation, se lamenta Marielle.
- Vous allez grandir, être plus musclée, plus endurante, vous ne serez plus malade même en vivant dans cette merde. Dans quelque temps vous serez tellement excitées que tous vos interdits tomberont. Mais il y a plus important et ça c’est un secret. Un secret que nous avons trouvé toutes les deux. Jusqu’à présent lorsqu’une iŭgum devenait bleue, elle commençait peu à peu à perdre la raison pour ne devenir pas plus maligne qu’une vache. Mais comme vous le voyez nous sommes bleues, d’un bleu plus clair il est vrai. Mais non seulement nous n’avons pas perdu la tête, mais en plus nous sommes plus fortes que la moyenne des iŭga. De plus en devenant une iŭgum une femme perd ses menstrues.
- Mais nous non, c’est aussi pour ça qu’on a toujours les chiens collés au cul, gloussa Chiendri.
- Et alors, ça veut dire quoi ? demanda Arielle.
- ça veut dire que Antje, qui vient d’un autre pays, est immunisée contre cette maladie qui bouffe notre cerveau. Ça veut dire aussi, que si vous voulez être immunisée, faudra nous brouter le minou quand on saignera. Une dernière chose, si vous ne voulez pas gouter de la trique. Dès que le palefrenier ou un esclave entre ici, vous devez être à genoux le front sur le sol et attendre ses ordres.
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La suite est une vraie bouse, encore plus longue et c’est même pas fini.
Donc vous n’êtes pas tenue de vous infliger cette suite lamentable.
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