Chapitre 36 Puissances néfastes - Partie 2
Sin fo dégagea le front de Hank et lui caressa la joue du dos de la main. En voyant que sa main tremblait, elle pressa ses deux paumes contre la table pour tenter de calmer les spasmes. Elle tourna la tête en entendant la porte s'ouvrir, et sourit en voyant la silhouette de l'hembra se dessiner dans l'encadrement. Son sourire s'effaça lorsqu'elle vit que Archibald le suivait. Ils s'avancèrent tous deux vers la jeune femme, tandis que Roussel qui les avait guidés retournait à son comptoir, visiblement peu disposé à affronter la mauvaise humeur de Sin fo. L'hembra la salua d'un signe de tête et se pencha sans attendre sur Hank. Archibald la prit dans ses bras et lui dit doucement :
- C'est bon de vous revoir. J'avais tellement peur pour vous. Où est Maxou, demanda-t-il en se reculant.
Sin fo ferma les yeux et inspira profondément. Elle savait qu'il allait lui poser cette question, elle le savait depuis deux jours, mais elle n'avait pas réussi à trouver de réponse appropriée. Elle se tourna pour éviter de le regarder en face et lui dit :
- Excuse-moi Archibald, mais c'est mon époux sur cette table et...
- Oui, et moi je te parle de mon fils. Où est-il, répéta-t-il en fouillant la pièce des yeux.
- Je voudrais vraiment m'assurer que Hank va se remettre.
- Qu'est-ce que tu me caches ?
- Je t'en prie, pas maintenant.
- Répond-moi !
- Il a été... Il ne rentrera pas.
Archibald n'aurait pas paru plus choqué s'il avait reçu un coup à l'estomac. Sin fo profita de son silence pour lui tourner complètement le dos et demander à l'hembra s'il avait besoin de son aide. Il la pria de lui approcher une chaise et de le laisser se concentrer, car les blessures de Hank étaient vraiment graves, et que la moindre erreur pouvait lui être fatale. Sin fo alla chercher une chaise à l'autre bout de la pièce, et Archibald la suivit.
- Je veux des explications.
- Je suis navrée, tu ne peux pas savoir à quel point. Mais je ne peux pas pour l'instant.
Elle le contourna et apporta la chaise à l'hembra. Archibald revint à la charge.
- Tu crois que tu vas t'en sortir avec une pirouette ? Bordel on parle de la vie de mon fils !
Il avait haussé le ton jusqu'à crier la fin de sa phrase. Le médecin lui jeta un regard désapprobateur. Sin fo se résolut à lui parler et l'emmena en retrait.
- Je sais à quel point cela peut être difficile. Hank et moi avons fait tout ce que nous avons pu.
- Donc vous étiez là. Vous étiez là et vous ne l'avez pas aidé. Je lui avais dit de ne pas vous suivre.
- Par les dieux, pas toi aussi, soupira Sin fo.
- Oui moi aussi, s'emporta Archibald en la frappant à l'épaule du plat de la main. Il vous faisait confiance, et vous l'avez trahi. Je l'avais prévenu qu'il ne devait pas risquer sa vie pour cette petite aguicheuse.
- Comment peux-tu dire cela, s’offusqua Sin fo. Tu connais bien Tabatha, tu l'as même hébergée un moment.
- Voilà comment je suis remercié. Mais j'ai l'habitude. Vous prenez tout, et ne rendez rien, sans jamais vous soucier des autres. J'ai perdu ma main à cause de ton mari, hurla-t-il en tendant le bras droit devant le visage de Sin fo, et maintenant j'ai perdu mon fils à cause de toi !
Sin fo lui attrapa le bras et le lui tordit jusqu'à ce qu'il soit obligé de se mettre à genoux.
- Tu ne sais pas ce que nous avons traversé, cria-t-elle. Nous avons tout risqué pour Maxou. Hank s'est brisé les os en essayant de le sauver ! La vérité c'est que c'est toi qui ne l'as pas protégé du danger !
- Sin fo qu'est-ce que tu fais ?
La voix venait de derrière la jeune femme. Elle se retourna pour voir son mari qui s'était assis au bord de la table sur laquelle il gisait inconscient quelques secondes plus tôt. Il se leva précipitamment et manqua s'affaler lorsque ses pieds touchèrent le sol, mais il traversa la pièce aussi vite qu'il le put pour rejoindre sa femme.
- Lâche-le, lui ordonna-t-il. Tu lui fais mal !
- Je n'ai pas aimé ses réflexions.
- Qu'est-ce que tu racontes, demanda Hank incrédule. Sin fo regarde-le, il a mal. C'est Archie, c'est notre ami. Tu lui fais mal.
Sin fo regarda Archibald et le lâcha précipitamment. Tandis qu'il s'éloigna rapidement en se traînant au sol, Sin fo leva ses mains devant son visage et les regarda comme si elle-même ne comprenait pas ce qu'elle avait fait.
- Tu as complètement perdu la raison, haleta Archibald.
- Ma chérie, qu'est-ce qui t'arrive, s'inquiéta Hank. Ça ne te ressemble pas de t'énerver comme ça.
- Ce n'est pas la première fois, intervint Roussel qui était revenu dans la pièce en entendant des éclats de voix. Elle a déjà frappé Indesit tout à l'heure.
- Quoi ?
- Elle m'a provoquée, se défendit Sin fo.
- Tu n'as pas l'air dans ton état normal, tu devrais t'allonger un peu, lui conseilla Hank en lui prenant la main.
Sin fo repoussa violemment son bras et en frappant du pied au sol, elle cria :
- Je vais très bien, je n'ai pas besoin d'aide !
Toute la pièce vibra, et tout autour de Sin fo des fêlures avaient abîmé le sol de pierre. Elle put lire une peur réelle dans les yeux de Hank, bien qu'il tenta de s'avancer vers elle. Avec un mouvement de recul, elle s'excusa :
- Ne t'approche pas. Je suis désolée. C'est toute cette énergie. Je… Je vais me canaliser.
- Ma chérie, tu ne peux pas rester comme ça.
- Je te dis que je vais bien ! Je suis désolée, je ne voulais pas hausser la voix. Es-tu complètement rétabli ?
- Complètement non, mais suffisamment pour me tenir debout.
- Je ne pouvais pas faire plus sans risquer ma propre vie, intervint le médecin depuis l'autre bout de la pièce.
- Vous avez fait des miracles. Pouvez-vous faire quelque chose pour Tabatha ?
Deac’yamp se leva péniblement de sa chaise et se plaça derrière la table sur laquelle était étendue la petite princesse. Il mit une main de chaque côté du visage de la jeune fille et ferma les yeux. Après un court instant, il retira ses mains comme s'il s'était brûlé et s'écarta l'air apeuré.
- Que lui est-il arrivé ? Elle est possédée.
- Je pense que ce sont les djaevels qui lui ont infligé cela.
- Les djaevels, s'inquiéta Roussel. Tu veux dire qu'elle serait...
- Non, elle n'a pas été mordue. Mais je pense que la personne qui contrôle les djaevels la contrôle elle aussi, d'une certaine manière.
- Je ne peux rien contre les esprits maléfiques, je ne suis pas chaman, s'excusa l'hembra.
- Un autre hembra m'a déjà dit cela à l'extérieur. Que ferait un chaman dans un tel cas ?
- Je suis désolé, les esprits sont une chose trop grave pour...
- Nous ne pouvons pas la laisser comme cela, s'emporta Sin fo. Que faut-il faire ? Vous devez bien avoir une idée.
- Quand je soigne mes malades, je chasse le mal hors de leur corps. Je suppose que le principe doit être le même, bien que je ne sache pas du tout comment procéder. Les blessures, les maladies, sont faciles à détecter, mais les esprits j'en suis incapable.
- Moi j'en suis capable. Dites-moi ce que je dois faire.
- Dans mon cas, je fais disparaître les maladies en influant sur les flux d'énergie. Toute blessure, toute maladie résulte d'un flux plus ou moins puissant. Il me suffit de détourner ces flux ou de les annuler pour soigner mes patients. Bien sur, une part de cette énergie subsiste, et c'est pour cela que je subis le contrecoup des maux que je soigne.
- Il faut donc que j'agisse sur les flux d'énergie de cet esprit ?
- Sin fo tu ne peux pas faire ça, intervint Hank. Souviens-toi qu'il a déjà pénétré ton esprit, et que tu n'as pas pu te défendre.
- J'étais épuisée alors, et je n'avais pas toute l'énergie que j'ai aujourd'hui.
- Tu n'es pas obligée de faire ça.
- Bien sûr que si. Il n'y a pas d'autre solution.
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