Chapitre 33
Eldria était une fois encore perdue dans ses pensées lorsque Dan vint, comme à son habitude, s’asseoir à côté d’elle sur le lit. Salini était-elle fâchée ? Avait-elle bien fait de lui avouer qu’elle l’avait déjà espionnée dans ce moment intime avec Troj et Aran ?
La voyant immobile, le regard perdu dans le vague, Dan lui agita la main devant les yeux.
– Il y a quelqu’un ? demanda-t-il d’une voix badine.
Eldria se tourna lentement vers lui. Il semblait légèrement inquiet. Elle réussit malgré tout à lui adresser un sourire timide. Elle lui avait déjà parlé de Salini, mais elle n’était tout de même pas suffisamment proche de lui au point de lui raconter ses déboires avec son amie. Aussi préféra-t-elle faire comme si de rien n’était.
– Tu as encore maigri, ajouta-t-il en reprenant son sérieux. Tu devrais manger. Tu vas avoir besoin de reprendre des forces...
Elle houssa un sourcil. Que voulait-il dire par-là ?
Le jeune homme prit une profonde inspiration, l’attrapa par les épaules, et la regarda droit dans les yeux :
– Nous allons sortir d’ici.
Le rythme cardiaque d’Eldria s’accéléra subitement. Avait-elle bien compris ?
– Heu... Comment ça d’ici ? De cette pièce tu veux dire ?
Il fit non de la tête.
– De cette prison, précisa-t-il. Je sais comment t’en faire t’échapper.
Pendant quelques instants, elle dut se répéter plusieurs fois ces mots en pensée pour être sûre d’en avoir bien saisi la signification. Les pupilles couleur prune de Dan restèrent braquées sur elle tout du long. Il était sérieux.
Réalisant finalement les implications d’une telle révélation, elle manqua de s’évanouir. Elle dut s’écarter subitement pour prendre de profondes inspirations alors que l’air venait à lui manquer pour la seconde fois ce jour.
– Mais... Et Salini ? parvint-elle à demander d’une voix chevrotante.
– Je vais m’arranger pour qu’elle vienne aussi.
Une nouvelle fois, elle faillit défaillir. Peut-être aurait-elle dû manger un peu plus le matin-même...
Il lui fallut deux bonnes minutes pour se remettre de ses émotions, qui alternèrent entre rire et larmes beaucoup trop rapidement pour que ce soit normal. Enfin une perspective de sortie !
Elle parvint à demander plus de précision à Dan :
– Dans deux semaines, plus de la moitié de nos troupes va être relocalisée vers un autre camp retranché au sud, plus près des positions ennemies, expliqua-t-il. Ce n’est, heureusement, pas mon cas. Je pense que nous pourrons profiter de la désorganisation que cela va provoquer pour nous échapper. Je connais un passage qui n’est pas gardé et qui mène à l’extérieur de ces murs.
Eldria dut se faire violence pour ne pas lui sauter dans les bras. Les larmes aux yeux, les lèvres tremblotantes, elle laissa échapper un simple « Merci », se voyant déjà quitter définitivement sa sinistre cellule et retrouver sa ferme avec Salini.
Des dizaines de question se bousculèrent dans son esprit dans une sorte de fête foraine mentale.
– Et comment va-t-on f-faire ? bégaya-t-elle sous l’émotion.
– De ton côté tu fais tout comme d’habitude, je m’occupe du reste. Dans deux semaines on se retrouve ici-même. Il faudra juste que tu préviennes ton amie. J’espère qu’elle s’entend bien avec celui qu’elle voit...
– Et... et dehors, où est-ce qu’on va aller ? Tu resteras avec nous ?
– Oui. Une fois qu’on sera dehors nous aurons fait le plus difficile. On improvisera.
– Et les autres filles d’ici, q-qu’est-ce qu’il va leur arriver si cet endroit est ab-abandonné ?
– Je ne sais pas...
Eldria se calma peu à peu à force de prendre de profondes inspirations par le nez et de souffler longuement par la bouche. Elle n’en revenait toujours pas totalement.
– Ne t’emballe pas trop, tempera Dan. C’est très risqué et si on se fait attraper... Inutile de te faire un dessin. Tu es sûre que c’est ce que tu veux ?
Elle n’eut même pas à réfléchir. Le matin même, elle avait pratiquement abandonné tout espoir de connaître de nouveau la liberté. De jour en jour elle se laissait petit à petit dépérir, ne voyant pas d’intérêt à continuer dans ces conditions. Et soudain, miraculeusement, on lui offrait une échappatoire. Celui-ci avait beau être semé d’embuches, il était tellement improbable et inattendu qu’elle ne laisserait filer l’occasion pour rien au monde. Aussi répondit-elle par l’affirmative avec enthousiasme.
Soudain, une nouvelle question la tarauda :
– Mais... et toi ? Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu... m’aides ?
Il lui adressa la même moue qu’il lui servait à chaque fois qu’elle se montrait un peu trop curieuse avec lui.
– J’ai mes raisons...
Par expérience quand il arborait cette expression, elle savait que ce n’était pas la peine d’insister. Dan avait toujours eu une part mystérieuse et avec le temps elle l’avait accepté. Il avait le pouvoir de les faire s’échapper, elle et Salini, et pour l’heure c’était tout ce qui devait importer à ses yeux.
Malgré tout, et bien que son temps ici était désormais compté, elle n’était pas encore libre. Pour le moment elle devait faire profil bas et se plier – peut-être pour l’avant-dernière fois – aux règles dégradantes de cet endroit
Ils se dévêtirent donc tous deux en se tournant le dos et Eldria s’allongea, comme toutes les semaines, sur le ventre, la tête tournée vers le mur. Une sorte de petit nuage de bonheur, doux et réconfortant, avait élu domicile dans sa poitrine. Pour la première fois depuis des mois son espoir devenait tangible. Son objectif était à portée de main.
Elle ne fit même plus vraiment attention aux bruits de frottement caractéristiques de Dan qui ne tardèrent pas à se faire entendre à quelques centimètres au-dessus de son dos. A force, elle s’y était même presque habituée. Elle ignorait quelles pouvaient être ses raisons, mais elle était extrêmement touchée qu’il prenne de tels risques pour les sauver de cette situation sans avenir.
Une fois qu’ils seraient dehors, Salini et elle pourraient retourner à Soufflechamps pour rassurer tante Dona et les autres, qui devaient être morts d’inquiétudes. Puis elles tenteraient de retrouver ces fameuses poches de résistance du Val-de-Lune, parmi lesquelles devaient forcément se cacher l’oncle Daris, Yorden, Jarim, Troj, Aran... Toutes ces perspectives la réjouirent. Elle sentit une force insoupçonnée s’emparer d’elle. Une force qui lui donna du courage. Tout n’était pas perdu !
Plusieurs minutes s’écoulèrent. D’ordinaire, Dan ne perdait pas vraiment de temps. Pourtant cette fois-ci cela dura suffisamment longtemps pour qu’Eldria se fasse la réflexion. Elle entendait distinctement les mouvements de va-et-vient de ses doigts qui s’intensifiaient de plus en plus. Sa respiration devenait saccadée. Elle s’attendait d’une seconde à l’autre à recevoir sa semence chaude sur le bas du dos, mais rien ne se produisit. De toute évidence il était en difficulté.
Cela était problématique, car leur temps dans cette petite chambre était limité. Si Dan n’arrivait pas à terminer, Madame Martone pourrait y voir de sa part à elle un refus d’obtempérer. Et si, à cause de cela, elle la forçait à changer de partenaire pour les semaines suivantes ? Comment ferait-elle pour s’échapper ? Soudainement, le doute puis la peur la gagnèrent. Il ne leur restait plus beaucoup de temps. Il fallait qu’il y arrive...
Malheureusement, après encore plusieurs minutes, toujours rien. Dan s’interrompit dans son élan.
– Je... Je n’y arrive pas, lâcha-t-il le souffle court.
Dans le couloir, des bruits commencèrent à se faire entendre. Le rythme cardiaque d’Eldria s’emballa.
– Je vais continuer... reprit-il, conscient que leur projet d’évasion reposait sur sa capacité à se faire jouir rapidement.
Il ne fallut que quelques secondes à Eldria pour prendre sa décision. Elle n’avait pas vraiment le choix. Pour autant, portée par la perspective de retrouver la liberté, cela ne la gêna étrangement pas outre mesure. D’un mouvement rapide, elle se retourna. Pour la première fois et sans avoir rien demandé, Dan pu contempler sa totale nudité, qu’elle lui offrit sans crier gare en rougissant légèrement. Elle avait gardé les yeux fermés, comme pour minimiser l’impact de ce qu’elle venait de faire, mais aussi pour respecter l’intimité de son futur sauveur.
Ses bras étaient restés collés le long de son corps. Elle ne voulait rien lui cacher. Son pouls s’accéléra davantage. Au fond d’elle-même, elle espérait provoquer l’effet escompté chez son partenaire...
Elle ne savait pas si c’était le lot de toutes les femmes au moment de se dévoiler à autrui, mais elle avait l’impression d’avoir acquis une sorte de sixième sens lui donnant la sensation de sentir le cheminement du regard de l’autre sur sa peau, comme un invisible rayon lui parcourant l’épiderme. Ou peut-être était-ce simplement le fruit de son imagination... Toujours était-il qu’elle sentit le regard de Dan se poser sur ses seins ayant quelque peu perdu en volume du fait de sa récente perte de poids, puis remonter le long de son ventre, avant de s’attarder sur son pubis presque encore glabre. De là où il était, il devait même avoir un aperçu plutôt détaillé de la fine fente de son sexe. Heureusement il ne fit aucun commentaire, qui se serait de toute façon avéré déplacé dans une telle situation.
A l’extérieur, les bruits se rapprochaient. Passé le court moment de flottement qui venait de se produire, il reprit de plus belle son activité onanique. Eldria, pour sa part, était perplexe. C’était la première fois que, de son plein grès, elle se dévoilait entièrement à un homme. Elle était gênée, certes, mais pas autant qu’elle l’aurait cru. Le fait que Dan l’ait déjà vue de multiples fois à moitié nue semblait avoir un peu dissipé sa pudeur naturelle.
Se persuadant qu’elle ne ferait de mal à personne en s’autorisant ce qu’elle s’apprêtait à faire, elle entrouvrit d’un millimètre à peine ses paupières jusque-là restées closes. Elle n'avait pas pour projet de voir distinctement Dan en train de se masturber – elle n'était de toute façon pas sûre d'être prête pour ça – mais plutôt de distinguer grossièrement les formes et les couleurs. Après tout, elle venait de lui montrer sa plus stricte intimité, elle avait bien le droit d’en profiter un petit peu elle aussi...
La silhouette floue du jeune homme se dessina vaguement au-dessus d’elle. Elle distingua son bras droit qui s’agitait vigoureusement près de ses cuisses. De toute évidence, il était totalement nu lui aussi. Très brièvement, comme prise d’une curiosité déplacée, elle ouvrit un tout petit peu plus ses paupières. Au travers de ses cils, ses pupilles se posèrent sans vraiment le vouloir sur... son pénis !
Elle s’empressa de refermer les yeux. Pendant une demi-seconde, elle avait bien malgré elle vu les détails de son organe masculin en érection. Et en pleine action... Ses testicules, les quelques poils hirsutes à la base de son membre, la forme conique de son gland à la teinte ronge foncée... Elle avait tout vu. Elle rougit avec profusion, espérant que cela ne se remarquerait pas trop.
Son teint ne s’arrangea pas quand, à peine quelques instants plus tard, l’éternel fluide visqueux se rependit par vagues successives de son nombril jusqu’à ses seins. Apparemment, ses atouts féminins avaient fait leur petit effet...
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