.

4 minutes de lecture

Je m’appelle Kilian, ‘Kil’ pour les intimes et les réseaux sociaux. J’ai 17 ans, je suis fan de séries, jeu vidéo et de sky-surf (un aéroglisseur qui file à plus de 20 km/h dans les rues et les trottoirs des villes surchargées par la circulation). Je suis à l’image de la jeunesse de notre époque un ‘DéDé’ : désabusé et débrouillard.

Ce matin-la, je m’étais levé avec un mal de crâne carabiné. Je n’avais pas fermé l’œil de la nuit et je sentais que j’allais déguster toute la journée…

En plus, pas de bol, j’avais rendez-vous avec mon psy… Si je ratais la séance, sûr que mes vieux allaient me refoutre chez les dingues… Faut avouer, aussi, que je déconnais sec ! J’avais zappé les deux dernières séances ce mois-ci…

Impossible de ‘sécher’ celle-là ou j’allais morfler sévère.

Chez moi, le silence régnait en maître, cela me changeait du rond-rond continuel des chaînes d’infos en continu à la télé qui passaient et repassaient inlassablement les mêmes conneries toute la journée. Mon père était déjà parti au boulot et ma mère dormait toujours à poings fermés. Tant mieux, cela allait m’éviter les reproches habituels sur l’état de ma chambre ou d’autres remarques sur mes fringues, couleur de mes cheveux, mon attitude, mes relations,...

Je ne mangeais pas le matin et le peu de choses appétissantes dans le frigo me confortait dans mon idée de quitter ce trou à rat le plus rapidement possible.

Mon immeuble était plutôt propre. Une société de surveillance surpayée avait placé des caméras et des systèmes de reconnaissance faciale à l’entrée afin de sécuriser les locataires de la faune locale. À la moindre intrusion, la police débarquait dans les cinq minutes. Du coup, on était plutôt tranquille et épargné par les cambriolages qui pourrissaient la vie dans notre bloc.

Dehors, il pleuvait comme ‘vache qui pisse’. Les égouts, mal entretenus, débordaient et vomissaient une eau grisâtre malodorante qui stagnait dans les crevasses rues défoncées.

Je devais sauter d’îlot propre en bout de trottoir sec afin de ne pas flinguer mes pompes dans cette crasse qui s’étalait sans vergogne sous nos yeux. L’odeur de cette bouillasse immonde agressait les narines mêmes des clochards les plus endurcis.

Autour de moi, chacun accaparé par un quotidien que j’imaginais merdique, filait à ses propres occupations sans même jeter un regard sur les SDF trempées qui s’entassaient dans les rares endroits encore au sec.

Combiens mourraient aujourd’hui ? Combiens s’en foutaient royalement ?

Notre société était à notre image : individualiste et opportuniste.

Au coin d’une rue, j’aperçus Diego. Je lui adressais un signe discret, qu’il me rendit avec la nonchalance qui le caractérisait. Diego était une sentinelle de rue, il avait pour charge de prévenir de l’approche de tout individu suspect ou étranger. Je l’aimais bien Diego, même s’il avait déjà pris deux balles dans le buffet. L’espérance de vie des ‘sentinelles’ n’était que de cinq ans en zone ‘C’ et lui, il avait déjà tenu sept ans : un exploit !

L’école n’était qu’à quelques pas de chez moi. On l’appelait ‘la forteresse’ et elle portait bien son nom. Elle était entourée d’un épais mur de trois mètres de hauteur et l’entrée était gardée par une milice armée jusqu’aux dents. On était fouillé deux fois à la porte et on devait porter un mouchard GPS autour du cou afin de surveiller plus facilement nos déplacements.

Moi, je me foutais de leur système de contrôle, j’avais depuis longtemps piraté leur logiciel et je manipulais le signal de mon mouchard à ma convenance. De plus, j’avais un deal avec les profs de mon école. Je collectionnais les ‘A’ et eux, de leurs cotés, ils me foutaient la paix et me laissaient dormir en classe. J’avais développé une aptitude assez curieuse depuis ma plus petite enfance : je pouvais me reposer et apprendre à la fois.

Jusqu’à maintenant, je n’avais jamais été pris en défaut. Même quand je dormais, j’écoutais, comprenais et enregistrais tous les cours. En fin de compte, tout le monde y trouvait son compte : les profs, mes parents et moi !

Et même cette société de merde qui comptait sur ces écoles pour trier « le bon grain de l’ivraie » et sélectionner dans la jeunesse des zone ‘C’ les larbins les plus obéissant pour la zone ’B’.

La nourriture était ‘dégueu’, même pour un mec comme moi qui n’accordait aucun intérêt à la bouffe. Mais c’était assez scandaleux au vu du prix facturé aux familles. Même les profs refusaient de manger cette merde et apportaient leur propre gamelle à la cantine.

Moi, je revendais mon plateau au plus offrant. Un seul repas par jour, celui du soir, me suffisait amplement.

Une fois l’école finit, le plus souvent, je zonais dans le quartier. Il m’était tellement pénible de rentrer chez moi que même quand il pleuvait, je préférais trainer dans l’aérométro.

Je connaissais bien ma zone ‘C’ et surtout les coins à éviter.

Je réparais de temps en temps du matos informatique pour une bande du coin. Je leur avais monté un réseau ultra sécurisé qui codait tous leurs SMS entrant et sortant. En leur créant une ‘IP’ flottante, crypté de façon aléatoire sur des milliers d’algorithmes prise au hasard aux quatre coins du globe, j’étais devenu un des leurs. Avec ma combine, les flics étaient incapables de localiser leur QG !

Depuis, j’avais mes entrées dans tous les lieux un peu pourris du coin et j’étais connu comme le loup blanc. Personne ne me faisait chier ! Fallait bien s’entraider, entre ‘Cé-lérats’ de la zone ‘C’…

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire pascalL ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0