Le cul-de-chaudron
Porté par l’air lourd et chaud d’une fin d’après-midi, il s’avançait vers nous d’une allure déterminée dans un ciel déjà bien chargé, plombant l’azur juste au-dessus de l’horizon.
Sa masse impressionnante invitait au respect et l’urgence poussait aux abris.
Les arbres avertis, en supporters acharnés, s’étaient mobilisés et, quelques instants plus tard, la forêt entière s’agitait dans une vaste ola de salutations.
Nous entendions cette manifestation sauvage s’amplifier en un flux et reflux incessants de menaces sourdes, nourrissant un bruit de fond qui envahissait l’espace.
Le vent s’invita ensuite dans la cour et, tel un joyeux fou s’amusant à déclencher de petites tornades de légers débris, il envoya valser les feuilles des rosiers dans les fenêtres.
Le danger se précisa lorsqu’enfin nous parvinrent les premiers grondements du cul-de-chaudron.
Sans avertissement, un dieu griffu déchira en signe d’hostilité le manteau ardoise recouvrant nos têtes, laissant entrevoir un au-delà bien trop éclatant pour notre fragile vue de mortels.
Le nuage gonflé à bloc commença dès lors à répandre quelques grosses larmes poisseuses qui s’éclatèrent dans la poussière, puis, assez rapidement, dans un râle tonitruant, laissa crever son amertume trop longtemps contenue…
Et toute la misère du ciel se déversa sur notre terre qui en bavait de reconnaissance.
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