SAM

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 "Bordel! Pour une fois que je me couchais tôt."

Après trois heures passées à se tourner et se retourner, Sam cherche son pyjama et ses chaussettes, le t-shirt attend entre les mailles du radiateur. Jetant un œil à la pendule de la cuisine pendant que machinalement sa main gauche allumait la cafetière. Quatre heures du mat. Le temps que l'eau chauffe il passe dans la salle de bain, s'assoit et lit la bande dessinée accrochée sur le côté avec une ficelle. Plusieurs pages de plusieurs bandes dessinées avaient été déchirées et mises dans un sens aléatoire au bout du fil.

L'ordinateur sur son bureau de fortune (Un écran plat, un clavier et une souris sans fil posés à même la table du salon) ne mit que quelques secondes et à peine une paire de clics robotiques avant d'afficher ses yeux de loup qui fixaient par delà le fond d'écran. Avec une dextérité animale, quelques clics sur la souris avaient créé sur l'écran les Unes de quelques uns des grands quotidiens francophones. Il apprit ainsi qu'en Suisse un chasseur fanatique avait lynché trois lynx en l'espace de six mois. Un mauvais antiquaire grabataire s'était fait échangé par son employé bien plus jeune et doué la totalité de ses objets de valeur, les remplaçant par de pâles imitations.

Debout devant la glace de la salle de bain, Sam contemplait sa cicatrice en croix. La journée qui se présentait à lui le fatiguait d'avance, il avait rendez-vous chez un spécialiste du sommeil puis devait s'acheter un set de couteaux, achat qui ne pouvait être fait que dans le centre de Paris. Lui qui détestait la foule allait être servi en cette époque post-noël.


Tirant nerveusement sur sa cigarette, Sam contemplait l'immeuble entièrement revêtu de verre teinté à l'intérieur duquel il allait s'engouffrer. Déjà l'hôtesse à l'accueil le gratifia de son plus beau sourire.

-"Bonjour, puis-je vous renseigner?" Son rictus avait prit une expression beaucoup plus professionnelle.

-"Bonjour, je viens pour un rendez-vous avec le docteur Josse. Je m'appelle Samuel Cliver"

La jeune femme fit semblant pendant quelques secondes de chercher la date adéquate dans son immense agenda avant de reporter son attention sur Sam.

-"Tout a fait, si vous voulez bien patienter quelques instants dans la salle d'attente, le docteur va venir vous chercher dans quelques instants"


En pénétrant dans la salle d'attente, on était immédiatement fascinés par l'aquarium de 5000 l. encastré dans le mur du fond. Un décor savamment fait transmettait une impression d'harmonie et de bien-être pour les habitants des lieux. Une multitude de petites plaquettes en cuivre entouraient l'aquarium en y exposant le nom compliqué ainsi que l'habitat naturel et les mœurs des poissons pour la plupart invisibles. Sam allât s'asseoir dans le siège le plus proche de l'attraction. En retournant les quelques magazines qui s'affichaient sur la table basse en verre transparent il vit en couverture de l'un d'eux un article qui affirmait que les hôpitaux et cabinets médicaux privés installaient de plus en plus d'aquariums afin de tranquilliser et détendre les patients. En effet, regarder des poissons nager ça détend.  "Faut s'barer dans les îles" La porte s'ouvrit sur la silhouette lourde et imposante d'une grande femme aux cheveux courts et bruns. D'une voix de diva elle appela Sam qui, gêné, leva la main tel l'écolier répondant à l'appel de la maîtresse.

 

  Assis à la terrasse d'un café de la rue St. Denis, il constata en voyant son reflet que les marques de ventouse persistaient un peu partout sur son visage. "Merci Doc" Un touriste japonais muni de son plan de la ville vint s’asseoir dans la dernière table en fixant le serveur atterré par la perspective d'avoir à servir plus d'un client au même temps. Pour malheur du pauvre homme, un couple d'étudiantes vint tenir compagnie à Sam en prenant d'assaut la table voisine. La brune était un prototype de pré-ados ascendant pétasse avec toute la panoplie; bagues, collier, boucles d'oreille, décolleté plongeant mais pas trop et jeans taille basse. Elle mâchait bruyamment son bubble-gum rose en se tripotant les cheveux. Sa collègue, bien plus traditionnelle et sûrement tenue en laisse par maman, semblait contrariée. Elle assénait de grands coups de crayon à son classeur, visiblement pressée de raconter une terrible histoire. Sam se demandait si la rousse avait conscience du peu d'intérêt que pourrait soulever chez sa copine une histoire qui traitait de sa mère, l'empêchant de mettre du maquillage sous prétexte que ça fait trop vulgaire à son âge. Elle s'élança, parlant d’une voix si forte et stridente que Sam n'eut pas besoin de tendre l'oreille pour avoir en stéréo l'intégralité du monologue.

-"J'tavais raconté c'qu'était arrivé à ma grand mère y'a deux mois? Le mec qui était rentré chez elle et l'avait forcé à danser avec lui avant de la tripoter?"

-"Ouais trop flippant!" La bimbo prit son visage le plus sérieux et s'affala sur la table

-"Bah imagine qu'aujourd'hui, Sonia, la portos de ma classe, a raconté à tout le monde que sa grand-mère s'était fait buter chez elle par un mec. Elle s'est fait violer puis il lui a ouvert la gorge elle a dit."

-"Merde, ça crains d'être vieux" La brune prit cette fois un air dégoutté avant d'ajouter: "Chez ta grand mère le gars il s'était tiré non?"

-"Ouais heureusement, mais il l'a quand même tripoté l'enfoiré, c'est peut-être le même mec, si t'as une grand mère dis-lui de faire gaffe.

-"Ma grand mère habite à la campagne et si elle connaît pas, elle accueille avec le fusil sous l'bras." La blonde eut un rire satisfait.

Le serveur s'approchât de la table de Sam d'un pas lourd et nonchalant, il s'apprêtait à prononcer quelques mots lorsqu'il fut interrompu par la sonnerie The Exorcist d'un portable. Sam lui adressa un petit sourire gêné avant de décrocher.

-"Sam, c'est moi, on bouffe ensemble ce soir?

-"Ok, mais chez moi"

-"Ça roule, à toute"


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