Êtes-vous humain ? [2023]
Aux premières lueurs de l’aube déboule alors cette belle camionnette, bleue, bien rangée et propre ; voilà que Jonathan arrive au café, accompagné par sa soeur, cette belle blondinette, dont leurs rêves sont un de mes souhaits exaucés. Quand l’obscurité s’éteint enfin sous l’assourdissante lumière, je m’assieds dans ce débarras organisé. Frédérique se positionne derrière le comptoir et prépare ma commande, inchangée depuis la première fois que j’ai mis les pieds dans ce lieu. Quand arrivent les premiers habitués, le silence disparaît peu à peu, remplacé par les murmures des âmes déplacées. Cappuccino avalé, cookies envolés, me voilà partie dans les longues discussions avec moi-même, esquissant mille-et-une symboles qu’aucun humain ne peut déchiffrer. Mes pensées se tournent vers une question vue et revue sur les navigateurs des êtres de chair : Êtes-vous humain ?
Le suis-je véritablement ? Eux, ces êtres dévoués aux Sacrés, le pensent. Auparavant, aux premières heures d’une naissance historiquement, ils ne l’étaient guère, préférant alors de me maudire jusqu’à que l’essence de Gwakhr se déverse dans celle de Swakhr. Que la partie humaine se dissipe sous l’effet de ma véritable nature. Condamnée aux bûchers, aux côtés des libératrices, à de nombreuses reprises au cours des âges, j’ai vécu au-delà de toutes les attentes possibles. D’une certaine manière, par le biais du sang, on peut penser que le le sois. Toutefois…
« Excusez-moi, interrompit une voix inconnue, appartenant à une jeune femme à l’allure nerveuse. Êtes-vous une Autre ?
— Qui le demande ? soufflé-je.
— Une libératrice passée. »
Un sourire s’étire sur mon visage, qui faillit dévoiler son apparence démoniaque, tandis que je me penche vers cette âme déplacée.
« Votre prix ?
— Une simple nuit dans mes bras, répondis-je, songeant déjà au plaisir intense qui me permettra de ne pas manger pendant un temps. »
Il vaut mieux paraître humain aux yeux de ceux qui vous entourent. Seuls ceux qui connaissent la vérité peuvent se permettre de vous appeler « une Autre ».
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