2024 : À votre porte se trouve... la paix

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Minuit sonne.

Quelqu’un toque mais je n’y prête aucune attention. Mes yeux sont rivés sur la page Google Doc où un chapitre s’écrit, pensée par pensée, rythmée par la recherche incessante de synonyme. Le carnet dédié à l’écriture du roman est rempli de connaissances, qui ne serviront peut-être pas. Soudainement, le dernier mot s’est brusquement effacé. Il n’a pas sa place. Il n’est qu’un bocal de sentiments inachevés. La phrase demeure indéterminée par son absence. Une fin abrupte, dénuée de sens, qui me hante jusqu’à ce qu’une solution se présente à moi.

Une heure du matin s’affiche. Je cligne des yeux, confuse. Quelqu’un toque, toutefois je demeure immobile. Mon esprit en tourmente, je lis et relis inlassablement ce chapitre chaotique.

Peut-être que je devrais ajouter des paragraphes en plus, une description plus détaillée ou… simplement réécrire entièrement le chapitre ? Effacer tous les chapitres et recommencer ? Je déteste ces doutes constants.

Quelqu’un toque encore.

Un soupir s’échappe de mes lèvres. Je me lève, quittant la pièce. Dehors, la nuit est avancée. Un loup hurle à la lune. Je déambule dans le long couloir décrépi. J’arrive dans le vestibule où se trouve la porte d’entrée.

L’horloge affiche deux heures du matin. Quelqu’un tambourine à la porte, m’incitant finalement à ouvrir cette dernière. Je me fige, le cœur battant la chamade, quand mes yeux se posent sur l’étrangère debout sous mon porche. Une créature de grande taille dotée d’une longue chevelure dégoulinante d’une substance noirâtre. Ses orbites vides me fixent et provoquent chez moi un profond malaise.

Nourris-moi… hisse l’inconnue en tendant les bras.

Son corps est étrange. Très mince, je peux voir ses muscles sous sa peau hâve.

Nourris-moi…

Je recule d’un pas. La créature s’avance. Sa gueule s’ouvre dévoilant une dentition moisie où des morceaux de chair s’y trouvent.

— Te nou—

Ma voix se coupe brusquement. Mon regard se détourne un instant de l’étrangère et se plonge dans la noirceur du miroir où je me pétrifie d’horreur. Quelqu’un est en train de coudre ma bouche. La créature s’approche encore une fois. Je recule jusqu’à ce que mon dos heurte un mur.

Donne-moi…

Ses paroles sont incompréhensibles. Rapidement, la bête se retrouve en face de moi, à quelques centimètres de mon visage. Ses mains caressent mes cheveux pendant de longues minutes. La créature se colle à mon corps, m’étouffe contre sa pâle figure, me serre dans une étreinte presque mortelle. Mon cœur s’emballe, cependant, la noirceur de mes pensées s’évapore comme aspirée.

À moi… À moi…

L’horloge sonne à trois heures du matin.

Mes genoux flanchent. Quelques cheveux sont brusquement arrachés par la créature, qui semble se transformer à vue d'œil. Je tremble mais je respire l’air frais de la nuit. Pour la première fois, je suis détendue, malgré la situation bizarre.

Merci du repas…

— Merci de ton aide, déclare une voix épicène.

La créature hisse quelques paroles que je ne comprends pas. Elle dépose un baiser sur mon front et s'éclipse comme si de rien n’était. Je lève les yeux vers la nouvelle venue.

— Te sens-tu mieux, ma p’tite écrivaine ?

— Mh…

— Oh, désolé, il semble que Horreur s’en ait pris à toi. Ce n’est pas mon problème, par contre, rigole l’inconnue.

Une femme de grande taille vêtue d’une tunique couleur unie.

— Mh…

— Oh ! C’est vrai, tu ne sais pas qui je suis… Eh bien, je suis la Paix.

Je la fixe du regard.

Nourris-moi…

— Maintenant que ta paix intérieure est revenue, je te laisse avec tes nouveaux amis !

Et la Paix file comme si de rien n’était. Je me tourne vers la créature qui ne cesse de hisser des paroles dont leur compréhension commence à faire son chemin dans mon esprit puis détourne les yeux vers le miroir où Horreur me contemple.

Finalement, je hausse les épaules. Je ferme la porte à clef, je déambule jusqu’à mon lit, complètement à sèche.

Nourris-moi…

Utilise-moi…

— Mh…

Nourris-moi…

Utilise-moi…

— Mh !

Désolé, hisse la créature en s’allongeant dans mon lit.

Désolé, murmure Horreur, accrochée à l’autre bête.

Demain sera un autre jour.

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