4. Jeudi
Ce midi, la grille d’entrée du parc est fermée. Je crois que depuis trois ans que je viens ici, ce n’était jamais arrivé. Je me sens comme un idiot, le sac de la boulangerie dans la main, à ne pas savoir quoi faire.
À travers les barreaux, je regarde l’allée principale déserte ; aujourd’hui, les bancs font grisemine. Seuls les oiseaux semblent se réjouir de la situation ; une pie se dandine sur la pelouse, tandis qu’une mésange zinzinule.
Il me vient une idée : faire le tour du jardin afin d’inspecter l’autre entrée. Qui sait ?
Je n’avais jamais remarqué que le quartier était aussi calme. En passant devant les façades anciennes, rapiécées de quelques rénovations — double-vitrage et menues extensions — tels des patchs sur une antique veste en tweed, je mesure la fonction dortoir de ce recoin de Paris. Cette réflexion est intéressante, mais elle ne me dit pas où je vais déjeuner ce midi. Comme je n’osais me l’avouer, une fois arrivé à l’autre bout du parc, je constate que l’autre grille est également fermée. Pas une pancarte, pas un mot, pas une explication.
Qu’ai-je fait pour mériter cela ? Comment vais-je ouvrir ma parenthèse ? Qui me condamne à devoir m’installer à la cantine de la boîte, côtoyer mes collègues, ou laisser des miettes sur mon poste de travail ?
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