...
La jeune femme paraissait terrifiée, elle réussit tout de même à articuler :
- Je pars et je ne reviens jamais…
- Que les Dieux en soient témoins, répondit Ray et libérant la main.
Marie ramassa les pépites et les tendit à Bob, qui les soupesa avant de les replacer sur le comptoir.
- Je veux mes quatre miles cinq cents dollars ! répéta-t-elle, d’une voix ferme.
Bob ne prit pas la peine de peser les pépites. Depuis le temps qu’il rachetait l’or des prospecteurs, il avait acquis une dextérité visuelle qui en bleffait plus d’un. Il ne se trompait jamais sur ses estimations.
Il se pencha et composa le code secret de son coffre sous le comptoir. Il savait y trouver cinq miles dollars en liquide, quelques pépites d’or et les papiers de propriété du bar ainsi qu’un pistolet chargé. Il saisit l’enveloppe de billet et en retira cinq cents dollars qu’il replaça dans le coffre et se redressa.
En tendant l’enveloppe, il dit :
- Mon ami a été clair… Vous ne devez plus jamais revenir ici !
Bob ramassa les pépites et les plaça dans le coffre avant de le refermer. Puis il saisit le fusil caché sous le comptoir et le prenant dans ses bras comme un nouveau né, il ajouta :
- Si je vous revois… je vous tue. C’est pas plus compliqué que ça !
Marie lut de la détermination dans le regard de son interlocuteur. Pourquoi la menacer ainsi ?
Elle se retourna alors vers Ray et lui demanda :
- Alors, il a quoi de particulier mon billet ? C’est une rareté ? Un modèle unique ? Qui vaut des millions de dollars ?
Ray repoussa le billet dans sa direction.
- Reprenez votre billet et ne revenez jamais.
Marie repoussa le billet.
- Vous avez payé ce billet, il est à vous.
Elle ne recompta pas la liasse d’argent donnée par Bob et la glissa rapidement dans son sac. Elle tira un billet de cent dollars qu’elle posa sur le comptoir.
- Je paye vos boissons, messieurs, dit-elle en reculant vers la porte, puis elle disparut.
Personne n’avait réagi, ni même remercié leur bienfaitrice. Des regards interrogateurs s’échangeaient. Ray venait de donner quatre miles cinq cents dollars d’or à cette femme sortie de nulle part. N’exigeant en retour d’elle que la simple promesse de ne plus jamais la revoir…
Tout cela dépassait l’entendement…
Bob passa de table en table avec sa bouteille de whisky à la main et remplis les verres généreusement.
- À la santé de la p’tit dame et au plaisir de ne plus jamais la revoir…
Personne n’interrogea Ray qui resta silencieux dans son coin le reste de la journée. Vers minuit, alors que les derniers clients quittaient leurs tables, Bob vient s’assoir devant Ray. Ils étaient désormais seuls. Il remplit les deux verres de whisky et tenta de percer à jour son ami.
- Ça va ?
- Elle va revenir… J’ai mal interprété les signes, répondit Ray attristé.
- Tu m’étonnes… Moi, je reviendrai tous les jours !
- Elle a pourtant juré…
- Et ? T’as plus de pépites ?
- Cela ne sera pas si simple…
- Tu veux que je la tue ? Ou que j’envoie des gars la rattraper et la laisser mourir dans le désert ?
- Ne dis pas de bêtise… Elle était en danger et je n’ai rien arrangé…Elle doit vivre, elle est précieuse alors que moi… je pense que je n’ai vécu aussi longtemps que pour la sauver.
- Je ne comprends rien… Tu vas mourir ?
- Le vent m’a dit ce matin que mon temps était désormais compté, mais avant de quitter ce monde… je devais lui venir en aide. Et tu connais le vent… il ne parle pas pour ne rien dire…
Sur ces paroles énigmatiques, les deux hommes trinquèrent en silence, puis vidèrent contentieusement la bouteille puis une deuxième. Une fois ivres, ils s’endormirent affalés sur la table.
Annotations
Versions