Le Temps du chagrin

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Je venais d'avoir dix huit ans quand je la revis. Ma mère et moi nous étions coincés dans une petite ville médiévale car notre voiture ne démarrait plus. Un garagiste avait accepté de la prendre rapidement et en attendant nous nous baladions sur les remparts.

Je vis alors une jeune femme de dos, habillé comme à la belle époque, regardant au delà des remparts. Je ne pus m'empêcher de prendre cette apparition en photo. Le bruit de mon appareil la fit se retourner.

- Sachez jeune homme que je ne suis point objet de musée... commença-t-elle les sourcils froncés.

Mais elle ne dit plus rien car nous nous étions reconnus.

Elle n'avait pas changé.

Toujours ce même regard.

Enfin pas tout à fait.

Un regard toujours franc mais chargé de fatigue et de tristesse.

Et sa poignée de main me prit quelques forces pour se donner du courage.

Elle nous invita à dîner.

C'est ainsi que je découvris son univers : un monde de tissus, de dentelle, de robes et de jupes.

Elle étudiait la couture.

Le repas fut délicieux et son rire fréquent.

Son rire m'inquièta. Il était brisé.

Ma mère et moi sentions qu'elle avait des soucis, des chagrins, mais par fierté, elle souriait.

Brave Blanche.

Courageuse Blanche.

Le téléphone sonna alors que nous étions au dessert. S'excusant, elle alla répondre, nous laissant un instant seuls, ma mère et moi.

Le téléphone de maman sonna ; le garagiste n'aurait fini que demain.

Quand Blanche revint, toujours souriante, elle était bien pâle. Ma mère lui demanda si elle connaissait un hôtel pas trop loin, pour que nous puissions passer la nuit.

C'est ainsi qu'elle donna sa chambre à ma mère.

Son canapé à son vieil ami Eric.

Elle prit pour elle un lit de camp et une couverture.

Je n'arrivai pas à dormir.

La revoir m'avait troublé.

Sa pâleur surtout.

Et les quelques cheveux blancs qui parsemaient sa chevelure auburn.

Dix-huit ans et déjà des cheveux blancs.

Des sanglots me tirèrent de ma réflexion.

Blanche pleurait en silence.

Je m'approchai.

Amicalement je m'assis à côté et essuyai les larmes qui mouillaient l'oreiller.

Je ne dis rien, j'attendais.

Ce fut elle qui parla en premier.

" Maman est mourante"

Je l'attirai contre moi, dans un geste protecteur.

Pauvre Blanche.

Malheureuse Blanche.

Je fis mien son chagrin.

Et nous demeurâmes toute la nuit collés l'un à l'autre.

Le pire était à venir.

Brave Blanche.

Secrète Blanche.

Pourquoi n'as-tu rien dit ?

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