Cela faisait deux jours que Blanche partageait notre quotidien et j'étais agréablement surpris de voir à quel point elle était sociable avec toute ma famille. Moi qui craignait que les questions indiscrètes de mes parents ou de mes frères et sœurs ne la mettâsses en défaut, je pus voir qu'elle y répondait avec le sourire.

Deux jours de pur bonheur, à la voir s'amuser avec Enguerrand, chanter avec Jeanne, parler avec maman, rigoler avec Paul.

Deux nuits d'angoisse et d'insomnie à se demander comment l'empêcher de se détruire en voulant se venger. Elle ne me disait rien au sujet de cette altercation sur la plage avec les autorités alors que le papier que le gamin m'avait donné était un appel au secours. Paul ne pouvait pas m'apprendre grands choses car il n'était arrivé que quelques minutes avant moi et n'avait été là que pour confirmer à la police que Blanche passait bien les vacances avec nous.

Cela ne m'avançait en rien. Et pourtant j'étais persuadé que c'était cette scène sur la plage qui avait tout changé. Il fallait que je sache ce qui s'y était passé et vite. Car Blanche n'avait pas changé d'avis et menait, par je ne sais quels moyens la vie dure à nos voisins.

Ce n'était que de petites choses que certains auraient pu nommer des enfantillages mais en y réfléchissant bien, ces petites choses étaient plus cruelles qu'un grand éclat de méchanceté.

Cela avait commencé par la disparition du chien, prunelles des yeux de la voisine. Avec bonnes grâces, maman, Enguerrand et Jeanne aidèrent la voisine à le rechercher. Sans succès. Sylvie était pâle et en larmes car elle faisait partie de ses personnes qui considéraient leurs chiens comme leurs enfants. Personne à part la grand mère et moi ne soupçonna Blanche.

Mais je vis son petit sourire satisfait quand la voisine vint chercher ma mère pour l'aider dans ses recherches. Je m'inquiétais beaucoup pour elle. Cette méchanceté ne lui ressemblait pas, elle qui avait été le modèle de ma sœur et de tant d'autres. Je devais la convaincre de cesser. Mais pour cela je devais comprendre.

Blanche ne s'en prenait pas qu'à la voisine mais aussi à sa fille et son gendre qui apparurent à mes yeux comme ses oncle et tante. Entre le contrat du siècle qui finit dans les petits papiers pour allumer le barbecue et dont la page la plus importante avait brûlée comme Jeanne d'Arc et la précieuse bague retrouvée dans la gamelle du chien, Blanche savait pertinemment où frapper pour faire le plis de dégâts possibles le plus discrètement possible.

Si je ne l'avais pas aimée, je n'aurais pu que rester admiratif de sa capacité à mener la vie dure aux voisins sans aucun témoin de ses actes alors que Jeanne et moi la suivions partout.

J'avais dans ma petite enquête un allié précieux en la personne de Paul. Comme autrefois où l'on menait les enquêtes de Sherlock Holmes, nous avions décidé de retrouver les uniques témoins de la scène : l'enfant et sa famille.

Par chance, mon frère avait retenu la plaque de la voiture et le nom de famille que le policier avait prononcé.

Il ne nous fallut qu'une journée et une nuit de recherche pour enfin trouver la voiture et la famille qui allait avec.

Ils logeaient dans une petite habitation de l'autre côté de la ville.

Je décidai d'aller les voir le plus rapidement possible.

Pour savoir.

Pour comprendre.

Pour pouvoir parler à Blanche.

Pour la convaincre de cesser ce qu'elle venait de commencer.

Avant qu'il ne soit trop tard.

Et que sa soif de justice ne la détruise.

Avant qu'elle ne commette des actes plus dangereux.

Je me devais de la sauver d'elle-même.

Afin qu'ensuite nous puissions être heureux.

Belle Blanche.

Je te sauverai.

Je m'en fit la promesse.