Le cri
C’est comme un cri déchirant le silence et que je serai seule à percevoir, un noir rempli d’une brillance éblouissante, si lumineuse, j’en ai mal aux yeux, ça rentre par ma rétine et ça transperce tout jusqu’au cerveau, alors je hurle et rien, mon hurlement est un vide, j’attrape ma tête entre mes mains et j’appuie fort, fort, fort comme si je voulais briser mon crâne, mais je suis bien trop faible, j’ai pas la force de faire cesser ce vide qui cri infiniment car jamais il ne sera plein. Jusqu’à la mort, condamnée à chercher une raison. Une envie. Des mots. Pour exprimer quelque chose qui ne sera jamais ce que l’on voulait dire.
Moi, j’aurais voulu savoir peindre, avec quelques couleurs écrire une sensation, la beauté d’un souvenir, une image qui vous hante, laisser ses doigts glisser guidés par l’émotion, sans réfléchir, juste ressentir, libérée.
Je suis tellement nulle en dessin, la seule chose que je sais dessiner ce sont des feuilles, et j’en dessine partout, sur mes cahiers, mes brouillons, mes notes, les murs, des feuilles un peu difformes, nombreuses, reliées par une tige faiblarde mais robuste, comme une mauvaise herbe rampante envahissant mes mots, mes pensées, mon esprit. Jachère.
Le vent souffle, puissant, sur le champ d’herbes hautes qui se couchent et se relèvent à un rythme irrégulier formant et déformant des ombres, des reliefs, qu’est-ce, un visage ? Un sourire ? Une grimace. La trace d’un passage. Et la nuit pèse bleue, sombre, calme, impitoyable, couronnée d’une lune orangée à la lumière de laquelle mes mains apparaissent si blanches qu’il me semble que ce sont celles d’une morte. Un murmure. Les herbes frémissent, la nuit chante, la lune pleure et moi, une inspiration, sursaut, je m’éveille. Seule.
Si je savais peindre peut-être alors que je pourrais enfin sortir de moi ces idées vagues, ces choses pour lesquelles je n’ai pas de mots, que je ne sais décrire, qui font partie de moi, que je ne comprends pas. Oui, si je savais peindre, peut-être que je saurais enfin ce qu’il y a en moi. Qui je suis. Une souffrance. Un souvenir. Une lueur.
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