2.1

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Claire était en train de le longer depuis une bonne demi-heure. Il débordait d’énergie comme toujours et elle devait l’obliger à rester au trot et à ne pas galoper tout de suite. Mais comme toujours, son cheval refusait de lui obéir tant il s’impatientait de pouvoir accélérer. Alors elle le remit au pas et détacha la longe. Il pointa les oreilles vers elle et attendit libre au centre du manège. Puis d’un claquement de langue de sa dresseuse, il s’élança au galop sur la piste.
Claire resta au milieu à l’admirer. Sa crinière noire de jais flottait et contrastait avec sa robe rousse luisante. Ses membres fins mais puissants rythmaient le galop dans une beauté rapide et légère. Et son regard ! Sa tête fine offrait un regard empli de fougue et de malice.
Le grand cheval bai fixait sa cavalière du coin de l’œil et se mit à ralentir l’allure. Une fois au pas, il baissa la tête au ras du sol, pointa ses oreilles vers Claire puis mâchonna dans le vide. C’était le signal, il était prêt. La jeune dresseuse lui tourna le dos et attendit. Elle perçut d’abord le bruit feutré des sabots dans le sable puis elle sentit le bout du nez du cheval effleurer son épaule. Lentement Claire se retourna et caressa le chanfrein de l’animal.
—Prêt à jouer ?
Sans plus de cérémonie, elle l’entraîna jusqu’au montoir puis l’enfourcha à cru. Elle saisit une poignée de crins et pressa ses flancs pour le mettre au galop. Elle fit plusieurs tours de manège, se délectant de la sensation grisante de liberté que cela lui procurait. Elle affectionnait ces moments de complicité avec l’animal, si bien qu’elle en oubliait parfois le temps. Cette fois cependant, la sonnerie d’alarme de son téléphone la rappela vite à l’ordre, l’obligeant à mettre pieds à terre.
—Fin de la récrée, soupira-t-elle en rattachant le cheval pour le conduire à l’écurie.
D’ordinaire, elle aurait ignoré l’alarme et aurait continué de galoper au risque d’être en retard mais ce matin, il y avait bien trop de choses en jeu pour manquer d’être ponctuelle.

Elle avait encore du mal à réaliser ce qui l’attendait d’autant que tout s’était enchaîné à une vitesse folle depuis la conférence sur la santé dans le sport.
Le soir même, elle s’était réfugiée chez Thomas, son meilleur ami, en se disant qu’il était préférable qu’il l’aide à prendre un peu de recul sur les événements. Entre voir l’ensemble des mérites de son travail attribué à son petit ami et embrasser un parfait inconnu, elle avait eu beaucoup trop d’émotions à gérer. Prétextant qu’elle souhaitait passer un peu de temps avec son ami, sur le départ pour l’Angleterre, elle avait ainsi esquivé Grégory pendant trois jours. C’était en fait le temps nécessaire pour qu’elle puisse faire à nouveau comme si rien ne s’était passé. Grâce à Thomas, elle avait fini par reconnaître qu’elle aurait bien d’autres occasions de faire valoir son travail à présent qu’elle était associée sur le cabinet.
Quant au baiser avec le désagréable mais non moins charmant inconnu, elle avait été chamboulée plus que de raison sur le moment mais elle avait fini par retrouver son bon sens et sa petite vie confortable.
Seulement Claire n’avait pas prévu qu’elle retrouverait son compagnon au lit avec une autre. Cette fois, il était allé trop loin. Sur le champ et sans réfléchir, elle avait récupéré l’ensemble de ses affaires et déchirait le contrat qui devait faire d’eux des associés.
Thomas avait ensuite ramassé les pots cassés.
Cependant c’était le docteur Zabowski en personne qui avait permis à Claire de très vite passer à autre chose. Il lui avait téléphoné en fin de semaine et sans formalité avait déclaré :
—Grégory m’a appris que vous renonciez à vous associer avec lui. Il était plus que temps de vous séparer de lui d’autant que vous n’êtes pas faite pour exercer en cabinet.
Elle avait bredouillé des mots incompréhensibles ne sachant s’il s’agissait d’un compliment ou d’une remise en question de ses compétences.
—Ce qu’il vous faut, avait-il poursuivi, ce sont des patients qui vous fassent utiliser votre cerveau. Je vous verrai bien dans des centres spécialisés mais j’imagine qu’un bon défi à relever est tout à fait approprié dans l’immédiat. Voilà le deal, le FCR Stadium m’a demandé de travailler avec un de ses joueurs. J’ai passé l’âge et l’envie de m’occuper de footballeurs mais pour vous c’est parfait. Qu’en pensez-vous ?
—Je ne suis pas certaine de comprendre.
—Vous avez le job Claire, ils vous attendent ce lundi à neuf heures.
—Mais…
—Je leur ai donné ma parole, l’avait-il coupé, évitez de me décevoir.
Elle avait mis un peu de temps à réaliser puis s’était rendue compte qu’elle commençait dans deux jours.
Voilà pourquoi, en ce lundi matin, elle avait écourté sa séance de travail avec son cheval.

—Si ça marche aujourd’hui, expliqua-t-elle à son cheval tout en le reconduisant à son box, je pourrais enfin m’occuper de toi plus souvent. Peut-être même qu’on pourra gagner quelques rubans.
Claire détacha le cheval bai à l’intérieur de son box puis gagna les vestiaires. Elle troqua son pantalon d’équitation contre un jean, son pull contre un chemisier et ses bottes contre des Converses. Elle noua ensuite ses cheveux dans un chignon serré, remis sa frange en ordre.
Elle était fin prête et dans le timing.

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