A neuf heures, Claire se présenta à la grille du complexe sportif du football club. Elle y reçut ses accréditations et fut conduite dans une salle de réunion.
Elle y rencontra Yassin Messaoudi, un important homme d’affaire saoudien qui était aussi le propriétaire et président du FCR Stadium. Il était en compagnie de son président adjoint et du directeur technique du club. Les présentations effectuées, le saoudien lui expliqua le fonctionnement et l’histoire de son entreprise. Il lui décrit ensuite ce qu’il attendait d’elle au sein de son staff médical et les deux autres hommes complétèrent cet abreuvement d’informations. Sans lui laisser le temps de comprendre quoi que ce soit à ce charabia footballistique, Messaoudi la bombarda de questions visant à vérifier si elle avait bien les compétences que lui avait vantées le docteur Zabowski. Assommée par la quantité d’informations sur le foot, intimidée par la stature sérieuse des trois hommes, Claire avait hésité sur ses premières réponses puis s’était finalement affirmée. Elle avoua sans sourciller qu’elle n’y connaissait certes pas grand-chose en matière de football, qu’elle ne regardait même pas les matchs de Coupe du Monde des français mais que ça ne l’empêcherait pas le moins du monde d’être une kinésithérapeute compétente. Elle leur donna volontiers son jeune palmarès de patients soignés avec succès grâce aux rééducations qu’elle avait menées à bien sous l’œil avisé de son mentor.
—Finalement, avait-elle conclu, tous les patients, qui ont respecté à la lettre mes programmes, ont bien retrouvé leurs capacités. Ce n’est pas qu’une question de compétences, il faut aussi que les patients nous fassent confiance et s’investissent dans ce qu’on leur propose. C’est ainsi que l’on obtient les meilleurs résultats.
Ses interlocuteurs hochèrent la tête, ils semblaient assez convaincus de ce qu’elle avançait.
—Nous allons nous retirer quelques minutes pour prendre notre décision, déclara le président du FCR Stadium.
Il joignit le geste à la parole, imité des autres. Claire se retrouva seule dans la salle de réunion ce qui lui donna l’opportunité de prendre la mesure de cet entretien.
Elle n’avait absolument rien compris du fonctionnement du club hormis qu’il y avait bien plus de personnes qui travaillaient auprès des joueurs qu’elle ne le pensait.
Concernant sa mission, ils étaient restés vague : prendre en charge la rééducation d’un joueur blessé et suivre une partie de l’équipe. Jusque-là, rien dont elle ne se sentait pas capable, au contraire cela promettait même d’être passionnant. Elle espérait donc qu’elle avait réussi à les convaincre et qu’elle signerait bien un contrat dès aujourd’hui.
Elle observa le mobilier sobre de la pièce et repensa encore au coup du sort qui l’avait conduite ici : l’appel salutaire de son mentor après la tromperie de son compagnon. Elle se souvint de la journée de conférence et qu’il avait été porté à sa connaissance que des membres du club de foot y étaient présents. Était-ce suite à leur intervention que le docteur Zabowski avait été contacté par le saoudien ? Y avait-il des joueurs de l’équipe qu’elle avait croisé sans le savoir ? Et ce joueur blessé, est-il présent ?
Et lui ?
Elle se remémora son regard sombre et profond, les inflexions chaudes de sa voix, l’odeur de cèdre de son parfum, la douceur de ses lèvres, le goût de son baiser. C’était tout ce qu’elle gardait de cet inconnu qu’elle ne pourrait oublier malgré elle.
Claire secoua la tête, ce n’était pas le moment d’y songer.
Dans l’entrefaite, la porte s’ouvrit sur Yassin Messaoudi et ses collaborateurs. Impassibles, ils reprirent leur place tandis que Claire tortillait ses doigts, impatiente de connaître le verdict.
Le saoudien se râcla la gorge et déclara :
—Bienvenu au FCR Stadium mademoiselle Delcours ! Nul doute que vous serait un atout précieux dans cette équipe. Voyons tout de suite les détails.
Claire acquiesça tout sourire, un poing serré sous la table pour contenir sa joie.
Le président adjoint lui présenta alors son contrat dont il fit la lecture en lui apportant des précisions. Le directeur technique lui détailla ensuite les différentes tâches qu’elle devrait menées : effectuer le suivi d’une dizaine de joueur, être en appui du préparateur physique sur des séances d’entretien musculaire, assister aux entraînements pour prévenir les risques de blessures, les accompagner sur les matchs et bien sûr réaliser la rééducation d’un joueur en particulier.
—Qu'en est-il réellement ? demanda Claire à ce sujet.
—Disons simplement que ça ne va pas aussi vite que prévu, répondit le directeur technique.
—C’est un des meilleurs joueurs, poursuivit Messaoudi, j’ai besoin qu’il soit prêt pour la nouvelle saison de Ligue 1 et visiblement, vous avez des techniques plus efficaces que son kiné actuel. J’attends de vous que vous teniez l’échéance et surtout que vous ne nous bercez pas d’illusion sur sa faculté à rejouer au football.
—Quand démarre la saison ?
—En août mais j’entends qu’il participe à des matchs amicaux avant. Il devra être prêt pour juin.
—Si je comprends bien, résuma Claire, vous me demandez de trouver une solution miracle pour soigner votre joueur en six mois ?
—C’est exactement ça, confirma Messaoudi. Peu importe les méthodes, vous aurez tous les moyens nécessaires à votre disposition. Je vous laisse la semaine pour échanger avec l’équipe médical et mon joueur. Nous nous réunirons de nouveau vendredi pour décider si oui ou non vous pouvez faire quelque chose pour lui.
Claire accepta cette proposition, ainsi elle aurait le temps de connaître réellement le profil médical du joueur, de vérifier s’il serait en mesure de retrouver ses capacités et aussi de préparer son programme de rééducation.
L’entretien terminait, le précontrat signé, le président adjoint lui proposa de la conduire auprès de l’équipe médicale tout en lui faisant visiter une partie des infrastructures.