Prologue.

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Je vais dormir chez une copine :

Voilà l'excuse que Judith avait utilisée pour sortir en douce de sa maison le samedi soir. Ce vilain mensonge ne fonctionnait que trop bien sur ses parents.

Au terminus, cette dernière trottina d'impatience jusqu'aux toilettes de la gare. Elle ne voyait aucun problème à sortir un coin de sa poche afin d'éviter celles du train. Aussitôt avait-elle lâché sa pièce dans l'assiette de la dame-pipi, elle disparut dans une cabine, cela dit nullement pour lui rendre son utilité première.

La cuvette mal fixée trembla sous le poids de son large sac de voyage. Judith en sortit respectivement un jean serré, qui ajouta de la longueur à ses jambes, et un top argenté, dont le dos était dépourvu de tissu. Elle troqua son soutien-gorge, rouge agressif, pour l'enfiler et cacha le surplus de peau d'un perfecto aussi noir que ses talons aiguilles. Ce fut au tour du lavabo hors des toilettes de subir le même sort. Afin de se refaire une beauté, elle y lâcha son sac sans aucune délicatesse. Un trifouillage intense débuta, ses produits y étant éparpillés. 

Chaque artefact semblait être une nécessité : le mascara noircissant ses yeux noisette, le stick peinturant du rouge sur ses lèvres trop peu pulpeuses à son goût, ainsi que le blush pour réhausser ses pommettes. De manière générale, Judith trouvait qu'elle manquait de formes, de son corps à sa chevelure trop plate. D'une main de fer, elle la souleva dans l'espoir de lui donner du volume et admira l'artifice final. 

D'un fin sourire, elle finit par se dire : "pas si mal."


***


Elle en fut convaincu aux têtes des hommes qui se dévissèrent sur son passage, ceux-ci attirés par le claquement de ses talons contre le sol. L'idée de les pièger pour abus sur mineur lui fit relever le nez. Ils pouvaient bien matter ses petites fesses, rien ne la couperait dans sa course. Les lumières de la ville embrasaient la couleur de ses cheveux tandis que la fête prenaient un autre tournant dans les grandes allées où elle se fit siffler. Un de ces "crevards" dans les bars vint lui barrer le passage en l'invitant poliment à s'amuser avec lui. La solidarité féminine triompha ce soir là. L'apparition de ses sauveuses lui permit de s'éclipser dans les ruelles.

Judith n'avait rien à faire dans ce quartier, où tout le monde se faisait plus discret. Cela rendait l'aventure plus excitante. Davantage quand elle reconnut l'enseigne au loin :  un néon monochrome, en forme de verre à cocktail sur lequel était noué un noeud papillon. Confiante, elle se dirigea vers l'objet, ou plutôt le lieu, de ses désirs. Qu'on la remarque lui passait au dessus de la tête. Le Major n'était plus qu'à deux pas et les épais rideaux qui s'étalaient sur l'intérieur des fenêtres semblaient dissimuler des secrets bien gardés. Ils lui donnaient envie de les ouvrir d'une traite. Minutieusement, elle déposa sa main sur la clenche de la porte d'entrée tout en observant la devanture. L'endroit avait du charme.

Elle ouvrit la porte.

Le large hall puait la classe de son sol doré, l'intérieur bien plus lumineux qu'elle ne l'aurait imaginé. Judith s'avança à tâtons vers la réception, les talons sur les lignes séparant chaque carrelage. Derrière le comptoir se présenta un homme, élégant dans son costard, malgré son âge certain.

Les rides autour de ses yeux disparurent le temps de prendre entièrement connaissance de sa personne :

  • Mademoiselle ? releva-t-il, avec douceur. Que faites-vous ici ? Je ne pense pas qu'une enfant telle que vous devrait...
  • L'enfant, elle a dix-sept ans, lâcha-t-elle en même temps que son sac sur le comptoir. Et elle est bourrée de fric. Quant à votre  établissement, j'ai entendu dire que c'était le meilleur, alors servez-moi un homme... Un vrai.

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