1. Sac à dos

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Bon, faisons simple et allons à l’essentiel. Je m’appelle Eloane et je suis AESH (accompagnante d’élèves en situation de handicap, si vous préférez). Vous allez me dire « quel est le rapport avec le thème du jour ? » et à cela, je vous réponds que ça vient. Vraiment. Ça peut vous paraître étrange - pour moi, ça l’a été - mais mes premiers jours, j’ai eu la naïveté de venir avec mon sac à main. Je ne pensais pas avoir besoin de plus. J’avais tort. Bien vite, l’évidence m’a sauté aux yeux et mon plus fidèle allié dans ce nouveau job dont je ne connaissais rien fut mon sac à dos.

Vous voyez, je vous avais dit qu’on y viendrait. Vous n’aurez pas eu à attendre longtemps avant qu’on y arrive. C’est que j’essaie de ne pas trop me disperser non plus.

En effet, mon petit sac à main s’est vite avéré insuffisant face à ce que le travail exigeait. En tant qu’accompagnante, je suivais certains élèves dans leur quotidien et donc leur cours. Si, pour certains, il me suffisait de leur reformuler les consignes ou d’écrire à leur place, pour d’autres il me fallait prendre le cours pour ensuite le leur photocopier ou bien écrire un suivi sur leur comportement, signaler des difficultés ou des prises de bec.

Du coup, que trouve-t-on dans le sac d’une AESH ? Question passionnante, n’est-ce pas ?

Je ne peux répondre au nom de tous et toutes mes collègues. En ce qui me concerne, c’est vite devenu un fourre-tout. Bon, il y a la base : j’ai vite eu besoin d’un cahier voire deux pour tout bien séparer, les cours d’un côté, les suivis de l’autre. Et puis de quoi écrire. D’abord un stylo bleu avant d’opter pour le fameux quatre-couleurs. Et des surligneurs. Et des crayons à papier. Et de la colle. Pas que j’en ai forcément besoin mais mes élèves ont tendance à perdre leurs affaires quand ils ne les abiment pas. J’anticipe donc en étant équipée afin de pouvoir leur prêter ou bien tout faire moi-même sans perdre de temps. Et…

Oui, bon, ce n’est vraiment pas intéressant, je vous l’accorde.

Par la suite, mon sac à dos d’écolière, qui me donnait l’impression de revenir 25 ans en arrière, devint multifonctions. La poche avant devint une trousse à pharmacie. Pas pour les petits, cela ne faisait pas partie de mes missions. C’était pour moi. Si enfant, les bavardages étaient la meilleure chose en cours, en tant qu’adulte j’avoue que le bruit constant me donne vite des migraines. J’avais donc de quoi tenir toute la journée, surtout après un cours de musique où les enfants s’en donnaient à cœur joie pour exploser les tympans de leur auditoire.

Dans mon fidèle sac, on trouve également deux petites bouteilles : de l’eau pour faire passer la pilule ou quand il fait chaud. Et… non, pas de l’alcool, mais quelque chose de sucré, souvent du thé froid. C’est mon péché mignon. Quand j’y pense, j’ajoute un petit paquet de biscuits qui finit inévitablement écrasé. J’ai beau le savoir, à chaque fois je fais cette bourde.

Je pourrais m’arrêter là. Si j’étais une accompagnante 100% sérieuse, peut-être même austère, c’est ce que je ferais. Ce n’est pas le cas. Tout au fond se trouve de quoi me divertir quand j’ai un petit moment de libre. Je culpabilise parfois de ne pas prendre de pause à discuter avec mes collègues, mais j’ai besoin de souffler, d’avoir quelques minutes pour moi. Quand ce n’est pas un livre ou de quoi dessiner, je ramène ma console. Traitez-moi de vieille mais je n’ai pas le dernier modèle. J’ai ressorti la vieille Gameboy de mon enfance. Et franchement, j’adore ce retour en enfance !

Parfois, j’ai presque l’impression d’être redevenue une élève mais lorsque la sonnerie retentit, je ne m’inquiète pas de la mauvaise note en maths que je vais récolter mais comment aider au mieux mes élèves, si tout va bien se passer, si je vais réussir à les soulager durant cette longue journée de cours. Appuyée contre mon sac à dos, je soupire avant de repousser ces angoisses, de positiver. Je range ensuite mon petit bazar - ma console, mes croquis ou le pavé que je compte lire avant la fin de la semaine - et je regarde mon emploi du temps. Je ramasse ensuite mon fidèle allié, qui était flambant neuf et qui maintenant montre des signes d’usure, ici une trace de surligneur, là un trou dans la couture, l’intérieur rempli de miettes de gâteau, d’un tube de colle vide et d’un cours de SVT tout chiffonné.

Une nouvelle journée commence.

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